François le supplétif
Le jour de gloire est arrivé pour François Fillon. Il est peut-être même déjà passé. Le nom du Premier ministre s’étale dans toute la presse. C’est rassurant, nous en avons un. Pourtant au-delà de l’évaluation subjective de la prestation orale, tous les éditorialistes s’accordent sur un point. Matignon n’est plus un pôle de décision mais bien la conciergerie de l’Elysée.

Le correspondant parisien du quotidien Suisse Le Temps attendait mieux d’un Premier ministre dans une situation inconfortable, enfermé dans un couple exécutif "dominée de la tête et des épaules par un président hyperactif". Sylvain Besson ajoute : "François Fillon avait pourtant une occasion en or de faire entendre sa voix"... "il avait promis des « surprises ». Il n’y en eut aucune, François Fillon s’est borné à exposer le programme défini par Nicolas Sarkozy au cours de sa campagne présidentielle."
"On ne pourra pas reprocher à François Fillon de manquer de souffle. Ce qui impressionne, c’est l’ampleur des réformes alignées et mises en perspective", écrit François-Xavier Pietri dans La Tribune.
Cruel, Jacques Garraud pour La Charente libre parle d’échec : "Pourtant l’exercice semble bien raté. D’où vient alors cette étrange impression que François Fillon n’ait ni vraiment convaincu ni surtout "surpris" comme il avait promis de le faire hier encore ? Sans aucun doute du fait que tout le long de son intervention flottait sur lui l’ombre portée de "l’omni-présidence de Nicolas Sarkozy" brocardée par François Hollande."
Laurent Joffrin (Libération) va plus loin : "D’un gouvernement qui se place sous le signe de la rupture, on attendait un peu plus d’audace institutionnelle."
Et si, dans les faits, celle-ci était déjà en œuvre ? "A l’Elysée, le pouvoir. A Matignon, le savoir-faire et, si possible, un style. L’avenir tranchera sur le savoir-faire de François Fillon. Quant au style... Fillon, c’est Sarkozy en moins bien : même texte riche, mais débité sans souffle." (Le Progrès Francis Brochet).
Au-delà de l’ardeur réformatrice partagée avec Nicolas Sarkozy, François Fillon serait donc réduit à un rôle de chef d’orchestre chargé de mettre en musique une partition écrite par un président de la République n’hésitant pas à remplacer les solistes défaillants.
Sans réel pouvoir de décision, François Fillon serait seulement détenteur du ministère de la parole. Mais, que vaut réellement celle-ci si dans le même temps, il ne s’affiche pas comme le maître du temps, celui qui fixe le tempo ? "Condamné à être moins précis, puisque manifestement ce n’est pas lui qui fixe le rythme, le locataire de Matignon s’est même abstenu de tout calendrier, un tour de force alors qu’il est annoncé partout depuis des semaines que la session d’été sera menée à marche forcée. Une imprécision qui, sur plusieurs dossiers, lui a aussi permis d’entretenir le flou et d’enrober de belles phrases creuses les mesures pourtant très brutales en préparation." (L’ Humanité, Pierre Laurent)
Alors, "la représentation était elle bien nécessaire ?" (Les DNA, Olivier Picard). Pas vraiment pour Hubert Coudurier (Le Télégramme) "Ce fut un non-événement."
Reste à savoir si dans ce contexte, le Premier ministre a un avenir. Gilles Dauxerre dans La Provence est sceptique : "François Fillon va-t-il s’autodétruire ? Hier, avant de dérouler devant les députés le programme présidentiel de Nicolas Sarkozy, le Premier ministre a tout bonnement décrit de quelle manière son poste allait disparaître des institutions de la République. Dans les faits, le chef de l’État a déjà démontré, depuis son élection, qu’il détenait tous les pouvoirs exécutifs et que le Premier ministre n’était là que pour mettre en oeuvre la volonté présidentielle."
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