La danse des éléphants verts
On connaît bien les éléphants roses. Eléphants et -phantes d’ailleurs. L’égalité hommes-femmes dans l’importance auto-attribuée est la règle. Le « Moi » n’a pas de sexe. Enfin un domaine où les études de genre pourraient s’appliquer avec à-propos.
Et bien les éléphants accrochent une couleur de plus à leur palmarès. Il n’y avait pas besoin d’avoir un ver(t)re dans le nez pour les voir roses. Pas besoin non-plus d’avoir fumé la moquette pour identifier les éléphants Verts. Il y en a cinq bien connus.
Le plus jeune est une femelle vigoureuse et ambitieuse. Elle est dotée d’une voix reconnaissable entre toutes : en une phrase de son ton pointu elle est capable de vous rouvrir les cicatrices de vos tympans déchirés lors d’anciennes otites contractées pour ne plus entendre les réprimandes parentales ou les punitions de la prof de géographie. Elle surfe sur la vague et fait du parachute. Il s’agit bien sûr de Cécile Duflot. Elle décide donc de se parachuter dans une circonscription parisienne pour les législatives de 2012, alors qu’elle est originaire non pas de la 6e circonscription ou du Loir-et-Cher, mais du Val-de-Marne.
Euh... dites-moi, ne sont-ce point les Verts qui recommandent une politique de proximité, la défense des terroirs, une consommation régionale ? Oui, oui. N’est-il pas contradictoire dans ce cas d’aller se faire élire dans une circonscription facile, loin de chez soi, sans en connaître le terrain, N’est-ce pas flirter avec l’esprit de la mondialisation ? Et quel sera le bilan carbone de son déménagement ? Oh mais c’est qu’elle a des arguments, la bougresse :
« J'ai décidé, après une longue réflexion, d'être candidate sur la 6e circonscription à Paris (XI e et XXe arrondissement), dit-elle. Les militants m'ont donné envie de cette aventure parisienne. J'aime Paris et je sais que la parole des écologistes y est fortement attendue. »
Déjà, "sur" la circonscription : confirmation qu'elle survole. On est bien dans le parachutage. Ensuite, "longue réflexion", du genre : « J’y pense tous les matins en m’épilant... » ? Les militants lui ont donnée envie... Ooohhh, trop chou ça. Les militants lui ont donné envie de lâcher son terroir pour la grande ville, celle qui vous met en lumière. Ne pourrait-elle pas dire ouvertement qu’elle veut une première place avec en vue la Mairie de PARIS ou la présidentielle de 2022 ? Allons, Cécile, ma fille, pas de langue de bois. Les Verts se doivent d’être différents, honnêtes, courageux. Pas d’ego trip chez eux.
Pfff... Faut pas rêver : les Verts sont de la même couleur que celle du porte-feuille de ministre, et du bois dont on fait les mêmes flûtes à gauche comme à droite. Ils font seulement semblant de penser à autre chose. Les autres assument leurs ambitions personnelles : Fanfan la tulipe, Sarkoïdose, Bayrouflaquette, Royalcanin. Pas les Verts. C’est mal, c’est immoral l’ambition personnelle, c’est elle qui a poussé le monde dans une décharge à ordure, alors il ne faut surtout pas en parler. « Ce n’est pas moi, ce sont les militants qui m’ont donné envie... Et puis Paris attend la parole des écologistes ! » Comme si la parole écologiste attendait Cécile pour exister à Paris !
Elle gonfle, elle gonfle, la Cécile. Elle élargit sa base personnelle. Elle renforce son assise. Au fond elle est rassurante : les Verts sont des politiciens comme les autres, aussi arrivistes. Vous vous rendez compte : s’ils étaient moraux et parfaits on ne pourrait plus entretenir ses petits travers personnels sans se sentir infiniment coupables.
Les autres éléphant-e-s ont les connaît bien mais ils n’arrivent pas à rattraper médiatiquement la Cécile. Joly peine à susciter l’adhésion et reste péniblement autour de 5% d’intentions de vote. Noël Mamère cultive avec talent l’art d’être désagréable, au point qu’on le verrait bien prendre en main le Ministère du Père Fouettard. Dany-le-Roux démontre avec fierté qu’il existe des éléphants oranges et qu’il n’a pour autant aucun effet défoliant. Enfin Nicolas Masque-et-Tuba est un peu à l’écart ces temps. On le reverra sûrement un de ces jours derrière un hublot passer la brosse à dents à de quelconques requins en mal de célébrité. Il ne risque pas de tomber dans l’oubli : la pub pour les produits Ushuaïa passe toujours à la télé avec la jolie zik de Deep Forest.
Bon, au moins les éléphants ne sont pas en voie de disparition. En politique au moins.
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