L’avenir électrique français se joue-t-il en Isère ?
Alors que certains ministres et groupes politiques bénéficient d’une exposition médiatique de tous les instants, des personnalités politiques moins connues mais aux compétences techniques plus assurées pourraient marquer la politique énergétique du nouveau quinquennat.
Ainsi, en matière d’électricité, des responsables socialistes de Grenoble ayant accédé à des postes nationaux pourraient, forts de leurs expériences locales, préfigurer ce qui attend la France toute entière d’ici quelques années.
Grenoble, la nouvelle ville lumière ?
Depuis que Louis Néel, prix Nobel de physique et père de la filière nucléaire française, a posé ses bagages à Grenoble, l’histoire de la ville est indissociable des enjeux électriques de la France. La préfecture de l’Isère a effectivement développé au cours des décennies un écosystème très high-tech en matière d’énergie. Depuis le centre de R&D « smart grids » de Schneider Electric, auquel François Hollande a fait l’honneur d’un déplacement de campagne, jusqu’aux différents laboratoires du CEA orientés énergies renouvelables, la ville est fort bien pourvue. D’autant que Grenoble sert de terrain d’expérimentation grandeur nature, entre autres, au projet Greenlys.
En parallèle, un pool de connaissances et de compétences s’est créé dans d’autres domaines technologiques : nanotechnologie, numérique, biotechnologie….
Moteur économique du département, le secteur de l’énergie intéresse naturellement les élus locaux. Il n’est donc pas surprenant que l’Isère rassemble plusieurs des personnalités politiques les plus en pointe sur ce sujet. Parmi eux, Geneviève Fioraso, Michel Destot et François Brottes, tous députés socialistes de l’Isère, font désormais partie des nouvelles éminences grises de la politique énergétique nationale.
Geneviève Fioraso, une ministre entourée de professionnels du secteur
Nommée à la surprise générale ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, Geneviève Fioraso défend depuis plusieurs années une approche de l’énergie tenant compte des réalités industrielles et techniques. A ce titre, CV et carnet d’adresse de Geneviève Fioraso en disent long sur sa connaissance du secteur des nouvelles technologies, compagne de Stéphane Siebert, n°2 du CEA de Grenoble, amie de Jean Therme le n°1 de la même organisation. Dans ses anciennes fonctions d’adjointe municipale en charge de l’économie, elle rencontre Claude Ricaud, directeur de l’innovation chez Schneider Electric, ou Franck Chevalley, directeur d’Atos Worldgrid.
Michel Destot, l’ingénieur nucléaire reconverti dans la politique
Le député-maire de Grenoble entretient des relations proches avec la nouvelle ministre qu’il connaît depuis 20 ans et dont les carrières professionnelles et politiques s’entremêlent. Officiellement en charge des relations avec les élus pendant la campagne présidentielle, il était surtout l’un des principaux intermédiaires de François Hollande auprès des grands patrons français (Proglio, Mestrallet, Kron, Parisot etc). La rumeur voudrait d’ailleurs qu’à défaut d’avoir obtenu un maroquin dans le premier gouvernement Ayrault, Michel Destot pourrait se consoler en obtenant la direction d’une « grande entreprise nationale dans l’énergie ». En attendant, il est secrétaire national du PS à l’industrie et aux entreprises.
François Brottes, l’homme de la synthèse énergétique
La grande force de François Brottes est avant tout de parfaitement connaître les dossiers de l’énergie. Le député sait lui aussi s’entourer, notamment en travaillant pendant la campagne présidentielle avec Bruno Lechevin membre de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) et délégué général du médiateur à l’énergie.
En tant que président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée, il va cependant avoir fort à faire avec le nouveau partenaire écologiste. Même si il a déjà participé à atténuer la portée de l’accord conclu entre PS et EELV, rééchelonnant le passage de la part du nucléaire de 75 à 50% à « l’horizon 2025 » dans le mix énergétique tout en défendant « une filière nucléaire forte », les élus écologistes promettent de lui donner de nouveau du fil à retordre. Denis Baupin, député écologiste et vice-président de l’Hémicycle annonçait déjà il y a quelques semaines : « C’est sur le nucléaire qu’il y aura le plus de baston avec les socialistes ».
On peut néanmoins faire confiance à François Brottes pour assurer les équilibres politiques puisque c’est un travail qu’il a déjà mené dans les rouages internes du PS. Capable d’élaborer une ligne directrice commune sur l’énergie entre Aurélie Filippetti (ancienne verte) et Géraud Guibert (porte-parole de Montebourg pendant les primaires socialistes), à l’occasion de la convention nationale du PS d’avril 2010.
Engrangée sur le terrain, l’expérience des élus de l’Isère pourrait constituer un fil conducteur intéressant de la future politique énergétique de la nouvelle majorité. Soucieuses de concilier impératifs techniques, économiques et politiques, les propositions de ces personnalités socialistes seront à suivre avec attention dans les prochains mois.
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