La Gauche, la Droite, et le libéralisme
Il est souvent dit en France : « »La Droite et la gauche ont échoué lamentablement (...), droite et gauche sont des idéologies d’arrière-garde alors que d’autres logiques éprouvées s’imposent« ».
J’ai mis cette citation que j’ai trouvé sur un blog en introduction de cet article parce qu’elle illustre parfaitement les amalgames dangereux que plus personne ne relève aujourd’hui tant ils sont banalisés. Les politiques françaises de droite et de gauche y sont péjorativement confondues avec des idéologies cependant que des politiques exotiques y sont qualifiées de logiques. Essayons d’y voir clair.
Les idéologies n’ont jamais été mises en œuvre en France, et les malheureux essais étrangers ont effectivement échoué.
Les politiques que l’on appelle communément la Droite et la Gauche, ce sont des politiques interventionnistes. Ces deux interventionnismes sont antagonistes en ce sens qu’ils ont leur clientèle, ce fameux clivage que l’ont dit ’clanique’ et dépassé. Ces politiques de droite et de gauche s’appuient nécessairement sur des recettes fiscales importantes, et sont contestées alternativement d’un bord ou de l’autre par ceux qui se croient lésés, ou qui ne veulent pas ’payer pour les autres’. C’est cet interventionnisme que les théoriciens du libéralisme, globalement, remettent en cause au nom de la concurrence libre et non faussée et du profit.
A ce titre, la droite n’est pas plus libérale que la gauche, mais elle fait alliance avec les libéraux contre la gauche en jouant ’contre’ l’impôt. En effet, l’interventionnisme de droite est une redistribution à l’envers selon l’expression de Michel Rocard lui-même : en cas de baisse des impôts, ceux qui les paient sont évidemment au premier rang des bénéficiaires, et en cas de maintien de fortes recettes fiscales, tant que la droite est au pouvoir, elle redonne d’une main à ceux à qui elle a pris de l’autre.
Le libéralisme livré à lui-même c’est l’individualisme et le court ’termisme’ c’est-à-dire le plus grand profit individuel le plus vite possible. Cette idéologie, car c’en est une au même titre que le libertarisme’ et l’anarchie, qui exclut les interventionnismes, est insoutenable sans un cadre politique, structurel, social. Sans cet encadrement, le libéralisme n’est que capitalisme sauvage, autophage, suicidaire : c’est ce qu’on peut appeler l’ultra libéralisme, expression niée par les interventionnistes de droite qui se prétendent libéraux comme on l’a vu et parce qu’ils mènent effectivement une politique insoutenable également. La redistribution de gauche est peut-être contestable mais elle ne se prétend pas libérale.
Le libéralisme ne peut se soutenir sans des arbitrages, des infrastructures, des services sociaux, et la société dans son ensemble a besoin d’objectifs à long terme. De sorte que la seule politique acceptable dans le cadre d’une économie de marché est celle d’un état fort, donc d’une fiscalité acceptée. Et les seules politiques qui peuvent composer un duo efficace et fécond avec le libéralisme, à l’instar de ce duo Liberté/Egalité, ce sont paradoxalement celles qui se qualifient improprement elles-mêmes d’anti-libérales.
En effet, ces politiques dites anti-libérales sont en réalité les politiques qui ne pourraient que combattre, mais combattraient efficacement non pas le libéralisme mais ses avatars, ses tares et ses excès, des politiques qui pourraient faire de cette ’folle du logis’ à l’instar de l’imagination, le moteur apprivoisé de l’économie.
Sur la croissance, laissons parler Jean Baudrillard (extrait de son ouvrage "La société de consommation"). :
"Il faut abandonner l’idée reçue que nous avons d’une société d’abondance comme d’une société dans laquelle tous les besoins matériels (et culturels) sont aisément satisfaits car cette idée fait abstraction de toute logique sociale. Ce sont nos sociétés industrielles et productivistes qui sont ’dominées par la rareté’, par l’obsession de la rareté caractéristique de l’économie de marché, puisque ce qui est satisfait dans une société de croissance et à mesure que s’accroît la productivité ce sont les besoins mêmes de l’ordre de production, et non les besoins mêmes de l’homme. Il est clair que l’abondance recule indéfiniment : mieux, elle est irrémédiablement niée au profit de l’organisation de la rareté (la pénurie structurelle)."
La construction en cours de porte-conteneurs de plus en plus gigantesques, ou bien les projets de lutte contre le réchauffement climatique, ou encore l’accroissement des inégalités, la raréfaction des ressources planétaires, etc. illustrent parfaitement ces propos énoncés il y a près de 40 ans. L’ouvrage de Jean Baudrillard, a été écrit à une époque où nous envisagions à terme la semaine de 16 heures ! Où l’on voit aujourd’hui que ce texte est terriblement d’actualité.
"La jeune génération devrait l’étudier soigneusement. Elle se donnera peut-être pour tâche de briser ce monde obscène de l’abondance des objets, si formidablement soutenu par les mass media, ce monde monstrueux qui nous menace tous" (Préface à l’ouvrage, de J.P. Mayer, Université de Reading, Centre de recherches (Tocqueville)).
JL
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