Jalousie des temps modernes
Le politicien ne comprendra finalement jamais le militaire. La faute à la fin de la conscription ? Pas sûr, le mal serait plus profond.
Christophe Castaner vient d'accuser ce jour le GA de Villiers d'avoir mis en scène sa démission. Alors que le militaire tirait sa révérence au sein de l'EMA mercredi, acclamé par ses troupes qu'il ne commandait plus, l'affaire prenait la lente direction de la discrétion, avec les quelques soubresauts décroissants qui sont liées aux affaires qui touchent à l'affect et où il peut exister - dûment ou non - un sentiment d'injustice. Mais il aura fallu que le porte parole du gouvernement se fende d'une attaque pour raviver la flamme. C'est que la jalousie est le pire des poisons.
Les voilà donc au gouvernement, à vouloir jeter l'opprobre à cet homme adulé par ses troupes, l'accusant de tous les mots, ajoutant la souillure tenace à la parjure. Parce qu'ils savent qu'ils n'auront jamais ces égards. Ils en meurent d'envie et la jalousie les étouffe ! Ils se travestissent en sous-marinier, en pilote, en tennisman paralympique, défilent sur des command-car militaires parce qu'ils pensent que l'image les liera aux communautés visées, alors que c'est tout l'inverse. Ils pensent que c'est le paquetage fait l'homme alors que c'est l'homme qui fait le paquetage comme la femme fait la robe. Ils ne savent pas qu'une recrue marche pour son képi ou sa tarte.
Ils ne comprennent pas non plus qu'il existe encore des institutions où la spontanéité l'emporte sur le calcul, où l'honneur a un sens, où la fidélité et la loyauté s'expriment par la clameur adressée à son chef qui, dans la pure tradition militaire, défendait ses hommes. Ils ne conceptualisent même pas qu'il existe encore un bastion en ce pays où lorsque la confiance en son supérieur est acquise, les syndicats n'ont pas leur place, où les intérêts particuliers s'effacent naturellement au profit de l'intérêt général. Ils prennent la servitude pour de la servilité, ignorant qu'un chef qui dit "en avant !" n'inspire ni la confiance ni la ferveur, contrairement à celui qui, tel Louis XII en Lombardie, clame "si tu as peur, mets toi derrière moi". Ils ne comprennent pas ce qui fut fait de bon cœur, ultime témoignage spontané à un homme rarement autant admiré à un tel poste. "Les hommes déprécient ce qu'ils ne peuvent comprendre", disait Goethe. Ainsi ils déprécient ce qui pourtant est l'expression des valeurs fondatrices de la nation : l'entraide, le respect, l'obéissance, l'opiniâtreté.
Bref, ils ne comprennent et ne comprendront jamais les Armées, cette nébuleuse si éloignée de la vie calculatrice d'un politicien qui se place sans égard pour l'intérêt général.
Qu'ils continuent à conduire leur stratégie, établir leurs budgets, donnent des discours, bref fassent de la politique. Mais qu'ils n'essaient ni de comprendre, ni même d'être des militaires. Ils en sont incapables.
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