L’Amérique est-elle prête pour une troisième voie ?
Appelez-les "independants, undecided ou swing voters", les américains sont de plus en plus nombreux à ne plus voter simplement pour une étiquette, mais rechercher qui, parmi les candidats, pourrait faire une différence dans leur quotidien.
Source : lockergnome.com |
Je suis démocrate, au sens politique du terme. Je soutiens Barack Obama depuis le début (François Bayrou en France mais fallait-il que je le rappelle ?) et crois fondamentalement en sa vision d'une société équilibrée, responsable, solidaire et progressiste. Mais je suis aussi démocrate, un défenseur de la démocratie, et crois donc que le pluralisme en est un élément essentiel.
Les quatre dernières années aux Etats-Unis ont été une démonstration particulièrement flagrante de la niaiserie du bipartisme. Il a été très largement admis, et je partirai de cette remarque comme d'un postulat, que l'attitude sectaire et odieusement partisane des Républicains vis-à-vis du Président et du gouvernement durant ce premier mandat a mis le pays en péril, et porté atteinte à la démocratie. La première conséquence très remarquée a été la perte du triple A pour les Etats-Unis, non pas à cause de leurs difficultés économiques, dont tout le monde pensait qu'ils allaient se relever, mais pour l'incapacité du parlement à prendre des décisions.
Dans le processus électoral, on s'aperçoit bien du dictât du partisanisme et du besoin de renouveau. En commençant avec les primaires internes aux partis, les candidats se vendent à leur base, c'est à dire la faction la plus extrême de chaque parti sans laquelle ils ne pourraient pas obtenir la nomination. Puis, comme par magie, ils reviennent à des sentiments plus modères et équilibrés, adoptant une rhétorique plus ouverte, se faisant chantres du bi-partisanisme, et promettant une collaboration sans précédent avec le parti adverse. On y retrouve un gout de premier vs. deuxième tour des présidentielles françaises.
Aujourd'hui, nous entendons des gens qui se demandent pourquoi ils devraient accorder leur confiance à un Mitt Romney qui n'a été capable de démontrer qu’une seule remarquable marque de constance : celle de dire sans cesse une chose et son contraire. Mitt Romney est une véritable savonnette, Tea Party un jour (disons Droite Populaire), centriste le lendemain. C'est un caméléon qui s'adapte à son auditoire et au moment du cycle électoral. La transformation est classique tant elle est vraie pour la plupart des candidats, mais Mitt Romney semble en avoir fait un principe comportemental sur l'ensemble de sa carrière politique.
En ce qui concerne Barack Obama, certains américains se demandent comment il va s'y prendre pour faire avancer les réformes alors que l'antipathie des Républicains pour sa personne a généré une vague de paralysie sans précédent et une guerre des tranchées ridicule et néfaste. D'autres ont aussi le sentiment que la situation du pays ne s'est pas suffisamment améliorée, le tout étant sans doute lié.
Alors, que me diriez vous si je vous informais que certaines statistiques montrent aujourd'hui que les dits "independants" sont la voie majoritaire aux Etats-Unis ? L'institut de sondage Gallup a conduit plus de 20,000 entretiens au cours de 20 sondages différents durant l'année 2011, et une compilation de ces résultats a conclu que 40% des américains se reconnaissaient comme indépendants.

Bien que ce chiffre ait toujours tendance à augmenter avant une élection présidentielle, il a cette fois atteint un record historique avec une augmentation progressive ces quatre dernières années. Le même sondage montre que 31% des personnes interrogées s'identifient comme Démocrates, et 27% Républicains. On est loin de l'Amérique de Bush et l'on voit bien que le peuple américain est bien plus modéré que certains, notamment en France, voudraient le croire ou le faire croire.
Qu'est ce qui empêche les américains de se mobiliser pour l'émergence d'une troisième voie ? La difficulté, l'énormité de la tache, les puissants intérêts qui sont en jeu, l'argent... Personne ne se prend même à essayer.
Pourtant, on voit bien que les enjeux sont importants. Il s'agit bien évidemment de la parole du peuple, la représentativité de ceux qui nous gouvernent, et en fin de compte, l'élément fondateur de la relation entre gouvernants et gouvernés : la légitimité.
Nous le voyons bien en France. Un Président vient d'être élu avec pour motivation principale d'en faire sortir un autre. Dans un billet que j'avais publié l'année dernière, en m'inspirant du système américain, je m'étais permis d'écrire : "La France ne pourra pas, et ne devrait pas, se contenter d’un président par défaut…"
Avec Barack Obama, les Etats-Unis ont la chance d'avoir vu naître un leader hors du commun. "A once in a lifetime leader" comme disent les américains. Son programme porte un progrès social inédit tout en soutenant l'innovation, l'entreprenariat et les entreprises d'une manière générale. En quatre ans, la situation est passée d'une augmentation mensuelle du chômage à la création de plus de 5 millions d'emplois dans le privé.
Pour moi, la question ne se pose donc pas pour cette élection. Mais en dehors du cycle électoral, dans le débat de fond, j'espère qu'une troisième voie finira pas émerger aux Etats-Unis. Plusieurs groupes sont au travail, mais ne semblent pas avoir réussi à saisir une opportunité. Quelles que soient leurs idées, peut-être que je resterai avec les Démocrates par exemple, l’impact sur la balance des forces ne pourra être que positif. L’important est donc que cette troisième voie puisse clairement se distinguer des deux autres, sur le fond.
Le centre n'est qu'une position relative sur l’échiquier politique d'un pays, pas une idéologie.
Pour la France l'opportunité est maintenant, entre deux présidentielles.
D’après un récent sondage Ifop, 13% des français se situent au centre et 28% "ni à droite, ni à gauche". Sachant que ce même sondage donne le choix gauche, droite et extrêmes, on voit bien le souhait de 41% de citoyens de dépasser le clivage bipartite avec un tiers de ce groupe qui fait le choix volontaire du centre - parce qu'il existe en France.
A l'heure où certains se résignent et choisissent l'allégeance à un de deux camps, le MoDem continue à résister, et à le faire de manière plus organisée et donc plus efficace.
La nouvelle équipe en place autour de Marc Fesneau et Christine Espert, a déjà commencé le travail d’évolution si nécessaire suite à nos échecs électoraux.
Nous sommes nombreux à être activement mobilisés autour d'eux pour créer cette troisième voie non pas de l'alternance, mais de l'alternative... indépendante.

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