L’UMP, leçon d’un échec
La défaite de Nicolas Sarkozy aux dernières élections présidentielles relève autant d’un rejet du candidat que d’une erreur stratégique de l’UMP. L’UMP n’a pas su rassurer l’électorat sur sa capacité à préserver « la France » dans ses valeurs, son modèle social et sa position sur l’échiquier planétaire. Le slogan « la France Forte » dénotait par rapport aux discours sur la puissance de la crise et la faiblesse des Etats. Le candidat sortant est apparu comme le candidat de l’Europe, soumis à la finance internationale, et proposant aux français de se résigner à obéir aux lois de l’économie. A l’inverse, les autres candidats n’ont cessé de vouloir redonner des marges de manœuvre à l’Etat : Hollande avec les attaques répétées contre l’Europe, Marine le Pen avec les droits de douanes, Mélenchon avec le pilori réservé aux banquiers. L’idée la plus emblématique de ce patriotisme économique émane de François Bayrou avec le logo « made in France ».
François Hollande a bien compris cette idéologie passéiste qui reste dominante en France. Il l’a pleinement exploité dans la rhétorique (le candidat normal venant de Tulle), dans l’image (un simple coup d’œil à sa photo présidentielle est éloquent) et dans les idées avec le contrat de génération, sorte de résurgence moderne d’une vision artisanale du monde du travail.
Ne pas comprendre cela a été une erreur stratégique grave pour Sarkozy. C’est en effet ce qui lui a clairement fait perdre les voix du FN et donc l’élection. En 2007, 70% des voix du FN s’était reporté sur lui, seulement 51% l’ont fait en 2012.
En étudiant le vote FN, on se rend compte que la perte des valeurs prédomine. L’islam, est ainsi cité comme troisième raison du vote FN (57% des sondés, devancé d’une courte tête par la sécurité) (sondage opinionway du 28 avril 2011). Un racisme religieux semble avoir pris le pas sur un racisme basé sur l’origine ethnique. Ce qui est des plus surprenants dans un pays où la pratique religieuse se marginalise. C’est donc très clairement un vote identitaire, la religion catholique structure la France, l’église trône sur la place centrale du village et l’arrivée de l’Islam remet en cause l’héritage historique de la France. L’idée répandue que les électeurs du FN pensent que les immigrés prennent le travail des nationaux semble fausse, l’emploi arrivant en 8 positions des motivations du vote FN.
Les deux candidats qui se sont attachés à prendre les voix du FN, Nicolas Sarkozy avec la sécurité et Jean-Luc Mélenchon avec la fibre sociale, ont très largement échoué. Ils ont fait un très mauvais calcul, en particulier pour N. Sarkozy qui s’est coupé des électeurs centristes.
Au-delà des simples électeurs du FN, ces idées sont fortement partagées par les français. Ainsi 50% des français voient la mondialisation comme une menace (TNS Soffres novembre 2011) mais ils sont en même temps bien conscient s qu’elle est inévitable. Ils sont aussi conscients du retard de la France dans la compétition internationale (moins de 34% pensent qu’elle est bien armée contre 78% des allemands).
Partant de ce constat, une mondialisation inquiétante mais perçu comme inévitable, l’UMP doit effectuer sa révolution idéologique après la défaite probable des législatives. Il ne peut plus rester dans cette position ambivalente qui associe le sérieux budgétaire et économique avec une méfiance du libéralisme économique. Si elle veut reconquérir le pouvoir ils devront convaincre que la France est prête à affronter la concurrence internationale et que la mondialisation est une formidable opportunité. Pour cela, ils devront abandonner les thèses racistes et sécuritaires qui se sont montrés peu efficaces et globalement pernicieuses. Le parti doit se moderniser et expliquer que la France de demain ne s’arrêtera pas à nos frontières mais qu’elle rayonnera à travers le monde. Il faudra expliquer que la France ne se définit pas par son modèle social qui est voué à changer mais par sa culture, ses valeurs et son style de vie. Le monde n’envie pas les 35 heures mais il envie notre gastronomie, notre cinéma, notre histoire, notre industrie de mode et tant d’autres choses. C’est ces valeurs qu’il faut défendre et exporter.
Le parti socialiste passe son temps à se refonder mais l’UMP, trop attaché à l’héritage gaulliste, n’a jamais su effectuer sa propre refondation. Les cinq années à venir offre la possibilité de construire un parti moderne, ouvert sur le monde et offrir une vision d’avenir pour la France.
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