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Enfin une réforme de la garde à vue (GAV)

Répression, répression, c’est dans l’air du temps ! Pire, il faut faire du chiffre : Soumis à la religion de la statistique et évalués en fonction de leurs résultats, les officiers de police judiciaire abusent trop souvent de la garde à vue.

Oui, mais les ordres viennent d’en haut :

 "En janvier 2009, le président Nicolas Sarkozy avait dit qu’il fallait substituer une culture de l’aveu à une procédure de la preuve, rappelle Jean Castelain. Des gens sont prêts à dire n’importe quoi pour sortir des conditions déplorables de la GAV."

« Le nombre de gardes à vue augmente d’année en année. Tout cela se justifie principalement par une politique du chiffre, par une culture du résultat », explique Pierre Marco, commandant de police affilié à l’Unsa, avant de reprendre :

« Le problème, c’est que la garde à vue, c’est un bon moyen pour juger de l’activité d’un service de police. Le chiffre, on peut le faire en mettant des contraventions, en faisant des contrôles d’étrangers en situation irrégulière, et bien sûr en mettant en garde à vue. »

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Alors, la garde à vue s’est complètement banalisée même pour des infractions mineures.

2001 : 336 718 GAV - 2006 : 530 994 GAV – 2009 : 790 000 GAV

La Commission Nationale de Déontologie de Sécurité (CNDS, www.cnds.fr ) “attire l’attention sur les incidents ou violences lors de certaines gardes vue”. Elle rappelle que les fonctionnaires de police sont “confrontés à des situations périlleuses” mais souligne aussi “la forte pression subie par les fonctionnaires de police induite par les obligations de résultats ordonnées par leur hiérarchie”.

« Toute personne suspectée d’avoir commis une infraction peut être placée en garde à vue par un officier de police judiciaire pendant 24 heures renouvelables, quelle que soit la gravité des faits. L’intéressé ne bénéficie pas de l’assistance effective d’un avocat. » Elle ne rencontre son avocat qu’au début de son audition (si du moins on est parvenu à le joindre !) et une demi-heure pas plus.

Alors oui, des dérives il y en a et hélas les exemples de Garde à Vue (GAV) sont nombreux.

C’est le cas de cet étudiant Lyonnais embarqué en avril 2009 pour de prétendues violences envers la police.

http://www.dailymotion.com/video/xc6ub2_abus-de-garde-a-vue-la-polemique_news?start=9#from=embed

Février 2010, trois collégiennes de 14 ans sont mises an garde à vue après une bagarre près de leur collège. L’une d’entre elle, Anne, dit avoir été emmenée en pyjama depuis son domicile jusqu’au commissariat. La jeune fille fluette est conduite jusqu’au commissariat sans être menottée. Un peu plus tard, elle est transférée, avec ses deux copines, du 20e au 18e arrondissement pour être examinée par un médecin. Pendant le voyage aller et retour, les trois jeunes filles auraient été entravées, alors que rien ne semblait rendre nécessaire l’usage des menottes.

http://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/soupcons-de-garde-a-vue-abusive-sur-trois-collegiennes_847863.html

La garde à vue à la française a été à l’origine d’erreurs judiciaires retentissantes.

Pas terrible notre image au sein de l’Europe : l’Hexagone fait en effet figure de mauvais élève de l’Union. Dans de nombreux pays du Vieux Continent, les avocats, loin d’être des pestiférés, sont partie prenante des gardes à vue sans que cela nuise à l’efficacité de la machine pénale. Le pays de Voltaire et d’Hugo ne pourra rester longtemps en marge des grandes nations européennes.

Ce qui est très grave comme le confirme le Conseil Constitutionnel c’est que le nombre croissant de G.A.V est à rapprocher de la diminution des affaires confiées à des juges d’instruction :

«  La proportion des procédures soumises à une instruction préparatoire représente désormais moins de 3% des dossiers. Dans le cadre du traitement dit “ en temps réel ” des procédures pénales, une personne est aujourd’hui le plus souvent jugée sur la base des seuls éléments de preuve rassemblés avant l’expiration de sa garde à vue.

Celle-ci est devenue la phase principale de constitution du dossier de la procédure en vue du jugement de la personne mise en cause. »

Or, la jurisprudence européenne est très claire sur ce point, nul ne peut être reconnu coupable sur la base de ses seuls aveux en garde à vue.

Alors, pourquoi une prise de conscience du Conseil Constitutionnel seulement maintenant ? Voilà que depuis le 1er mars dernier, tout justiciable engagé dans une instance judiciaire ou administrative peut saisir le Conseil constitutionnel s’il estime qu’une loi porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit.

Au regard des dérives observées lors des placements en garde à vue ordonnés par les policiers et les gendarmes, il était inévitable que le sujet soit l’un des premiers à être soumis à la docte assemblée.

Et il n’a pas trainé le Conseil Constitutionnel ! L’institution suprême a tranché vendredi 30 juillet 2010 sur le régime de la garde à vue (GAV) :

Le Conseil a donné un an aux parlementaires pour réformer le régime de la GAV. "L’avant-projet de loi sur la réforme pénale sera transmis au Conseil d’État dans les prochaines semaines", assure-t-on au ministère de la justice.

La réforme qui sera débattue devant le Parlement à l’automne prévoit de limiter la mesure de la garde à vue aux seules personnes encourant des peines d’emprisonnement.

Aucune condamnation ne pourrait être fondée sur des aveux passés hors de la présence des avocats.

En attendant, restez prudent :

Si vous êtes privé temporairement de vos libertés, sans raison valable, sans même savoir ce qu’on vous reproche, méfiez vous car vous êtes en position de faiblesse face à des OPJ qui vous suspecte de faits qu’ils tenteront de vous faire avouer.

Il faut savoir qu’on doit vous notifier sans délais vos droits et qu’on doit vous dire pourquoi vous êtes placé en garde à vue.

Vous avez le droit de manger, de boire, de dormir et d’aller aux toilettes. Vous avez le droit de vous entretenir avec votre avocat, une petite demi-heure pas plus, et il n’en sait pas plus que vous sur les faits qui vous sont reprochés. Il n’a pas le droit de vous assister pendant l’interrogatoire.

Vous avez le droit de faire prévenir un proche même si on vous dit le contraire.

On vous imposera certaines humiliations comme le port des menottes, hors : "nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s’il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui même, soit comme susceptible de prendre la fuite" (article 803 du Code de procédure pénale). Si vous vous laissez faire et qu’on vous colle les menottes, c’est un abus !

On vous imposera vraisemblablement une fouille à nu. Or ce déshabillage est une mesure attentatoire à la dignité de la personne. Dans une note de juin 2008, le directeur général de la police nationale recommande la "palpation" de sécurité plutôt que la fouille.

Pendant toute la durée des auditions vous serez soumis à de fortes pressions qui vont vous fragiliser psychologiquement. Le but affiché est bien d’obtenir vos aveux. N’oubliez jamais que vous êtes présumés innocent, alors ne craquez pas, ne signez rien !


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1 réactions à cet article    


  • paul 6 août 2010 17:36

    On sait les raisons bassement politiques de l’énorme dérive de la GAV, qui, jusqu’en 2006, ne posait pas de problème particulier .
    Il s’agissait donc pour le CC de rétablir la dignité de la personne et les garanties de sa défense .
    Mais la loi avant d’être votée dans quelques mois, sera soumise au Parlement, et il faut espérer que
    celui-ci respectera les avis du CC .

    Sinon risque de « retoquage » de la loi, ce qui confirmera que N.S. est le président le plus retoqué
    (pourquoi « re » au fait) après la loi Dati sur la rétention de sureté, une partie d’Hadopi, la taxe carbone,
    et la dernière, menace de déchéance de nationalité .
    Pourquoi prend il ce risque ? pour un effet d’annonce, pour prouver qu’il agit. A tort et à travers .

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