Le sarkozysme ou la République des boules puantes
Les démêlées judiciaires de Nicolas Sarkozy, lui imposent un retour médiatique prématuré. Afin de vouloir reprendre la main, celui-ci s'est exprimé conjointement à la radio et à la télévision sur des canaux et à des heures de grande écoute. Il y aurait donc un complot de la République contre lui à travers un de ses bras les plus vitaux : la Justice. Le porte-parole officieux de Nicolas Sarkozy Henri Guaino prolonge le plan de com' en s'exprimant sur les ondes notamment à propos d'Alain Juppé.
Un jeu de boule puante, pilier constructeur du sarkozysme.
On croyait que seuls les écologistes avaient le monopole de la cacophonie politico-politicienne. Pourtant leur expérience est particulièrement solide en la matière, les compétences multiples, et les diverses occasions n'ont pas été manquées. Alors il faudra en faire son deuil, désormais le retour de Nicolas Sarkozy et les affaires de l'UMP relancent un concert généralisé de cacophonie à droite. Pour le bonheur de ses opposants et la désolation des militants.
Le "Juppé bashing". Acte I
Ca y est, c'est parti, le jeu des boules puantes a commencé.
"Je croyais que les épreuves de la vie avaient enfin débarrassé Alain Juppé de cette épouvantable arrogance, cet insupportable mépris dont il accable depuis toujours ceux qui sont en désaccord avec lui. Force est de constater que non". "Monsieur Juppé donne des leçons de morale. Mais qui ne se souvient de son histoire ? Pour donner des leçons de morale il faut être exemplaire".
C'est en ces termes que s'exprime Henri Guaino sur Alain Juppé suite à ses propos appelant au respect de l'institution judiciaire de la République.
Naturellement, ces attaques ne sont pas sans arrière-pensées, la présidentielle de 2017 agite tous les esprits. Au nom de la conquête du pouvoir tout est bon.
Toutefois à y réfléchir de plus près, cette phrase interroge. Comment quelqu'un a priori intelligent, expérimenté politiquement peut-il à ce point avoir commis une telle faute de communication politique ?
La ringardisation est un pilier du sarkozysme. Ceux qui s'y frottent, s'y piquent. Le buldozer est prêt à tout. La garde rapprochée se comportait de porte-flingues. Leurs expressions efficaces au départ étant devenues tellement caricaturales, qu'elles finissaient par en devenir risibles. Une véritable mécanique politique qui tente éperdument à répéter une recette de politique qui a certes marché en son temps mais a vécu.
Au premier niveau de cette sortie médiatique, la sarkozie commence là l'acte I de sa campagne de "Juppé bashing" dont on va être abreuvé pendant tout l'été jusqu'au nouveau congrès de l'UMP.
Toutefois, l'arroseur risque bien d'être arrosé. Reprenez cette même phrase et remplacez le nom d'Alain Juppé par celui de Guaino ou de Sarkozy et la phrase sonne alors comme d'une actualité criante !
D'autre part s'il y a bien quelqu'un qui ne commente pas l'actualité politique à droite (ou alors par parcimonie) c'est bien Alain Juppé (ce qui en fait d'ailleurs en partie la recette de sa popularité). Or, le sarkozysme à vouloir se berlulsconiser médiatiquement et être partout tout le temps occupe l'espace médiatique à la saturation. Or ce retour médiatique du sarkozysme est à y regarder de près assez décevant.
L'intervention que soit disant tous les Français attendaient ne mobilise guère. Même si la part de marché de l'intervention de Nicolas Sarkozy est plus qu'honorable avec un pic à 9.4 millions (44 % de parts de marché) il est loin devant ses interventions présidentielles qui mobilisaient plus de 16 millions de téléspectateurs. Même un certain DSK faisait mieux avec 12,5 millions de téléspectateurs. (Source : http://www.metronews.fr/culture/audience-du-jt-de-tf1-sarkozy-plus-fort-que-poutine-mais-loin-derriere-dominique-strauss-kahn/mngc !fOpPaZ12q4I2I/). Toutefois plus que la part du marché ce qui est intéressant c'est de voir le nombre de personnes qui ont migré spécialement pour cette intervention et là le résultat est très décevant puisque la plus value de son interview n'est que de 1,1 million de téléspectateurs (4-5% ). Ne serait-ce pas un signe de la lassitude des Français à voir leur médias instrumentalisés par les politiques pour leurs pleurnichages judiciaires et politiciens ?
Cette combinaison communicationnelle constitue donc tout ce que les Français rejettent de la classe politique. Une classe privilégiée qui se livre à des batailles d'ego en s'arrogeant des moyens médiatiques démesurés. Le berlusconisme a vécu. La crise est passé par là. Pardon, la crise est là, sauf pour certains politiques enfermés dans leurs bulles et déconnectés des réalités sociales communicant comme dans des chambres d'écho.
"Juppé bashing". Acte II
La prédation du sarkozysme ne se limite pas à la conquête du pouvoir par la ringardisation ou la destruction de ses adversaires. Il y a un effet malsain qui consiste à dépasser les ego de personnes pour punir les concitoyens sous la coupe du territoire politique de l'opposant. Certains parleront peut-être de dommage collatéral mais la punition territoriale et la confiscation aux citoyens de leurs dynamiques territoriales constitue bien un des ressorts du sarkozysme.
Celui qui en fait l'aveu, c'est Henri Guaino lui-même. Dans cette même interview, Henri Guaino, porte-parole officieux de Nicolas Sarkozy souhaite supprimer l'école de la magistrature (Source : http://www.europe1.fr/Politique/Henri-Guaino-il-faut-supprimer-l-ecole-nationale-de-la-magistrature-2173905/). Sans qu'aucune raison valable ne soit donnée, il faudrait donc des juges moins formés. Moins formés pour être plus maléables ? Mais l'enjeu ne serait-il pas ailleurs ? Une simple question : où se situe l'école de la magistrature ? A Bordeaux dont son maire s'appelle un certain Alain Juppé. Au-delà du règlement de compte personnel il faudrait donc priver un territoire d'une source d'emploi, de formation, de réputation. et donc contribuer modiquement certes, mais contribuer quand même à l'appauvrissement d'un territoire dont les victimes ne sont pas des opposants politiques mais les Français eux-mêmes.
UMP : le choix entre l'homme du passé et l'homme du passif ?
Alain Juppé serait donc alors l'homme du passé, celui des affaires du RPR. De vieilles affaires aujourd'hui réglées sur lesquelles la justice a tranché. Cette attaque incensée est suicidaire. Comment un membre d'un parti peut-il à ce point exhumer des dossiers brûlants de son propre parti qui nuisent/ont nui à l'image d'un parti et de la politique en général ? La sarkozie s'est fondée en grande partie sur les affaires du RPR comme moyen de démarcation et de souffle nouveau. Selon Henri Guaino, Alain Juppé serait donc l'homme des affaires, l'homme du passé, des affaires troubles. Cette stratégie qui a certes marché en sont temps risque de ne plus fonctionner. Car à défaut d'être l'homme du passé, Nicolas Sarkozy risque d'incarner l'homme du passif. Celui d'une dette augmentée de 600 milliards (soit plus de 31000 euros par foyer fiscal imposable !), d'une réduction de la croissance à 0%, d'un déclassement financier de la France, d'une perte de 30 milliards de la balance commerciale, d'une augmentation de 2% du chômage et d'une perte de près de 500 000 emplois et d'une braderie généralisée des biens de l'Etat et des entreprises aux marchés et financiers internationaux (on peut continuer la liste...).
L'exhumation des linges sales, le jet des boules puantes ne peut constituer un projet politique. Dans ce débat et cette communication stérile, l'UMP se mortifie un peu plus. Les choix ne feront donc pas sur des vieilles recettes ou des coups de com' ou l'arrivée d'un (e) troisième homme/femme vierge et providentiel(le), mais vraisemblablement sur des résultats. De ce côté là, Alain Juppé a une sacrée longueur d'avance. Le relèvement de la ville qu'il a opéré après le chabanisme finissant est un de ses meilleurs atouts appuyé par un soutien massif de ses administrés ( réélu au premier tour avec 60% des voix, son meilleur score à la mairie). Une personne qui a su être là au plus près du terrain sur des problèmes concrets et avec des résultats probants. Nicolas Sarkozy pourra-t-il en dire de même quand alors que les Français triment sous les conséquences du quinquennat Sarkozy (augmentation des impôts pour renflouer la dette laissée) et que celui-ci fuyait son pays pour faire la course à l'argent facile dans les conférences à 100 000€ ?
L'UMP devra donc faire des choix qui sont raccords avec la société si elle veut ambitionner un avenir. Croire que les vicissitudes du holladisme ouvrent toutes les voies serait la pire erreur à commettre.
Au cours de son interview, Henri Guaino précise : "Je suis contre les lynchages et les lynchages mesquins."
Ouf, on est sauvé sur l'honnêteté intellectuelle de certains politiques. Les militants demain et les Français après-demain en prendront-ils acte ?
En préambule de l'interview, Henri Guaino est présenté comme : "Peut-être le plus fidèle des maréchaux de Nicolas Sarkozy, s'il ne doit en rester qu'un vous serez celui là." A l'heure des comptes les troupes faiblissent. Où sont passés les membres de la garde rapprochée ? Les Hortefeux, Morano, Guéant sont bien silencieux...
Parfois, peut-être, il vaut mieux ne pas perdre une occasion de se taire.
Pour écouter en intégralité l'interview d'Henri Guaino sur Europe 1 : http://www.europe1.fr/MediaCenter/Emissions/Le-grand-rendez-vous/Sons/Le-grand-rendez-vous-avec-Henri-Guaino-2173875/
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