Doigt d’honneur au Président Macron : pour le même geste, un retraité de 61 ans avait été placé en garde à vue et convoqué au tribunal
La photo d'un jeune homme de Saint-Martin faisant un doigt d'honneur aux côtés d'un Emmanuel Macron ravi a suscité d'innombrables commentaires navrés ou moqueurs sur les réseaux sociaux, provenant de toutes sortes de personnes, de tous bords politiques.
Pourtant, la polémique s'est rapidement polarisée autour de la seule réaction de Marine Le Pen, à laquelle le Président et toute la Macronie ont répondu, ignorant que le tollé avait été beaucoup plus général, allant bien au-delà du Rassemblement national.
Dès hier, le chef de l'État a laissé entendre que les critiques étaient essentiellement le fait de racistes, le jeune homme faisant le doigt d'honneur étant noir :
« Il faut arrêter de penser que notre jeunesse, parce qu'elle est d'une certaine couleur ou à un moment a fait des bêtises, il n'y a rien à en tirer. »
Ce 1er octobre, Marlène Schiappa, secrétaire d'État chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes, a repris à son compte cette ligne de défense :
« Marine Le Pen est leader d’un grand parti raciste d’extrême-droite. Ce qui la choque, c’est la couleur de peau de ce jeune. »
Même son de cloche chez le député LREM du Val d'Oise Aurélien Taché :
« Ceux qui polémiquent ne supportent tout simplement pas que la France, à tous les niveaux, change de visage... »
Ceux qui polémiquent ne supportent tout simplement pas que la France, à tous les niveaux, change de visage...c'est précisément la raison de mon engagement derrière lui. Merci @EmmanuelMacron https://t.co/VX0lQQgyl2
— Aurélien Taché (@Aurelientache) 30 septembre 2018
Pour camper un peu le personnage, Aurélien Taché s'était fait remarquer il y a quelques mois en faisant savoir que des femmes voilées à l’Assemblée nationale auraient son soutien car le voile islamique, selon lui, fait partie intégrante de la société française :
« Aujourd'hui, des jeunes femmes qui portent le voile, c'est la France. Et, à partir du moment où ces jeunes femmes s'engagent, manifestent, prennent des responsabilités, quoi de plus français que cela ? »
Mais revenons à notre polémique.
A en croire Macron, Schiappa et Taché, un doigt d'honneur, en soi, ça n'aurait rien de bien choquant, et seule la couleur de peau du jeune farceur justifierait l'indignation malsaine de certains.
Mais ayons un peu de mémoire. Le 20 avril 2018, on pouvait lire ceci dans Vosges Matin :
"Un homme de 61 ans a été interpellé ce mercredi et placé en garde à vue par les policiers de Saint-Dié. Le sexagénaire, retraité, a fait un doigt d’honneur au président de la République, Emmanuel Macron, lors de sa visite dans la cité déodatienne. « L’outrage à une personne dépositaire de l’autorité publique », passible de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende, a eu lieu lors d’un échange sur l’augmentation de la CSG (Contribution sociale généralisée) pour les retraités. Durant son audition, le mis en cause a très vite reconnu les faits. Inconnu de la Justice, l’homme est convoqué, le 28 mai prochain, au tribunal de Saint-Dié, devant le délégué du procureur pour un rappel à la loi."
Ainsi, pour des faits similaires, un retraité, dont la couleur de peau n'est pas précisée, a été placé en garde à vue et convoqué, un mois après les faits, au tribunal pour un rappel à la loi. Il risquait une lourde amende et une peine de prison.
Le jeune Antillais, lui, a été épargné de toute garde à vue et de toute convocation au tribunal. Il est vrai que, pour sa défense, il a fait savoir que son geste n'était pas destiné au Président de la République, mais à "ceux qui pensent que son quartier n'est pas sécurisé", ou encore aux "gars qui ne veulent pas qu'on avance dans la vie", "qui n'aiment pas nous voir avec le président". Son cousin a aussi dit pour le défendre : "il a juste fait ça pour le style". L'excuse vaut ce qu'elle vaut, et convaincra qui le veut bien.
Le retraité, lui, avait reconnu "que l’effet de groupe l’avait amené à être excessif et qu’il regrettait" les faits. Des regrets qui n'ont pas suffi à lui épargner sa convocation, un mois plus tard, au tribunal de Saint-Dié. Le sexagénaire a écopé d’un rappel à la loi solennel.
En guise de protestation et de soutien au retraité, le Collectif Colère Officiel avait lancé, le 23 avril dernier, une opération doigt d’honneur à Emmanuel Macron :
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