• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile

Accueil du site > Actualités > Politique > Hervé Juvin : La grande séparation

Hervé Juvin : La grande séparation

Une redécouverte du vrai sens de la politique

l
 
Le livre d’Hervé Juvin est le 3ème tome d’une trilogie après L’avènement du corps et Produire le monde. Le titre renvoie à deux significations. L’une est un constat. L’individualisme et le libéralisme ont introduit une séparation au sein du peuple lui-même. La grande séparation c’est que l’individu s’est substitué au peuple. La grande séparation c’est aussi le constat que, dans un monde qui se veut fluide, les frontières se reconstituent : Kosovo, Soudan divisé en deux, Yougoslavie éclatées en multiples Etats qui se veulent et/ou se croient indépendants, etc. Mais aussi séparation par l’argent qui remplace les autres séparations. 

En outre, l’essor de l’Etat a accompagné l’essor de l’individualisme et a accentué le déliaison du corps social. Mais la grande séparation n’est pas qu’un constat, c’est aussi un projet. Hervé Juvin pense que la diversité de l’humanité et du vivant est le bien le plus précieux. Il en appelle pour la préserver à une écologie humaine. Le principe de celle-ci c’est une séparation à instaurer ou réinstaurer entre les peuples. C’est une limitation des communications et des interactions. C’est ce que Régis Debray avait appelé un éloge des frontières. C’est un retour au lien privilégié entre un peuple, sa terre, et un certain mode de vie : une culture. 

Juvin plaide ainsi pour moins d’accélération, moins de connexion et moins de « développement ». Il en appelle à un « polythéisme joyeux, aventureux et jamais blasé ». Nous lui ferons deux objections. L’une est qu’il parait considérer l’Etat d’Israël comme un exemple de défense de l’identité. On peut se demander si au contraire ce n’est pas un rabattement de l’identité juive sur une identité d’Etat-nation au fond très réductrice. On doit aussi observer que l’exemple d’Israël est particulièrement peu reproductible puisqu’il a consisté notamment à chasser un autre peuple de sa terre. L’énergie doit être saluée là où elle est et contraste certes avec l’impuissance de l’Europe mais elle ne saurait tenir lieu de légitimité pour toutes les actions entreprises. 

En second lieu, Hervé Juvin affirme que l’Ancien Testament nous renverrait à notre étrangeté et au culte de l’origine par opposition au Nouveau Testament, universaliste et négateur des origines des peuples. On peut au contraire se demander si l’Ancien Testament ne représente pas ce qui dans le monothéisme renvoie justement à l’exclusivisme, à l’intolérance, et la volonté suprématiste d’imposer le culte d’un Dieu tyrannique. Allant à certains égards trop vite, il est bien possible qu’Hervé Juvin ne contribue à imposer une nouvelle religion de la séparation passant à côté des vrais problèmes tels que l’emprise de la marchandise.

 


Moyenne des avis sur cet article :  1.57/5   (7 votes)




Réagissez à l'article

3 réactions à cet article    


  • Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 2 novembre 2013 18:35

    Merci pour votre compte-rendu très éclairant.
    Votre conclusion me paraît impeccable : vous pointez de manière très pertinente des positions qui me semblent intenables.
    Je ne lirai pas donc Juvin mais je lirai avec intérêt vos prochaines analyses.


    • Hervé Hum Hervé Hum 2 novembre 2013 21:32

      Non, vos deux « objections » ne sont pas valables de mon point de vu.

      Non, Israël n’est pas le seul pays à s’être construit en chassant un autre peuple, il suffit de ne citer que les USA pour s’en convaincre. Mais en fait, la majorité des pays se sont construits ainsi.

      Non, Hervé Juvin ne se trompe pas en disant que le christianisme parles d’universalisme à contrario de l’ancien testament qui ne parles que d’un seul peuple, élu, choisi par Dieu. Il s’agit bien là d’exclusivisme et de supériorité, mais pas d’universalisme, donc d’imposer un Dieu à tous, car le Dieu judaïque n’a d’autre vocation que de maintenir l’unité d’un seul peuple et non de convertir les autres. Il n’est donc tyrannique qu’envers les juifs. Et l’ancien testament renvoi bien à l’origine des peuples au travers de l’histoire du peuple qu’il raconte.

      Si le constat d’Hervé Juvin est juste, il n’en reste pas moins vrai que la solution pour préserver ce ben le plus précieux qu’est la diversité biologique et culturelle du vivant, ce n’est pas par moins de communications, mais au contraire par plus de communications qu’on arrivera à défendre ce trésor. Les frontières sont culturelles, mais pas sociales. C’est à dire que sans privilégier la coopération et la solidarité, il sera impossible de préserver ce trésor car il sera dilapidé parce que la concurrence pour l’exploitation de ces trésors interdit toute gestion responsable.


      • aloamars 28 novembre 2013 21:33

        La pensée d’Hervé Juvin est bien plus complexe, il porte un regarde politique et culturel sur l’histoire, les cultures, les religions.
        Vos objections sont des prétextes, comme toujours certains voient le doigt et pas la lune... l’emprise des marchandises est en parti la conséquence d’un affaiblissement de la culture et en parti un phantasme (dans lequel on met tout et n’importe quoi)

Ajouter une réaction

Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page

Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.


FAIRE UN DON






Les thématiques de l'article


Palmarès