L’agitation à l’UMP masque-t-elle une réorganisation plus large de la classe politique française ?
Depuis quelques semaines, les tergiversations des ténors de l'UMP à avaliser l'élection de leur roitelet trônent dans les Unes. Ce ramdam' politique actuel marque-t-il seulement ce parti ou un changement plus large de l'éventail partisan français ?
Un petit tour d'horizon à la chaleur hivernal du radiateur semble impondérable pour donner sinon une interprétation de cette danse de saint-Guy, au moins quelques coups de bottins.
Un bref retour sur la victoire électorale du candidat Hollande et de son parti aux Législatives n'est-il pas l'une clé pour comprendre les rapports de force ?
Deux camps se font face au second tour.
Entrent les candidats et leur show ; la mise en scène de leur personnalité de par leur usage des médias : la propagande. Deux camps parodient l'affrontement ; fruits de coalitions et d'alliances bancales et passagères, appuyés sur une base de convertis de longue date, les militants et sympathisants. Ils peuvent compter également sur le « vote réflexe ». La culture électorale française repose sur un principe identitaire simple au second tour : si je suis « de gauche », je vote PS ; si je suis « de droite », je vote UMP. La partie gauche de l'électorat semble tant remontée contre l'ancien président, que le candidat PS n'a pas réellement besoin de les contenter autrement que par sa présence au second tour.
Chacun son réservoir de votes assuré. Les indécis représentent le principal enjeu de la conquête présidentielle. C'est au centre droit et sur une partie de la droite que se joue la victoire et le candidat doit rassurer.
Le président, à l'image du monde des affaires des années 80 ; Reagan, fric et rolex, dont l'agitation détient ses aficionados. Seul rempart de la conquête du pouvoir de la gauche au niveau national (déjà à la tête des métropoles, des départements, des régions). Ces élections prennent un caractère urticant, l'ancien président semble tout autant vecteur d'allergies, jusque dans son « propre » camp. Le style Sarkozy est le véritable marqueur de l'élection : pour ou contre ce chantre du « karcher ».
Ce « bon » monsieur Hollande n'est-il pas parfait pour satisfaire cette coalition ? Un candidat rond, ni trop tannique ni trop ensoleillé, sans trop de caractère, mais qui accompagné d'un fromage bien fait... Nous sommes entre libéraux, il est juste question d'alternance.
L'abstention fait le « coup de poing » puis disparaît
La défection de nombreux électeurs potentiels du suffrage universel est manifeste de cet écart entre la grande messe des « légitimistes » et l'éloignement ou l'écœurement des abstentionnistes. Si cette période représente un moment électrique, une tension vécue nationalement, orchestrée par les médias classiques et le vedettariat politique, tous n'y répondent pas avec le même entrain.
Pour certains avertis cette abstention s'appuie sur l'idée que le choix entre deux personnalités, apparatchiks conventionnels issues du bipartisme dominant la vie politique, de tendance néo-libérale agrémentée du keynésianisme « à la française » est une hypocrisie (cocktail dont seules les proportions varies mais dont les ingrédients sont les mêmes). Mais cette exclusion du jeu électoral n'est-elle pas davantage l'une des tristes conséquences de la misère économique, sociale et culturelle d'une partie des citoyen(ne)s, soit pour qui le vote n'a plus aucun sens, persuadé(e)s qu'il ne changera rien à leur situation, soit qu'ils n'en comprennent les règles sous-jacentes ?
Les abstentionnistes et les « blancs » sont une minorité qui représentent presque un tiers de l'électorat en moyenne sur les deux élections, désunis dans leur stratégies de refus, ils sont trop volontairement oubliés, ils demeurent une puissance symbolique forte dans l'ombre de notre démocratie.
La courte victoire
Le suspense paraît intense... roulements de tambours. Hollande ne sort du chapeau que de quelques centaines de milliers de voix. C'est juste mais suffisant pour tourner la page du courtois « casse-toi pauv' con ! ». L'Assemblée se remplit en proportion aux couleurs habituelles. La démocratie de scrutin majoritaire ne connait pas les bienfaits de la collégialité et une fois la victoire arrivée, le vainqueur se taille la part du lion. Mise au pas des alliés. Ultime signe d'une victoire totale, fait historique in-envisageable depuis la IIIème République, le Sénat passe à gauche.
Ces résultats provoquent un changement de majorité et de gouvernement. L'installation au pouvoir ramène un certain calme. Les Français(e)s attendent de voir et c'est l'été. La vie politique française connait alors une réorganisation des charges civiques et du placement des effectifs. Plus d'ambitions que de postes engendrent des tensions internes à chaque groupe. Mais quand certains se découvrent dans l'euphorie de la victoire, d'autres s'éveillent dans le trouble de la défaite.
Hollande, maitre du jeu ?
Le PS profite de son installation au pouvoir pour réaffirmer son pouvoir sur l'ensemble de la gauche française. Le nouveau gouvernement satisfait les ambitions de ses « barons » comme celles de ses alliés. Le PS se trouve un nouveau premier secrétaire. Nommé mais élu ou élu mais nommé ; Désir rassembleur, sans volupté ni grandes velléités.
Changement de style mais pas de forme. Un soupçon de régulation sociale est instillé dans des mesures fiscales. Des droits égalitaires dits de société lui donnent son capital symbolique. La politique d'austérité continue son chemin. Le traité européen dit Merkel-Sarkozy est ratifié ; le rapport Gallois, qui devrait contenter jusqu'à la droite, devient l'itinéraire économique gouvernemental.
L'effet boomerang de la présidence « normale » voire « potiche » se fait rapidement sentir, elle devient l'objet de vifs sarcasmes. Les opposants reprennent voix. Les mécontents restent mécontents. Une grande partie des attentistes le deviennent. Les sondages tombent comme oiseaux de mauvais augures, mais qu'ont-ils de surprenant ? Le vote contre l'ancien président se paie. Une meilleure image que Sarkozy ne veut pas dire une bonne image, et l'intention put-elle être bienveillante n'était pas innocente. Ce n'est pas tant qu'Hollande déçoive, plutôt qu'il ne surprenne pas ! Pour un grand nombre la crise perdure, le chômage enfle, les prix de l'énergie grimpent. Et le nouvel e-phone est à 480E...
Le bourbier de Notre Dame des Landes marque un clivage à gauche
Le conflit de Notre Dame des Landes marque l'affrontement entre deux idéologies du camp de la gauche. Une gauche orthodoxe, congelée à l'époque de Roosevelt et de ses grands travaux d'infrastructure menés par le brain-trust originel ; en face, une gauche hétérodoxe, prenant en cause l'écologie, se tournant vers une réflexion sur les modalités de la course à la croissance économique.
L'imagination n'est toujours pas au pouvoir dirait plus d'un 68ard(e)s. La violence légale est du côté de la gauche « d'Ancien Régime » qui l'applique comme se traite « un kyste » dans la médecine occidentale. La fermeté du gouvernement à cet égard n'est pas qu'idéologique et ne peut non plus cacher l'influence des lobbys de la construction (Bouygues, Lafarge ?) qui sont sous-jacents à un tel projet et sa logique du « pots de vin » sous-tendue. Les zones d'ombres des politiques d'aménagements et de grands travaux sont telles qu'elles ont toujours permis un enrichissement secret de quelques intermédiaires, au nom du bien commun s'entend. L'appel d'offre a souvent bon dos quand l'escroquerie est certes manifeste mais bien cachée à l'opinion. Les secrets d'officines ont la peau dure
La gauche rouge et la gauche verte se réveillent... du pied gauche.
La droite aigrie et divisée ouvre les yeux sur un tas de cendres
Deux tendances s'accrochent pour la présidence du grand parti de la droite française. Encore une fois plus proche du contenant que du contenu. L'idéologie économique est ultra-libérale : moins d'État, plus de marché. Mais les questions de société partagent. Un style mesuré et sobre s'oppose à un autre dit de « droite sans-complexe », fricotant avec le populisme nationaliste.
Les premiers seraient plus des « libéraux » quand les derniers seraient plus des « conservateurs » , s'arc-boutant sur des valeurs nationalistes (et son fond raciste), catholiques, homophobes... la libération des mœurs normalement opérée dans les années 70 n'a pas eu lieu. La droite Friedman contre la droite « hibernatus ».
La fracture est grande, la coalition passée vole en éclat. Les alliances se font plus facilement avec les lauriers de la victoire que dans les fouilles d'un champ de ruines. Ces deux positions ont pris corps au travers de messieurs Fillon et Copé. Ils se battent aujourd'hui pour l'héritage de l'UMP. Une frange s'exclura d'elle-même lors des résultats définitifs. Si la droite sans complexe sort victorieuse, des fillonistes rejoindront le parti de Borloo ; si c'est les libéraux, une transfusion vers le FN se ferait au grand jour. Scénario impossible. Copé ne peut perdre. La droite sera plus encore à droite.
La réapparition d'un centre-droit ; tout le monde n'est-il pas au centre-droit ?
Borloo et l'UDI... Avait-il le choix ? Bayrou s'est déjà cassé les dents sur l'idée de créer un centre et ce malgré un élan de sympathie catharsique. La place est libre. Il faut voir avec les suites de la bataille de l'UMP. Futur parti de coalition ? Droite masquée ne supportant pas les lourdeurs de l'appareil mafieux que pourrait-être l'UMP ? Mais d'avenir novateur, peu de cas.
Le mouvement perpétuel de l'hémicycle français se manifeste : une poussée permanente vers la droite. Tout parti est repoussé sur sa droite avec le temps ; il arrive sur le champ politique avec des idées neuves, mais ces idées perdent de leur modernité et deviennent conservatrices. Il est alors repoussé vers sa droite par des idées innovantes (ou « révolutionnaires », « radicales » etc...) défendus par des nouveaux venus (ELV, FDG,NPA). Le gaullisme originel était bien plus interventionniste que le gouvernement socialiste actuel. La SFIO était bien plus à gauche que le PS.
Les évènements actuels de luttes de tendances au sein des partis n'est que le signe d'un mouvement plus large lié à la classe politique, des manifestations classiques d'une république fatiguée. Dans la défaite, les membres UMP se cherche une ligne directrice et se compte. Une chaise musicale. Un changement de placement et de situation. Le PS, tout autant. Pas de baguette magique, étriqué dans son nouvel habit de lumière enduit d'une épaisse couche de goudron. Tous marchent sur des œufs avec des sabots.
PS, UDI, UMP ont sensiblement les mêmes recettes : austérité, soucis de croissance classique sans trop toucher à la redistribution. La vision politique est libérale, la norme d'un ordre actuel établi, véhiculée par l'orthodoxie économique du FMI. Ils n'ont pas les mêmes mise en œuvre. Le PS apparaît, aujourd'hui, comme le metteur en scène français de ces idées libérales de gestion de crise, avec douceur et considération. Et puis les autres reviendront...
un échec collectif ?
Fouetter nos dirigeants ? Ne seraient-ils pas un miroir du corps électoral ? C'est pathétique, mais ils semblent à l'écoute de leurs électeurs-électrices qui ne souhaitent en aucun cas un changement de leur mode de vie. Ils ne sont pas prêts à entendre que de grands changements devraient se faire dans les politiques énergétiques, environnementales (et agricoles) et de cohésion sociale... La désinformation est forte, tout autant l'égoïsme individuel et l'aveuglement contemporain. Le confort, la consommation, l'avoir plus que l'être et surtout ne rien changer mais que tout s'améliore... pourtant le sentiment de déclassement est palpable. Et autour de nous les individus semblent s'agiter en faisant du surplace. Englués dans un miel de synthèse.
L'économie était en excédent depuis des décennies, pourtant la répartition des richesses s'est déséquilibrée au fil du temps. Les pays émergents se dressent sur leurs immensités et leurs inégalités. Ce n'est pas qu'ils piquent dans le frigo, au contraire le gâteau s'agrandit, mais l'appétit de tous aussi. Les dindons restent les mêmes. Les puissants de partout s'arrosent de champagne quand les peuples se partagent les bulles. La société de type inégalitaire des pays émergents deviendra-t-elle le nouveau standard de vie : « bresilian way of life » ou « chinese way of life » ?
Les désordres environnementaux associés à la réduction des énergies fossiles imposent une prise de conscience réelle. La politique de l'autruche ou l'affrontement ? L'avenir appartient-il aux « décroissants » ? Les moyens de mettre en œuvre : la réduction de notre consommation énergétique la diversité de ses sources de production, la réduction de l'influence pétrochimique (productions agricoles et alimentaires comme de biens de consommation courants) ne manquent pas de courage et relèvent d'une inventivité et d'un esprit d'adaptation créative à accompagner pour préparer le rendez-vous...
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