Hollande, candidat des sondeurs ?
Ce matin, Martine Aubry, dans une interview au journal 20 minutes, accusait son adversaire François Hollande d'être le candidat sinon du système en tout cas des sondeurs. Quel crédit donner à cette attaque de fin de campagne ? Finalement, peu importe, ce qui compte, c'est que chacun se décide non pas en fonction des sondages mais de sa préférence personnelle.
Tout d'abord, incontestablement, depuis la sortie de route de DSK, Hollande est irrémédiablement en tête des sondages, quels qu'ils soient. S'agit-il d'une bulle médiatique ou bien d'un réel élan populaire ?
Je me souviens de François Hollande, porte-parole du parti socialiste à partir de 1995, à l'époque Jospin, et fer de lance de la critique contre le pouvoir en place. Il donnait à cette époque une image d'apparatchik, certes brillant, avec un sens consommé de la formule, mais dont les sorties médiatiques étaient malheureusement prévisibles, toujours systématiquement contre ce que proposait le gouvernement. Un peu comme le fait aujourd'hui Jean-François Copé, avec une mauvaise foi agaçante. Le type de politicien professionnel, technocrate, formé à Sciences Po et brillant par sa rhétorique, dont on a du mal à percevoir les convictions profondes (contrairement à Benoît Hamon aujourd'hui).
Deuxième image, celle du premier secrétaire du parti socialiste à partir de 1997, promoteur de la synthèse perpétuelle et du consensus mou. Son objectif principal semblait être de maintenir l'harmonie au sein du PS, en évitant les débats trop clivants et les positions trop tranchées.
On dit généralement que les première impressions sont les bonnes. J'avoue que j'ai eu du mal à croire à sa crédibilité en tant que candidat à la présidentielle, en prenant en compte ces deux étapes de son parcours. Il aurait donc changé, aurait acquis une stature présidentielle, depuis qu'il s'est lancé en campagne ? J'ai toujours du mal à la croire malgré les sondages, qui en font le champion de la gauche et le mieux à même de battre Nicolas Sarkozy.
J'ai donc regardé tous les débats sans a priori et le moins que l'on puisse dire, c'est que cela m'a plutôt renforcé dans l'image que j'avais de lui. Il a toujours évité de se mouiller, de rentrer dans l'arène et de participer aux débats d'idées, qui était par ailleurs très intéressants. Il est resté lors des premiers débats, dans la rhétorique et dans le flou, s'efforçant chaque fois de synthétiser ce que proposaient ses adversaires. A l'opposé, Martine Aubry, pour ne parler que d'elle, était toujours très claire et précise dans ses propositions, elle répondait aux questions posées contrairement à François Hollande qui, entamaient ses réponses par de longues tirades sur les grands principes, avant de répondre, finalement, aux questions... Ca me fait penser au trait de Coluche : "Technocrates : c'est des mecs que, quand tu leur poses une question, une fois qu'ils ont fini de répondre, tu comprends plus la question que tu as posée."
Par ailleurs, pour aller dans le sens de la "modération" (pour ne pas dire la mollesse), François Hollande est selon le magazine Entreprendre, le candidat préféré des grands patrons du CAC 40. Aura-t-il donc le courage de les affronter quand il faudra imposer des mesures bénéficiant à l'ensemble des citoyens ?
Maintenant, sur les sondages, quel crédit leur accorder, au vu de toutes les erreurs passées (Balladur en 1995, Le Pen en 2002, Montebourg et Royal pour les primaires actuelles) ? Par ailleurs, le problème particulier aux primaires, réside dans le fait que les prophéties de ces oracles des temps modernes, sont autoréalisatrices. Cela a été très clair pour Ségolène Royal en 2007.
Contrairement à ce que laisse entendre, Martine Aubry, je ne crois pas à la théorie d'une construction de toute pièce d'un candidat par les sondeurs. A un moment, Hollande a certainement bénéficié d'un surplus de popularité, suite à la sortie de route de DSK et parce que il a été le premier à se déclarer. Mais il faut bien faire remarquer qu'en terme de popularité, il y a toujours une prime au plus lisse (cf. Kouchner pendant très longtemps, Nicolas Hulot etc...) et partiellement au plus sympa. Sur ces critères, Hollande est effectivement le premier. Cependant, une fois acquise, cette avance s'auto-entretient : les indécis veulent tellement être sûr que Nicolas Sarkozy soit battu qu'ils se fient aux sondages et que, même, si ce n'est pas leur préféré, ils s'apprêtent à voter pour lui.
N'est-ce pas là, le degré zéro de la politique ? L'image avant les idées, les sondages avant les convictions intimes. Nous avons eu grâce aux débats des primaires, d'une grande qualité, l'occasion de nous faire une idée sur chacun des candidats, sur leurs propositions, leur personnalité et leur crédibilité supposée.
Le choix pour les primaires doit se faire en fonction des préférences de chacun à partir de ces éléments concrets et pas du gagnant tel que présenté par les sondages.
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