Des primaires socialistes qui dérangent
Les primaires socialistes touchent à leur fin. Il est temps d'en faire le bilan. Ces primaires gênent nos élites, la majorité du personnel politique et de nombreux journalistes.
Pour s'en convaincre, il suffit d'écouter les commentaires qui suintent dans les médias.
"Le premier tour n'a pas permis de dégager un candidat naturel". Le "candidat naturel" rappelle la rhétorique des dictatures : il y a un chef "naturel" comme il y a un "bon petit père des peuples" ou un "guide" qui émerge par magie !
Dans la véritable démocratie, le candidat idéal n'apparaît pas subitement, il est le fruit du débat démocratique où chaque a sa place. Chaque personnalité a son intérêt et sa richesse : le "candidat naturel", c'est pour les républiques bananières, pas pour une vieille et solide démocratie comme la nôtre.
"La primaire c'est marchandages, négociations et braderies ". C'est l'argument de la mauvaise foi. La primaire plaît aux citoyens. Elle leur plaît parce qu'on a cessé de se focaliser sur les petits mots des uns et les chamailleries des autres. On parle enfin de la vraie politique : on s'intéresse à la crise, au chômage, on propose des solutions, on explique aux téléspectateurs la crise. Bref, on parle aux citoyens d'eux-mêmes, on s'intéresse à leurs problèmes, à leurs inquiétudes sur l'avenir.
Et cela dérange : les mesquineries habituelles, les trompe-couillons autour de la sécurité et autres dangers, ne sont plus d'actualités. Finis les fausses inquiétudes qui faisaient oublier aux Français, leur quotidien. Les chiffons rouges de la délinquance et des étrangers sont mis au placard pour parler de la vraie Politique avec un grand P, celle de la vie de la Cité, de notre société partagée : comment allons vivre ensemble, ces cinq prochaines années ? Comment lutter contre le chômage ? Comment sortir d'une vision pessimisme de notre avenir ?
Voilà les questions qui intéressent les Français. Nos élites nous voient comme des imbéciles. Serrer des mains sur des marchés, faire des micro-trottoirs, commander des sondages, c'est continuer à ne pas discuter avec les gens. C'est croire que les réponses des Français font une opinion médiocre. C'est, au contraire, la piètre qualité des questions qui leur sont posées qui fabrique le néant de la politique française.
Mais le niveau intellectuel des Français n'est pas celui que nos élites imaginent. Niveau d'études en hausse, usages croissant d'internet : les Français développent leur sens critique et maîtrisent l'information.
La modernité en politique, c'est cesser de penser que l'abstention des dernières décennies, serait le fruit d'une population décervelée. C'est, bien au contraire, la preuve du dépit amoureux de citoyens qui quittent un personnel politique qui n'est pas à la hauteur de ses bons discours.
Revenons à la primaire socialiste. Après le premier tour, on a entend certains candidats et certains journalistes parler de ralliement et de consignes de vote. C'est une logique imbécile qui date du XXéme siècle. Le citoyen de notre siècle n'a que faire de l'opinion de celui auquel il a donné son bulletin au premier tour. Il ne le suit pas comme un mouton. Il a son propre libre arbitre. Il ne se détermine plus sur la couleur de cravate et la faconde d'un candidat. Il regarde son programme et ses idées. Est-il réaliste ? Correspond-il aux valeurs que je partage ?
La victoire des primaires est d'abord celle-là : enfin, on a parlé de politique. On est sorti du marais glauque des bruits de palais, des rumeurs et des cachotteries.
Maintenant que la primaire se termine, le personnel politique, les futurs candidats et les journalistes devront s'en souvenir : les Français attendent des hommes et femmes politiques de la grande Politique, ils ne veulent plus des petits secrets et des bons mots. Alors, donnons leur un bon conseil : Il faut virer les communicants et leurs cachets mirobolants et venir débattre du monde de demain avec les citoyens.
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