Elections : mauvais jour pour Macron
Certes, c'était assez discret, mais dimanche ont eu lieu deux élections importantes... Mais pas d'inquiétude, vous n'avez pas manqué à votre devoir de citoyen : les premières étaient en France, mais indirectes (pour renouveler une partie de nos sénateurs) et les secondes étaient directes mais chez nos voisins Allemands.
Et si les élections précédentes ont été un carton plein pour Emmanuel Macron, il n'est pas aussi évident pour lui que celles dont le verdict arrive aujourd'hui lui facilite la tâche... Explications.
Les Sénatoriales : des partielles de haut niveau
Commençons par les élections les moins importantes et celles qui ont le moins d'impact sur notre président et sa capacité à gouverner. Les Sénatoriales cette année mettaient en jeu 171 sièges de sénateurs à renouveler, avec au total 76 000 grands électeurs. Ces élections étaient en quelque sorte un test pour La République En Marche : d'abord c'est une élection qui suit les premiers mois de pouvoir du nouveau président, et ensuite cette élection permet de tester la capacité de "gagne" de LREM. Ayant déjà passé avec succès les législatives, le nouveau mouvement a toutefois dû se présenter face à un obstacle plus élevé : en effet, comme ce ne sont que des élections partielles et que LREM ne disposait que de peu de sénateurs avant, il apparaissait presque impossible de renverser la majorité de Droite et de s'imposer au Sénat. De même, il faut aussi rappeler que les grands électeurs sont des députés, maires, conseillers municipaux... et que LREM, ce bébé de la politique, n'en a pas assez.
Si l'on se fie aux premiers résultats, la "marche" (sic) semblait effectivement trop haute pour le nourrisson. En effet, il semblerait que LREM soit à seulement 20 à 30 sénateurs quand l'objectif annoncé était de 50 en juillet dernier. C'est bien la droite qui reste majoritaire avec 162 sièges, quand le PCF réussit à conserver un groupe (11 sénateurs). Le Front National ne progresse pas, et les centristes sont autour de 40 (peut-être une force d'appui s'ils se montrent assez "constructifs"...).
On le voit donc, ces sénatoriales sont un coup d'arrêt et la nouvelle majorité n'a pas réussi la passe de trois. Les conséquences ne sont pas très bonnes pour le président et son gouvernement : le Sénat, bien qu'il n'a jamais le dernier mot dans le processus législatif, peut tout à fait s'opposer et faire traîner en longueur le processus juridique, dénaturant certains projets. Dans un contexte de Loi Travail ou encore de volonté d'étendre la PMA aux femmes célibataires et aux lesbiennes, ces élections pourraient donc mettre des bâtons dans les roues de Jupiter pour la politique intérieure. Elles pourraient aussi bloquer la réforme constitutionnelle envisagée par le président. Mais ce n'est pas tout : une élection peut en cacher une autre !
Les élections générales en Allemagne : une donnée pour l'avenir européen
Traversons un instant le Rhin à présent : l'Allemagne renouvelle son Bundestag aujourd'hui et l'avenir du gouvernement de notre voisin en dépend directement. C'est dans une facilité illusoire qu'Angela Merkel se présentait à un quatrième mandat de chancelière d'affilée, un record qui ne fut connu qu'en Espagne en Europe. La campagne n'a jamais fait grand secret de la victoire de celle-ci mais le plus grand mystère et l'incertitude réside dans le rapport de force : avec qui va gouverner celle qui aura croisé pas moins de 4 présidents français ?
Au regard des résultats qui sont parvenus, on peut faire plusieurs constats :
- Les partis traditionnels ont comme en France subi un revers : moins 91 sièges pour la CDU-CSU, moins 57 pour le SPD. Mais leur force était tel qu'ils restent devant, mais à leur plus bas historique depuis 1949. Cela n'empêche pas Angela Merkel de l'emporter.
- Les "seconds couteaux" se renforcent : l'Alternative für Deutschland (populistes et eurosceptiques) font une entrée fracassante avec un peu moins de 90 élus, quand les Libéraux (FDP) font leur grand retour avec plus de 60 élus.
- La gauche plurielle résiste : les Verts restent constants avec environ 60 députés quand Die Linke (l'équivalent de notre France Insoumise) recule légèrement (environ 60 aussi).
Tous ces termes rendent l'équation bien complexe. Pour atteindre la majorité absolue il faut s'allier, or le SPD semble déjà décidé à refuser, au contraire des années précédentes. Mais pour couronner le tout, l'AfD, qui apporterait de nombreux sièges à une coalition, est exclue du jeu par Merkel qui ne veut pas gouverner avec les extrêmes. Reste donc les Libéraux et éventuellement les Verts, pour une coalition multicolore. En résumé, l'Allemagne sera plus difficile à gouverner.
Revenons à Emmanuel Macron. Si celui-ci scrute sans doute de près ces résultats à l'heure qu'il est, c'est parce que l'Axe Berlin-Paris est le binôme fort dans la politique européenne et que rien ne peut vraiment se faire sans l'accord de notre premier partenaire. Or, Emmanuel Macron veut précisément aller vers plus d'intégration, notamment économique et financière, pour consolider la stabilité de l'euro et réduire les inégalités que cette monnaie induit. Le problème est que le SPD, son principal allié, ne fera probablement pas partie de la coalition et son remplaçant serait plutôt le FDP, bien plus opposé à une intégration économique européenne. Moins européiste que par le passé, il est plus concentré sur la rigueur budgétaire et l'immigration. De ce fait, pour contenter ses alliés, il se peut fort bien que les projets d'Emmanuel Macron soient tranquillement éconduits ou encore mis à la corbeille. De ce fait, Emmanuel Macron pourra être de nouveau baptisé en Emmanuel Hollande, du triste nom de son prédécesseur qui avait cru pouvoir infléchir le pacte de stabilité...
En conclusion donc, Emmanuel Macron n'est pas au bout de ses peines. La journée ne fut pas bonne pour lui et annonce peut-être même un long hiver. Les sénatoriales rendent la mission plus difficile pour réformer le pays, alors que ses rêves européistes pourraient devenir des cauchemars si une "mauvaise" coalition se forme outre-Rhin.
Mais tout cela n'est pas pour nous déplaire : les mois à venir vont être très intéressants... Je sors le Pop corn.
Sources
France TV Info
Slate
Le Point
Mediapart
L'express
Vin DEX
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