L’Assemblée nationale et le Sénat : institutions à réformer ?
A quoi devraient servir l’Assemblée nationale et le Sénat ? A représenter les Français dans leur diversité et à assurer un gouvernement stable. On voit tout de suite que ces règles semblent contradictoires. Ainsi en France, la règle veut que seuls les candidats ayant récolté plus de 12,5% des inscrits au premier tour peuvent être présents au second tour (sauf si aucun candidat ou un seul ont obtenu ce seui ; dans ce cas, les deux candidats arrivés en tête sont présents au second tour) ; on voit tout de suite ses effets néfastes : d’abord, l’UMP et le PS se partagent la quasi-totalité des sièges (avec quelques miettes pour l’UDF et le PCF), mais rien (ou quasiment) pour des partis comme FN, LO, LCR, PT (0 députés), MPF (2 députés), Verts, MRC (une poignée) ; ensuite, une multiplication des triangulaires, qui peuvent faire élire des députés de gauche dans une circonscription en majorité de droite. L’Assemblée ne représente pas les Français : ainsi, les députés ont voté à plus de 90% le TCE, quand les Français ont dit non à environ 55%. En contrepartie, le gouvernement est extrêmement stable.
Le Sénat, lui, souffre de plusieurs problèmes : d’abord, il ne sert pas à grand-chose, puisque l’Assemblée nationale a le dernier mot en cas de désaccord, et on ne peut pas dire qu’il ait contribué à améliorer des textes de lois ; c’est plutôt une assemblée qui permet de retarder les choses, quand elle est en majorité à droite et que le gouvernement est à gauche. Ensuite, son mode d’élection est indirect, ce qui fait que le Sénat paraît extrêmement éloigné de la population.
Comment faire pour remédier à ces problèmes et en particulier assurer une représentativité suffisante de la population ? L’Italie et Israël ont décidé de faire élire leur chambre à la proportionnelle intégrale sans seuil, ou avec un seuil extrêmement bas (1,5% pour Israël). Ainsi, tous les partis sont représentés correctement, mais le gouvernement est très instable, peut être renversé du jour au lendemain et devient l’otage de petits partis politiques, parfois catégoriels (partis religieux en Israël, partis régionalistes tels la Ligue du Nord) qui ne cessent d’exiger toujours plus, tout en agitant la menace de ne plus soutenir le gouvernement si on n’accède pas immédiatement à leurs revendications, et donc de le faire effondrer. Les gouvernements, sachant que leur durée de vie sera courte, n’agissent plus sur le long terme, se contentent d’une politique au jour le jour, qui se transforme en exécution des demandes des partenaires gouvernementaux, parfois contradictoires (ainsi, Sharon avait tenté une fois de s’appuyer en même temps sur des partis religieux et sur un parti laïc : sa coalition s’est très rapidement effondrée). Ou alors, en cas d’union d’un grand parti de droite et d’un grand parti de gauche, c’est l’immobilisme qui triomphe ; aucune réforme n’est faite, dans un sens ou dans l’autre, afin que les deux partenaires soient satisfaits.
La solution brandie par certains serait une part de proportionnelle, une part de majoritaire. C’est séduisant, mais en fait ne règle pas les problèmes. Prenez ainsi l’Allemagne, qui applique ce système : en 1969, la CDU obtint 46,1% des voix et le SPD, 42,7%. Pourtant, ce fut Willy Brandt, dirigeant du SPD, qui prit le pouvoir car le FDP (parti libéral allemand) décida de soutenir Willy Brandt. En 1982, changement de camp, le FDP décida de soutenir la CDU. Ainsi, un parti qui représentait moins de 6% des électeurs décida de l’orientation politique de l’Allemagne. Peut-on réellement prétendre que ce fut le peuple souverain qui décida ?
Comment faire pour résoudre le dilemme ? A mon sens, le problème vient du fait que c’est la chambre élue à la proportionnelle qui élit le gouvernement. En effet, c’est uniquement ce point clé qui peut créer le problème. Prenons une chambre élue à la proportionnelle : à propos d’une loi quelconque, les gens sont pour ou sont contre, et votent comme ils le sentent. Le problème vient uniquement du fait de la désignation d’un gouvernement. Revenons à la France : nous avons deux chambres, l’une élue à la majoritaire, donc avec une majorité stable, mais qui n’assure pas la représentativité des Français, et une autre qui ne sert à rien. Dans ce cas-là, pourquoi ne pas modifier le fonctionnement des chambres comme suit : l’Assemblée nationale, élue à la majoritaire, avec seulement les deux candidats arrivés en tête au premier tour qui parviennent au second (c’est-à-dire la fin des triangulaires), qui déciderait du gouvernement et voterait les lois en premier instance, et un Sénat, profondément rénové, élu à l’échelle du pays à la proportionnelle intégrale, qui voterait les lois en deuxième instance, une loi ne rentrant en vigueur que si elle est élue par les deux chambres ?
Nous aurions un gouvernement stable, car élu à la majoritaire, une véritable représentativité des Français, par le biais du Sénat, pas d’immobilisme, et on peut supposer que les deux chambres auront la même tendance majoritaire (droite au Sénat et UMP à l’Asemblée ou gauche au Sénat et PS PCF et apparentés à l’Assemblée).
Certains pourraient craindre la présence des extrêmes, de gauche ou de droite. D’abord, ils n’occuperaient qu’une faible partie des sièges, ensuite, confrontés à la vie parlementaire, leurs scores pourraient bien rapidement s’effondrer (qu’on se souvienne du FPO, dont les scores électoraux ont chuté et qui s’est ensuite scindé).
Il ne reste plus qu’à décider du taux pour le Sénat, le taux ne devant être pas trop haut (afin d’avoir une vraie représentativité) et pas trop bas, afin d’éliminer les listes folkloriques ou purement catégorielles qui ne servent pas à grand chose : 3% me paraît être un bon compromis.
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