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Accueil du site > Actualités > Politique > Jean-Marie Le Pen : extrême droite tenace et gauche débile...
#18 des Tendances

Jean-Marie Le Pen : extrême droite tenace et gauche débile...

« Au-delà des polémiques qui étaient son arme préférée et des affrontements nécessaires sur le fond, Jean-Marie Le Pen aura été une figure de la vie politique française. On savait, en le combattant, quel combattant il était. » (François Bayrou, le 7 janvier 2025 sur Twitter).

Quand la mort d'une personnalité publique devient-elle un événement à part entière ? Je parle bien sûr d'une mort non-violente puisque les morts violentes (attentats, meurtres, accidents, catastrophes, etc.) sont en elles-mêmes, par définition, des événements. Il y a bien sûr la mort de chefs d'État ou de gouvernement, ou spirituels, comme Georges Pompidou ou les papes (excepté Benoît XVI), dont le besoin de remplacement est un événement en lui-même. Mais au-delà de l'émotion, c'est très rare : la mort de Newton, la mort de Voltaire, la mort de Victor Hugo, la mort aussi de De Gaulle, peut-être oserais-je aussi citer Johnny Hallyday ? Peut-être aussi François Mitterrand et Jacques Chirac ? (Pas Valéry Giscard d'Estaing, parti discrètement). Même les grandes stars, les grands personnages de l'État, les grands écrivains disparaissent en général dans une extinction calme, discrète et simplement émue. Faut-il rajouter à cette courte liste le "Menhir", pas pour le chagrin légitime que sa mort a provoqué pour sa famille, politique et sa famille tout court, mais au contraire pour les cris de joie qu'on a entendus Place de la République à Paris durant la nuit ? Peut-on vraiment danser sur un cadavre encore chaud et se croire sincèrement humaniste ?

Le "rappel à Dieu" du vieux leader de l'extrême droite Jean-Marie Le Pen (dans une maison médicalisée à Garches) ce mardi 7 janvier 2025 a suscité beaucoup de réactions (et de non-réactions !). Celui qui a été élu député pour la première fois il y a soixante-neuf ans a en effet provoqué tout au long de sa vie passions, combats, polémiques et scandales et n'a laissé quasiment personne indifférent. La réaction très sobre du Premier Ministre François Bayrou était normale puisqu'au-delà du respect dû aux disparus, il doit aussi ménager Marine Le Pen à l'Assemblée Nationale et donc, évidemment, respecter son deuil.

 

Même sobriété pour le Président de la République Emmanuel Macron : « Figure historique de l'extrême droite, il a ainsi joué un rôle dans la vie publique de notre pays pendant près de soixante-dix ans, qui relève désormais du jugement de l'Histoire. Le Président de la République exprime ses condoléances à sa famille et ses proches. ».

Les deux têtes de l'Exécutif n'ont aucune raison de mettre dans l'huile dans des braises et provoquer une polémique supplémentaire sur Jean-Marie Le Pen alors que le gouvernement doit vivre son heure de vérité dans quelques jours. Pour les socialistes, leur réaction n'est pas sur l'événement lui-même mais sur la réaction du Premier Ministre. Quand est-ce que ces socialistes vont penser enfin par eux-mêmes ?

Même Jean-Luc Mélenchon a été assez sobre, faisant la part de l'homme qui est parti et de ses idées qu'il veut (et doit) combattre : « Le respect de la dignité des morts et du chagrin de leurs proches n'efface pas le droit de juger leurs actes. Ceux de Jean-Marie Le Pen restent insupportables. Le combat contre l'homme est fini. Celui contre la haine, le racisme, l'islamophobie et l'antisémitisme qu'il a répandus continue. ».
 

Mais alors, que s'est-il passé Place de la République ? Des centaines de personnes (ou des milliers ?) se sont réunies plus ou moins spontanément (merci les réseaux sociaux) pour "fêter" la mort de Jean-Marie Le Pen. Oui, Jean-Marie Le Pen a fait beaucoup de mal à son pays, mais seulement de façon tribunitienne, il a été un aiguillon malsain, mais il n'est pas un dictateur, ce n'est pas Kadhafi ni Ceausescu. On a dit qu'il avait torturé, peut-être, et si c'est le cas, c'est un scandale, mais je ne suis pas juge et cela n'a jamais été formellement établi et je suppose en plus que c'était avec la bénédiction du gouvernement socialiste de l'époque. Ces rassemblements (car il y en a aussi en province) ont été organisés par le NPA qui, insistons !, fait partie de la nouvelle farce populaire (NFP) et ont été approuvés par des responsables des insoumis (comme Mathilde Panot qui a pensé que c'était "normal").

Quelle honte que ces gens-là ! Qui sont-ils ? Apparemment, surtout des jeunes, donc pas les jeunes en masse qui ont voté Jacques Chirac en 2002 (ils ont maintenant vingt-trois ans de plus, au mieux des quadragénaires !). Des jeunes sans respect, sans repère, sans référence, qui pensent lutter contre l'extrême droite en l'aidant à se victimiser. Car c'est bien cela, la gauche la plus débile du monde, c'est de croire qu'on peut lutter contre la haine par la haine elle-même. Un discours, des actes complètement contre-productifs !
 

Le Ministre d'État, Ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau l'a bien compris d'ailleurs, en réagissant en début de soirée par ces mots forts : « Rien, absolument rien ne justifie qu'on danse sur un cadavre ». Fêter la mort d'un vieillard qui, depuis au moins 2015, n'a plus participé au débat national, quelle preuve de courage, quelle victoire ! Ont-ils compris que le danger, si danger il y a (ce que je crois), ne vient plus de Jean-Marie Le Pen, un presque centenaire qui ne pouvait plus se déplacer facilement et placé en maison médicalisée depuis plusieurs mois ? Pensent-ils que l'efficacité des comités "Ras le front" dans les années 1990-2000, c'était d'attendre tranquillement la mort naturelle du leader charismatique de tout ce qu'ils détestent ? Où est la victoire politique ? Quel aveu d'impuissance, surtout !

Il y a une violence effroyable à s'en prendre à un mort. Il n'y a que les terroristes du Hamas qui refusent de redonner les corps de leurs victimes à leur famille. C'est, avec la libération des otages, l'une des revendications de l'État d'Israël pour arrêter la guerre contre ce groupe terroriste à Gaza. Tous les modérés de droite, du centre et de gauche, sont ulcérés de voir ces agissements qui ne sont pas dignes d'un pays civilisé et cultivé, ou tout simplement, qui ne sont pas dignes d'être humain. Plus cette gauche débile montre son irrespect des valeurs fondamentales, plus elle place l'extrême droite dans la position de garante de ces valeurs fondamentales, ce qui me désole.

 

À l'annonce du décès, Marion Maréchal (la petite-fille), Marie-Caroline et Yann (les deux filles aînées), individuellement, se sont rendues auprès de leur grand-père et père à Garches dans un établissement protégé par la police. On imagine qu'il faudra mobiliser beaucoup de forces de police samedi 11 janvier 2025 pour l'enterrement à la Trinité-sur-mer et éviter tous les dérapages possible de la gauche débile sans valeurs.

Quant à Marine Le Pen, elle revenait de Mayotte et a appris la nouvelle à une escale à Nairobi. Malgré les désaccords stratégiques graves qu'elle a eus avec son père au point de le virer du parti qu'il a fondé (elle a tué, politiquement, le père pour de bon), mais après aussi une réconciliation il y a trois ans, on imagine la perte d'un père. Elle a juste tweeté le 8 janvier 2025 : « Un âge vénérable avait pris le guerrier mais nous avait rendu notre père. La mort est venue nous le reprendre. Beaucoup de gens qu'il aime l'attendent là-haut. Beaucoup de gens qui l'aiment le pleurent ici-bas. Bon vent, bonne mer Papa ! ». À votre avis, qui de la fille ou de ces militants irrespectueux de la Place de la République vont susciter de la sympathie aux Français ? La réponse est évidente.

Gauche débile, mais extrême droite tenace aussi. Le politiquement correct d'un RN aseptisé et délepénisé n'a pas tenu longtemps si l'on lit le tweet complet de Jordan Bardella : « Jean-Marie Le Pen est mort. Engagé sous l'uniforme de l'armée française en Indochine et en Algérie, tribun du peuple à l'Assemblée Nationale et au Parlement Européen, il a toujours servi la France, défendu son identité et sa souveraineté. Je pense aujourd'hui avec tristesse à sa famille, à ses proches, et bien sûr à Marine Le Pen dont le deuil doit être respecté. ». La filiation du FN/RN avec son fondateur est clairement assumée. Même idées, même programme, même si c'est emballé de manière plus subtile et trompeuse. Du home-staging en quelque sorte.

Les chaînes d'info continue avaient prévu de parler des dix ans des attentats de "Charlie Hebdo" et voici qu'en milieu de journée, la disparition de Jean-Marie Le Pen est arrivée, plongeant les rédactions dans la stupeur. Dans le meilleur rôle, CNews avait évidemment quelques longueurs d'avance dans ce rayon. Son invité du soir, Bruno Gollnisch, ancien numéro deux du FN et probable Premier Ministre en cas de victoire électorale en 2002, a assuré que Jean-Marie Le Pen voulait le pouvoir. Qu'il s'agissait d'une rumeur urbaine de croire qu'il a tout fait pour ne pas avoir le pouvoir. Il lui disait ainsi qu'on laissait croire qu'on lui avait proposé le pouvoir et qu'il l'avait refusé, mais ce n'était pas ça, il n'a simplement pas réussi à la conquérir. De plus, son désaccord avec sa fille était sur la méthode : il pensait que la "dédiabolisation" se ferait naturellement au fur et à mesure que l'audience électorale du parti d'extrême droite grandirait, sans changer ni édulcorer ses positions.

 

On disait bien avant la mort de Georges Marchais que son remplaçant dans le style "grande gueule politique" était Jean-Marie Le Pen. Depuis une dizaine d'années (au moins), on peut dire sans hésitation que le remplaçant de Jean-Marie Le Pen est Jean-Luc Mélenchon avec quatre signes qui ne trompent pas : dire n'importe quoi, avec un grand talent, avec beaucoup d'écho médiatique et susceptible d'influencer beaucoup de monde ! Quand au fond intellectuel, on pense bien sûr à Éric Zemmour, mais la personnalité sanguine n'a rien à voir avec cet éditocrate cérébral.

 

Si l'on prend l'homme qu'était Jean-Marie Le Pen, on pouvait sans doute s'agacer des propos volontiers sexistes, machistes qu'il tenait en privé, mais il avait aussi beaucoup d'humour, riait voire chantait (comme un légionnaire), il était bon vivant, a su entraîner beaucoup d'adhésion, d'espérance (lui-même parlait pour sa propre mort d'un « espoir d'espérance »). Une petite preuve de son humour avec cette émission en direct du fameux "Tribunal des flagrant délire" avec Claude Villers pour juge, Pierre Desproges pour procureur et Luis Rego pour avocat du prévenu... Jean-Marie Le Pen lors de l'audience du 28 septembre 1982 (l'une des rares émissions filmées) à une époque où il n'était pas encore un danger (mais avait déjà largement exprimé ses positions d'extrême droite : ses interlocuteurs rieurs ne pouvaient pas être taxés d'amis politiques).

Au fond, quand on parle de "grande gueule politique", d'influencer, de dire n'importe quoi, de provoquer, cela ne vous rappelle-t-il pas quelqu'un ? Bien sûr, Donald Trump, qui se réinstallera à la Maison-Blanche dans moins de deux semaines, qui fait partie de ce même bois, insubmersible (et peut-être aussi durable).

Indépendamment de la personnalité politique qui pouvait manier la mauvaise foi et l'insulte, Jean-Marie Le Pen, par sa bonne connaissance de la vie politique française, était capable d'excellentes analyses politiques avec des perspectives historiques, comme c'est souvent le cas pour des militants d'extrême droite (je pense à Patrick Buisson).

Alors non ! Il ne faut pas danser sur un cadavre chaud, d'autant plus qu'il n'était plus depuis longtemps une menace pour la France. Mais ses idées sont toujours là, ont fleuri, se sont consolidées. Le meilleur moyen de les combattre, c'est d'abord de respecter le deuil des proches, c'est la moindre des choses, et ensuite de rappeler ce qu'est être français par Manuel Valls le 9 janvier 2016 : « Être français, ce n’est pas renoncer à ses origines, ce n’est pas renoncer à son identité, c’est les verser au pot commun. C’est une citoyenneté qui n’est pas petite, qui n’est pas réduite à l’origine de chacun, du sang, du sol ou par naturalisation, mais qui est grande, ouverte, fondée sur la volonté de construire l’avenir ensemble ! C’est ce nouveau patriotisme que j’appelle de mes vœux ! » (au fait, ne vous ai-je pas dit que je ne me lasserais jamais de citer ces paroles ?).


Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (08 janvier 2025)
http://www.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :
Jean-Marie Le Pen : extrême droite tenace et gauche débile...
Mort de Jean-Marie Le Pen : la part de l'héritage.
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7 réactions à cet article    


  • Boaz Boaz 9 janvier 11:34

    gauche débile, c’est un pléonasme


    • Gégène Gégène 9 janvier 12:02

      Ce décès, à moi, Gégène, m’a fait perdre tout mon jus . . .

      Si, si !


      • juluch juluch 9 janvier 12:04

        Un grand patriote, un guerrier, un homme de conviction et qui ne renonçait jamais...

        Que la terre lui soit légère à l ’Ancien.

        merci pour cet article.


        • leypanou 9 janvier 12:32

          Est-ce la gauche débile est-elle plus coupable que la non-gauche sensée qui a forcé des millions de Français à se faire injecter un produit génique sinon pas de travail pendant 18 mois au moins et qui a entraîné la mort d’entre autres le jeune étudiant en médecine de 26 ans Anthony Rio et de Sofia Benharira de 16 ans ?


          • leypanou 9 janvier 12:34

            @leypanou
            c’est aussi la non-gauche sensée qui a entraîné la radiation à vie du médecin urgentiste Denis Agret et pas parce qu’il a mal soigné.


          • ETTORE ETTORE 9 janvier 12:51

            Comment voulez vous qu’ un peuple de décervelé, miné par les frasques de ses dirigeants, qui les appelle les , « sans dents » leur gueule dessus par « je veux vous emmerder », et j’en passe, et des plus belles.....Soit « éduquée » en réflexion ?

            Si la Régence Hautaine se permet de telles ignominies, pourquoi voulez vous que les « plus perméables du mou » acquise à une illusoire copie de liberté « égalitaire au pouvoir » ne franchisse pas le pas, de cette « camé-léonisation » en irrespect, du genre humain, mort ou vivant ?

            Puis tant qu’on offre un exutoire à ces bas du front, on diminue la pression, sur des sujets, qui sont bien plus compliqués à faire disparaitre, même si la volonté était là.

            Alors imaginez avec l’impuissance, comme seul avoir .


            • Seth 9 janvier 14:49

              Quand M. tout le monde se fait fort de donner des leçons de politique, ça donne ça.

              C’est misérable, on était déjà maintes fois tombé bien bas mais là on creuse.

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