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L’incertitude de Matignon (2)

L’attention du microcosme politique est actuellement focalisée sur le nom du futur locataire de Matignon. Beaucoup de noms circulent, un seul sera désigné. Seconde partie.

Dans l’article précédent, j’avais énuméré les atouts et les handicaps pour le maintien de François Fillon dans ses fonctions de Premier Ministre.

Malgré la "raison" qui laisserait entendre que l’intérêt du Président Nicolas Sarkozy serait de ne pas changer le locataire de Matignon, il semblerait que de nombreuses personnalités seraient prêtes à assurer la succession.


Jean-Louis Borloo (59 ans)

Plus. C’est le favori des rumeurs. Depuis la rentrée parlementaire, Jean-Louis Borloo se met en situation. Il s’est fait ovationner par les parlementaires UMP aux journées parlementaires de Biarritz et il cherche à avoir une vision globale de la politique. Travailleur, il comprend mieux que d’autres que la concurrence chinoise n’est pas seulement sur les coûts salariaux mais également sur la haute technologie et il prône une révolution fiscale : il s’agit de ne plus taxer le travail ni les outils de production mais d’imposer les flux financiers. Jean-Louis Borloo jouit par ailleurs d’une très bonne image auprès de l’opinion publique, un élément qui compte pour un Président très impopulaire, et il est connu pour s’intéresser à l’écologie, thème très à la mode actuellement (il a été parmi les fondateurs de Génération Écologie en 1991). Autre avantage pour Nicolas Sarkozy : séduire l’électorat de centre droit et torpiller la candidature d’Hervé Morin (et de François Bayrou).

Moins. Jean-Louis Borloo est souvent considéré comme "incontrôlable". Il a notamment fait perdre, selon certains parlementaires UMP, plusieurs circonscriptions entre les deux tours des législatives de juin 2007 en envisageant publiquement l’instauration d’une TVA sociale. Même s’il est atypique dans la classe politique, Jean-Louis Borloo peut difficilement représenter le renouveau alors qu’il est ministre sans discontinuité depuis le début du second mandat de Jacques Chirac.

Parmi ses petites phrases, une succulente qui pourrait lui revenir en boomerang et qui lui a déjà valu le prix de l’humour politique en 2008 : « Sarkozy, c’est le seul qui a été obligé de passer par l’Élysée pour devenir Premier Ministre. ».


Christine Lagarde (54 ans)

Plus. Malgré quelques maladresses au début, Christine Lagarde apprend vite et réussit à montrer à la fois ses compétences et sa détermination. Elle ne manque pas d’humour ni de respect vis-à-vis de ses interlocuteurs (voir la récente expérience de Jean Quatremer). Avec plus de trois ans à Bercy, elle n’est pas loin du record de longévité (derrière Valéry Giscard d’Estaing et Pierre Bérégovoy). Son anglais courant peut lui permettre de mener à bien des négociations internationales (c’est pourquoi on l’a dit également future locatrice du Quai d’Orsay). Autre avantage important qui pourrait jouer dans un second tour face à une éventuelle candidate socialiste (Martine Aubry ou Ségolène Royal) : le fait d’être d’une femme. L’hypothèse Christine Lagarde est vivement soutenue par l’ancien Premier Ministre Jean-Pierre Raffarin.

Moins. Elle n’est pas une "femme politique" et ses relations avec la majorité parlementaire pourraient lui être difficiles même si elle s’est très bien adaptée au monde politique.


Michèle Alliot-Marie (64 ans)

Plus. En plus d’être femme et d’avoir acquis une stature très enviable (en ayant occupé trois ministères régaliens : Défense, Intérieur et Justice), Michèle Alliot-Marie se veut la représentante d’un gaullisme social qui ne se reconnaît pas en Nicolas Sarkozy. Très habile politiquement, elle avait réussi le tour de force de se faire élire en 1999 présidente du RPR à la surprise générale. Auparavant, en 1995, elle avait réussi à ménager les susceptibilités des deux camps lors de la compétition entre Édouard Balladur et Jacques Chirac. Présentée comme chiraquienne en Sarkozie, MAM fait partie des recordmans de longévité ministérielle (déjà douze ans depuis 1986). Au moins, elle rassurerait l’électorat de la droite parlementaire et même les parlementaires socialistes (Bruno Leroux le disait par exemple sur LCP le 11 octobre 2010).

Moins. Sans doute est-ce une maladresse d’avoir laissé entendre qu’elle était candidate au poste. MAM s’est sentie obligée de faire une telle déclaration pour reprendre du terrain perdu dans les pronostics. Son manque de charisme dans une période qui nécessiterait de redynamiser la majorité présidentielle pourrait être un sérieux handicap. De plus, si elle est plus la gardienne du temple chiraquien (Jacques Chirac n’existe plus politiquement), elle ne peut se prévaloir d’un renouveau de la vie politique. Elle est une baronne à la fois loyale et solide mais ne semble pas être dimensionnée pour devenir la "manager" d’une équipe gouvernementale. De plus, un ancien conseiller de son cabinet est soupçonné d’avoir organisé des fuites d’informations.


Jean-François Copé (46 ans)

Plus. Dans une analyse carrée de la situation, Jean-François Copé devrait être le seul en mesure de diriger le prochain gouvernement car c’est la personnalité la plus ambitieuse de l’UMP dont l’autorité n’est plus contestable, un peu comme Nicolas Sarkozy "devait" aller à Matignon lors de la réélection de Jacques Chirac en 2002. Son partenariat et sa transparence lui évitent de rentrer trop directement en compétition avec Nicolas Sarkozy. L’hypothèse Copé est largement pronostiquée par les députés socialistes. Jean-François Copé est vu également comme un possible rival de François Fillon dans la perspective de 2017.

Moins. Le leadership de Jean-François Copé pourrait faire de l’ombre à Nicolas Sarkozy. Jean-François Copé explique d’ailleurs publiquement qu’il n’est pas intéressé par Matignon où il aurait tout à perdre et qu’il préférerait s’occuper du secrétariat général de l’UMP. On le dit aussi possible pour Bercy.


François Baroin (45 ans)

Plus. François Baroin a pour mentor Jacques Chirac. Son retour au gouvernement à un poste important (le Budget) montre qu’il reste un des personnages clefs du quinquennat de Nicolas Sarkozy. L’homme est lisse et intelligent et représente pour l’électorat de droite et de centre droit une valeur sûre. François Baroin, qui voit régulièrement Jean-François Copé, Bruno Le Maire et Christian Jacob, pourrait aussi avoir des tentations présidentielles pour 2017.

Moins. On a pu lui reprocher de paraître dans des revues people. Ses amis lui déconseillent d’accepter Matignon qui serait le "pire job" (mais peut-on refuser ?).


Luc Chatel (46 ans)

Plus. Luc Chatel est un peu le "chouchou" du Président Nicolas Sarkozy. Il a "grimpé" rapidement dans la hiérarchie gouvernementale au point d’occuper un poste stratégique dans sa relation avec l’opinion publique (l’Éducation nationale et aussi porte-parole). Il serait "l’homme du Président".

Moins. Sa nomination à Matignon n’apporterait aucune plus-value électorale à la candidature de Nicolas Sarkozy.


Bruno Le Maire (41 ans)

Plus. Ancien directeur de cabinet de Dominique de Villepin, Bruno Le Maire, brillant jeune personnage, connaît bien Matignon. Sa nomination donnerait un coup de jeune à l’équipe gouvernementale, une prime à la compétence et un signe clair de rassemblement de toute la majorité UMP. L’ancien directeur de cabinet d’Édouard Balladur, Nicolas Bazire, ami de Nicolas Sarkozy, considérerait que Bruno Le Maire ferait un excellent Premier Ministre.

Moins. Ses activités de Ministre de l’Agriculture n’ont pas eu beaucoup d’échos médiatiques sinon quelques apaisements chez les agriculteurs. Son manque de notoriété pourrait l’handicaper comme cela a été le cas pour Jean-Pierre Raffarin en 2002.


Les peu probables

Parmi les peu probables, je cite juste quelques autres noms qui avaient circulé avant les élection régionales : Éric Woerth (54 ans) qui apparaissait à l’époque le favori, Xavier Bertrand (45 ans) qui a été désigné pour animer l’UMP et qui pourrait revenir au gouvernement (on parle de la Défense, Alain Juppé (65 ans) qui fait figure de "père la rigueur", Xavier Darcos (63 ans) dont l’éviction après les régionales l’a complètement éloigné des supputations de couloir, ou encore Brice Hortefeux (52 ans) dont la proximité sarkozyenne n’apporterait rien électoralement dans un premier tour présidentiel et dont la présence à l’Intérieur paraît stratégique pour Nicolas Sarkozy.

Cette liste n’est cependant pas fermée et les premier-ministrables d’un jour peuvent s’évaporer un autre jour ou, au contraire, revenir en insistant jusqu’à ce que leur nom s’impose à tous (c’était le cas de Pierre Bérégovoy en 1992 qui attendait cette nomination dès 1983).


Pour reprendre la conclusion d’un débat sur LCP entre Alain-Gérard Slama et Jean-Marie Lech (le 24 septembre 2010), l’homme de la situation, aujourd’hui, pour Nicolas Sarkozy, aurait sans aucun doute été… Philippe Séguin.



Aussi sur le blog.

Sylvain Rakotoarison (13 octobre 2010)
http://ww.rakotoarison.eu


Pour aller plus loin :

François Fillon, recours de la majorité présidentielle ?
Interview de François Fillon sur France 2 le 26 octobre 2010.
Qui souhaiteriez-vous à Matignon ?
Pronostics sur le futur Premier Ministre en 2007.
Les premier-ministrables de la Ve République.



Documents joints à cet article

L'incertitude de Matignon (2)

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4 réactions à cet article    


  • jako jako 13 octobre 2010 10:53

    Sylvain, il peut remanier tout ce qu’il veux, y compris la piscine de l’Airbus, ce qui doit changer c’est lui, sa méthode et ses conseillers, d’ailleurs Juppé pressenti pour le quai d’Orsay « aurait » mis en condition le blocage des « conseillers », tout ce qui est derrière les rideaux quoi.


    • impertinent3 impertinent3 13 octobre 2010 12:20

      Les gens au pouvoir n’ont rien de mieux à faire que de se livrer à ces petits jeux délicieusement décadents ?
      Il me semble pourtant que la France a des problèmes qui mériteraient que l’on s’en occupe sérieusement !

      Il ne faut pas s’étonner si l’Allemagne se redresse, et vite, ils ont eux, un gouvernement (avec lequel je ne suis pas vraiment d’accord) qui travaille effectivement et qui n’est pas une cours de récréation d’école primaire.


      • Gabriel Gabriel 13 octobre 2010 13:41

        L’incertitude de Matignon pour savoir qui sera vizir à la place du grand vizir, foutrement intéressant ! Et l’incertitude de ceux qui perdent leur travail à cause des délocalisations, l’incertitude de ceux qui vont être mis à la rue car ils ne peuvent plus acquitter leur loyer, l’incertitude de celui qui ne soigne plus car le gouvernements casse petit à petit la sécurité sociale, l’incertitude des travailleurs épuisés après 40 années de labeur et qui devront continuer, l’incertitude de l’étudiant se demandant ce qu’il va bien pouvoir trouver comme job en attendant que les seniors de 67 ans libèrent les places pour finir en hôpital ou au cimetière, l’incertitude de la femme qui a élevé ses enfants et qui doit retrouver un travail pour survivre, l’incertitude du malade en fin de vie qui fini seul car nos chers dirigeants laminent le système hospitalier, l’incertitude du professeur qui se demande comment il va gérer 35 à 40 élèves etc etc…. Alors l’incertitude des ordures qui participent activement à la paupérisation et la mise en esclavage de notre société au bénéfice des spéculateurs et de leur goinfrerie financière sans limite, ont s’en fout ! 


        • morice morice 14 octobre 2010 09:32

          Décidément, le Sylvain il est comme ceux qui attendent le Beaujolais : ils savent tous que ça sera une piquette, mais en parlent déjà avec des ronds de jambe.


          La cuvée Borlo est déjà sur les rails de production. ET ça sera une piquette.

          Dans une société BLING BLING, Sylvain, les arguments politiques ne comptent plus : on sait qu’un premier ministre se tire quand il se pointe en veste mao (« solognote » y paraît) à un conseil de ministres de vacances, et son sait qu’un prétendant prendra sa place quand il va chez le coiffeur,ce qu’il n’a pas fait depuis 35 ans au moins : LE LOOK suffit, Sylvain, le LOOK suffit chez ces branquignols de la République.

          Vous pensiez avoir élu une équipe présidentielle, vous vous êtes retrouvé avec les Pieds Nickelés. Et ça sera comme ça jusqu’au bout avec Ribouldingue Sarkozy.

          Derrière lui, il n’y a AUCUN PROJET POLITIQUE, AUCUN. A part le sécuritaire : faire peur pour se faire élire : du Georges Bush fils.... DES NEOCONS MEME PAS NEO....

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