Du bon... et du moins bon...
Le président s’est livré jeudi 24 avril 2008, pendant près d’1 h 30 au difficile exercice de l’interview !
Il a suscité chez moi un espoir en réclamant plusieurs fois la moralisation du capitalisme financier ! Mais il m’a également déçu en ne se fixant toujours pas de ligne politique claire !
Je vais reprendre son interview point par point :
Gouvernance :
Il explique qu’on lui reproche de ne pas hiérarchiser les réformes ! Or, moi, je lui reprocherais davantage de ne pas aller assez au fond des réformes ! Les exemples sont déjà nombreux, que ce soit les retraites ou l’université !
« On voudrait me
faire changer la loi à chaque coup médiatique organisé par des
associations... » C’est marrant, moi j’avais l’impression que c’était sa
manière de gouverner depuis le début de son mandat... Ou l’art d’inverser les rôles.
Il a reconnu le manque de pédagogie ; gageons qu’il en tirera les conséquences pour sa politique à venir !
Retraites :
Il s’est glorifié des régimes spéciaux alors que cette réforme va coûter plus cher qu’avant !
Il nous a expliqué qu’il n’y avait que trois leviers pour financer les retraites : baisser les retraites, augmenter cotisations et allonger la durée de cotisation ! Et ne pourrait-on pas trouver de nouvelles recettes en taxant, par exemple, les stocks-options comme le préconise Philippe Seguin, président de la Cours des comptes !
Sur les OGM : il nous dit être favorable à la recherche, mais soucieux du principe de précaution concernant les OGM : pourquoi ne retrouve-t-on pas ces exigences dans la loi ? (Il trouve le texte équilibré.)
Spéculation et capitalisme : il demande une moralisation du capitalisme financier, demandant que les entrepreneurs reprennent le dessus sur les spéculateurs ! On ne peut qu’applaudir cette déclaration ! Mais j’aimerais faire une standing ovation pour la mise en œuvre de ce principe ! Mais quand on supprime l’impôt de bourse on ne va pas, à mon sens, dans le bon sens !
Il a beaucoup jeté la pierre sur les patrons, sur les producteurs... prendra-t-il les mesures nécessaires ?
Salaires : il a fustigé les entreprises qui font d’énormes profits, mais qui ne les redistribuent pas assez, il a préconisé la répartition actionnariat, salariés et investissement d’1/3, 1/ 3, 1/3. Aura-t-il le courage d’imposer cette répartition ? Par des sanctions fiscales par exemple ? Il nous promet en tout cas une loi favorisant l’intéressement et pénalisant fiscalement les entreprises qui n’ont pas de négociations salariales ! Une telle loi, si elle est ambitieuse, ira dans le bon sens !
Quand il justifie les franchises médicales par le plan Alzheimer, pas un journaliste pour lui rétorquer qu’il casse complètement le système de protection sociale : dorénavant ce seront les malades qui paieront pour les malades : la solidarité est devenue hasbeen !
Chomâge : il a essayé de nous faire croire qu’il était pour quelque chose dans la baisse du chômage de ces derniers mois alors qu’il affirme ne pas l’être pour tout ce qui ne va pas dans le bon sens ! Bel opportunisme !
Il a souvent répété que de nombreux emplois n’étaient pas pourvus et que de nombreux élèves sortaient sans qualification du système scolaire ! Mais il n’a jamais expliqué qu’il fallait favoriser l’apprentissage, qu’il fallait revaloriser les emplois manuels... Mais quand on a une ministre de l’Economie qui dit « Il faut réhabiliter la valeur argent » cela ne va pas dans le bon sens !
Pouvoir d’achat : les journalistes l’ont longuement interrogé sur le pouvoir d’achat. Nicolas Sarkozy a parlé notamment de manque de concurrence. Puis il a cité rapidement le problème de la téléphonie : pourquoi nos dirigeants ont-ils refusé l’octroi de la quatrième licence à Iliad (Free) ?
A ce sujet, il a également expliqué qu’il fallait libérer l’installation commerciale ! On nous explique donc que c’est parce qu’il n’y pas assez de supermarchés que les prix augmentent ?
Social : concernant le RSA, mesure qui me semble une des plus importantes en matière sociale, le président est resté très vague ! Il n’a même pas su expliquer que le RSA permettrait de faire des économies par l’augmentation des cotisations sociales par exemple ! Ce sera bientôt à l’opposition de défendre les projets de la majorité !
Il s’est félicité de l’augmentation de l’AAH et du bonus de 200 euros pour les petites retraites ! Voilà des réformes qui mériteraient d’être accélérées !
Politique familiale : interrogé sur la carte famille nombreuse, il a dit qu’il ne veut pas changer la politique familiale de la France parce quelle marche bien selon lui, s’appuyant sur les chiffres de la natalité... Cette politique serait donc parfaite ? Il oublie bien vite les familles monoparentales, par exemple, qui ont des problèmes de garde et à cause de cela des problèmes financiers... Quant à la carte famille nombreuse, il a raté l’opportunité de rénover la politique familiale en élargissant les tarifs sociaux (espérons que cela viendra...) car nombreuse ne rime pas avec pauvre !
Croissance : il nous a expliqué que les performances de la France sont supérieures à celles de l’Allemagne, s’appuyant sur des projections ! Le journaliste lui a demandé à juste titre si on n’était pas trop optimiste : rappelons que le budget 2008 a été bâti sur des projections de croissance dont on sait d’ores et déjà qu’elles ne seront pas atteintes !
Déficit : il s’est engagé à ne plus avoir de budget déficitaire en 2012 ! Comment y arrivera-t-il ? Il nous manque des explications ! C’est d’ailleurs un des principaux reproches que l’on peut lui faire : il n’y a pas de politique à long terme, il ne fonctionne que par mesurettes, n’allant jamais au bout des réformes : mais espérons qu’il ait enfin compris que la dette publique devait servir aux investissements et non aux dépenses de fonctionnement !
Syndicats : une phrase m’a choqué : « Les syndicats sont dans leur rôle quand ils ne sont pas d’accord avec le gouvernement ! » ! Nicolas Sarkozy est là dans la logique d’affrontement qu’il affectionne tant ! Mais je suis plein d’espoirs dans la loi sur la représentativité syndicale !
Il a répété plusieurs fois qu’il avait commis des erreurs ! Il serait bon qu’il en prenne bonne note et qu’il arrête d’expliquer que si les Français ne sont pas contents c’est parce qu’il réforme. Ne s’est-il jamais demander s’il réforme mal ?
Jeunesse : autre phrase choc : « Il faut toujours écouter les inquiétudes de la jeunesse, quand on est jeune forcément on est inquiet ! » Premièrement, il ne faut pas qu’écouter il faut les entendre ! Et non les jeunes ne sont pas forcément inquiets ! Ne sont inquiets que ceux que l’on laisse sur le côté ! Je pense qu’il y a bien d’autres administrations que l’Education nationale où l’on peut se permettre de diminuer le nombre de fonctionnaires !
Concernant la laïcité : il nous a expliqué en substance que les gens qui ne croyaient pas manquaient quelque chose... (Puisque l’instituteur, et donc par lui la société, ne peut pas l’apporter...) C’est une chose qu’on ne devrait pas entendre de la part d’un président de la République qui n’a pas à juger les croyances ou les non-croyances de ses concitoyens. Et, avant ça, il avait dit que les élèves devaient respecter et admirer leurs maîtres... pas facile quand on entend que le curé lui est supérieur ! (Il y a un peu de démagogie dans mes propos je voue l’accorde !)
Politique étrangère : on ne l’a interrogé que sur le Tibet alors que le problème des droits de l’homme en chine ne se cantonne pas aux seuls Tibétains ! De nombreux Chinois ne sont pas libres ! Pas un mot non plus sur sa complaisance envers le régime de Kadhafi ! Ces reproches s’adressent bien évidemment autant aux journalistes qu’à Nicolas Sarkozy !
Il a réclamé à demi-mot (concernant le Tibet) une politique étrangère commune des pays européens ! J’espère qu’il mettra à profit sa présidence de l’UE pour imposer l’idée d’une défense, d’une politique étrangère et d’une politique sociale commune !
Concernant l’immigration, il a parlé (très) rapidement de développement de l’Afrique, mais là encore sans donner de pistes. Or, ce problème est crucial pour l’avenir de l’Afrique bien sûr, mais du monde et donc du nôtre !
Et revenons rapidement sur la forme : les journalistes semblaient ne pas avoir le droit d’émettre le moindre doute sur la politique de notre monarque républicain !
Un mot de conclusion sur l’émission de France 2 qui a fait suite au débat : deux élus étaient invités, Manuel Valls pour le PS et Patrick Devedjian pour l’UMP ! Pourquoi cherche-t-on à tout prix à nous imposer ces deux seules visions de la France et de la politique !
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