Et Dieu dans tout ça ?
Vous avez certainement lu comme moi dans la presse les dernières nouvelles concernant Nicolas Sarkozy qui, après le discours sur Jaurès, Blum et les travailleurs, suivi d’un virage assez remarqué mêlant immigration et identité nationale, se met à revendiquer les racines chrétiennes de l’Europe et de la France, louant le « long manteau d’églises » qui recouvre notre pays.
On peut se rassurer en se disant qu’un peu désespéré, il essaie de grapiller quelques voix de l’électorat chrétien qu’il a récemment choqué avec ses propos sur le déterminisme génétique, et que tout cela n’est que flatterie vers un énième segment de l’opinion publique, comme on en a eu tant, à gauche comme à droite dans cette campagne. Mais quand on se souvient des difficiles débats sur la laïcité (le port du voile, le sexe des médecins hospitaliers, etc.), on peut se demander si c’est vraiment le moment d’agiter le goupillon et de donner ainsi des idées à d’autres... Et si l’on a en tête le débat sur le traité constitutionnel, où la France a résisté avec difficulté à la pression d’autres pays comme la Pologne, qui voulaient intégrer dans la Constitution la référence aux racines chrétiennes de l’Europe, on peut être un peu inquiet de la suite qui va être donnée au dossier s’il est élu (sachant que la Constitution ne repassera pas dans ce cas, il l’a dit, par un référendum). « La question de savoir si Dieu doit être dans la Constitution européenne ne se pose plus puisqu’il n’y a pas de Constitution », dit-il. Oui, mais, il y aura justement bientôt un nouveau projet de Constitution sur le tapis...
Mais j’arrête mon couplet anti-Sarko. A chacun de se faire sa religion avant dimanche... En tout cas, cela m’a donné l’idée d’aller voir comment les candidats utilisent les mots religion(s), chrétien(s), catholique(s), protestant(s), juif(s) et musulman(s) dans les discours. Comme toujours, je rapporte les fréquences à 100 000 mots. Voici la répartition (comme je l’ai déjà dit dans d’autres billets, je n’arrive pas à avoir les discours des autres candidats, qui sont d’ailleurs souvent improvisés et ne laissent pas de trace écrite) :

On voit que Sarkozy est, de loin, le candidat qui met la question des religions au centre de la campagne. Jusqu’ici, il parlait surtout des juifs (tiens, y aurait-il des voix à prendre de ce côté-là ?), très peu des musulmans (à part bien sûr les histoires d’excision et de moutons dans les baignoires). Derrière lui vient Le Pen, qui parle des trois religions, et pas mal des musulmans (détrompez-vous, il n’en dit pas de mal, bien au contraire : depuis l’automne 2005, le FN a changé de stratégie - il y a des voix à prendre de ce côté-là aussi). En troisième position vient Bayrou, qui parle de la religion surtout pour défendre la laïcité. Les autres parlent peu des religions, voire pas du tout. Un petit point remarquable : dans tous ses discours, Royal n’a jamais prononcé les mots chrétien(s), catholique(s) ou protestant(s), ni d’ailleurs le mot religion(s). Faut quand même pas exagérer. Les électeurs de gauche peuvent peut-être avaler le sabre, l’encadrement militaire, la Marseillaise et le drapeau, mais quand même pas le goupillon !
D’ici qu’il y en ait quelques-uns qui se prennent une calotte, dimanche...
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