Législatives 2024 (51) : la quadrature du cercle de Michel Barnier
« Je pars, avec le gouvernement, d’un vote populaire par lequel vous avez été élus, mesdames, messieurs les députés et qui traduit des attentes fortes, urgentes et justifiées pour des services publics efficaces, pour une sécurité au quotidien, mais aussi, j’en suis convaincu, pour que notre pays retrouve le chemin de l’apaisement, de la fraternité, de l’espérance. (…) Écoute et respect à l’égard de toutes les forces politiques et de toutes les sensibilités politiques représentées à l’Assemblée Nationale et au Sénat. Je l’ai dit dès le premier jour : nous écouterons et respecterons chacune et chacun d’entre vous, même si ce respect n’est pas toujours réciproque. » (Michel Barnier, le 1er octobre 2024, dans l'hémicycle).
Ce mardi 1er octobre 2024 à 15 heures a eu lieu, au Palais-Bourbon, l'ouverture de la première session ordinaire de la XVIIe Législature qu'on n'hésitera pas à qualifier d'ingouvernable ou d'impossible ("on" = sans doute les livres d'histoire plus tard). Elle est la troisième journée de séances publiques, après l'installation de la nouvelle Assemblée Nationale les 18 et 19 juillet 2024. Il n'a pas attendu une seule journée : le nouveau Premier Ministre Michel Barnier y a prononcé sa déclaration de politique générale devant des députés au mieux réticents au pire hurleurs (dont on peut lire le texte dans son intégralité ici).
En effet, la base parlementaire de son gouvernement est très étroite, et Michel Barnier a dû essuyer pendant toute la durée de son discours les vociférations des insoumis qui montraient un irrespect total des institutions (notons que ces mêmes députés ont été très calmes pendant le discours de Marine Le Pen !). Mais même au sein de la majorité, l'attitude est à l'attentisme. Le groupe EPR (Ensemble pour la République, ex-Renaissance) avait pour consigne de ne pas faire d'ovation pour le Premier Ministre afin de se montrer comme des alliés responsables mais exigeants, ce qui ne va pas beaucoup aider le gouvernement.
C'est son grand oral, probablement le moment le plus important de sa carrière politique, le plus important et le plus improbable, car à 73 ans, il ne s'attendait pas à reprendre du service. Même sa candidature à la primaire LR en 2021, il l'a présentée comme un baroud d'honneur avant de quitter la scène politique.
Après un hommage à Philippine, lâchement violée et assassinée, Michel Barnier a rempli son objectif de la déclaration de politique générale : ne pas faire un catalogue à la Prévert de mesures qu'il ne pourra pas prendre à cause du manque de majorité, mais une synthèse de ce qu'il compte faire, sur le fond (peu de textes) et sur la forme (beaucoup de concertation, d'écoute). Sa méthode : « Pour répondre à ces questions dans le contexte politique particulier où nous sommes, nous avons besoin d’une nouvelle méthode. Nous avons besoin d’écoute, de respect et de dialogue. Écoute, respect et dialogue entre le gouvernement et le Parlement. Je demanderai à mon gouvernement de s’appuyer davantage sur le travail parlementaire : propositions de lois, amendements, recommandations des commissions d’enquête ou d’information, évaluation des politiques publiques. Cela vaut évidemment pour les groupes parlementaires de l’Assemblée Nationale ou du Sénat dont certains membres font désormais partie du gouvernement et que je remercie pour leur soutien, mais aussi pour tous les autres groupes. Je souhaite qu’il y ait moins de textes et qu’il y ait plus de temps pour en débattre. ».
Pour autant, le Premier Ministre n'entend pas rester immobile. Il compte bien s'appuyer sur l'Assemblée pour faire passer des mesures difficiles, celles qui réduiront le déficit de l'État qui sera en 2024 à plus de 6% du PIB. Il a proposé la trajectoire suivante : déficit ramené à 5% en 2025, 3% en 2029. Il a souhaité placer son action dans le cadre d'une durée de deux ans et demi, jusqu'à l'élection présidentielle, même si durer, pour lui, va être un véritable calvaire, surtout après la première année où le Président de la République pourra débloquer la situation en dissolvant à nouveau.
Sa priorité est notre dette : « Une exigence d’abord : la réduction de notre double dette, budgétaire et écologique. (…) Ces deux réalités budgétaire et climatique certains veulent les nier ou les ignorer. D’autres les subissent ou se contentent de les commenter. Mettre la tête dans le sable ou se lamenter n’a jamais permis d’avancer. Il n’y a pas de fatalité tant qu’il n’y a pas de fatalisme ! Je pense que les hommes et les femmes politiques que nous sommes n’ont pas le droit en ce moment d’être fatalistes. Je suis convaincu que nous pouvons trouver un chemin de réalisme et d’action qui passe partout par le contrat plutôt que par la contrainte et qui nous permette pas à pas de reconstruire la confiance. ».
Comme réduire le déficit ? Plusieurs axes de réponse.
Réduire les dépenses publiques : « Comment faire ? Ne nous racontons pas d’histoires, je ne raconterai pas d’histoires. Nos dépenses publiques atteignent 57% de la richesse nationale, contre 49% dans le reste de l’Europe. Elles ont augmenté de plus de 300 milliards depuis 2019, ce qui représente 5 000 euros de dépenses publiques supplémentaires chaque année par Français, quel que soit son âge. Le premier remède contre la dette, c’est la réduction des dépenses. En 2025, les deux tiers de l’effort de redressement viendront donc de la réduction des dépenses. Réduire les dépenses, c’est renoncer à l’argent magique, à l’illusion du tout gratuit, à la tentation de tout subventionner. ».
Ensuite, rendre plus efficace l'argent public : « Le deuxième remède, c’est l’efficacité de la dépense publique. Nous sommes champions des dépenses publiques, mais pour quel résultat ? Est-il normal que le coût de l’éducation d’un élève français soit supérieur à celui de nos voisins, alors que nos professeurs sont souvent moins bien payés ? Est-il acceptable que les services de l’État louent à prix d’or des locaux au cœur de Paris quand un déménagement dans des départements limitrophes permettrait de faire des économies et de participer à la rénovation urbaine comme l’organisation des Jeux olympiques l’a prouvé en Seine-Saint-Denis ? Trop souvent, nos concitoyens ont l’impression, et vous les entendez, mesdames et messieurs les députés, de ne pas en avoir pour leurs impôts. Nous ferons donc la chasse aux doublons, aux inefficacités, aux fraudes, aux abus du système et aux rentes injustifiées. ».
Puis, de nouveaux impôts très ciblés : « Le troisième remède est d’ordre fiscal. Nos impôts sont parmi les plus élevés du monde. Les baisses d’impôts décidées depuis sept ans et les mesures prises pendant la crise du covid ont aidé beaucoup de Français et beaucoup d’entreprises, c’est la vérité, et ont redonné de l’oxygène dans une situation inédite et grave. Mais la situation de nos comptes demande aujourd’hui un effort ciblé, limité dans le temps et partagé dans une exigence de justice fiscale. Ce partage de l’effort nous conduira à demander une participation au redressement collectif aux grandes et très grandes entreprises qui réalisent des profits importants. Nous le ferons sans remettre en cause notre compétitivité. Il n’y a ni partage ni redistribution possible s’il n’existe pas en amont de l’activité et de la production sur notre territoire. Cette exigence nous conduira également à demander une contribution exceptionnelle aux Français les plus fortunés afin d’éviter les stratégies de défiscalisation des plus gros contribuables. ».
Quatrième piste, qui est, il faut bien le dire, la tarte à la crème de tous les nouveaux gouvernements (on ne voit pas pourquoi l'État ne lutterait pas en permanence contre la fraude) : « Enfin, nous lutterons résolument et dans la durée contre la fraude fiscale et la fraude sociale, y compris en sécurisant les cartes Vitale pour éviter le versement indu d’allocations. ».
Un mot sur les épées de Damoclès : « J’ai entendu parler d’une épée de Damoclès qui pèserait sur la tête du gouvernement mais la véritable épée de Damoclès, est dès aujourd’hui là sur la tête de la France et des Français et faute d’actions, faute de courage maintenant, je suis sûr d’une chose : elle pèsera beaucoup plus gravement demain sur nos enfants et nos petits-enfants. La véritable épée de Damoclès, c’est notre dette financière colossale : 3 228 milliards d’euros. Si l’on n’y prend garde, elle placera notre pays au bord du précipice. (…) Il y a une autre épée de Damoclès, tout aussi redoutable, celle de la dette écologique. Nous n’héritons pas la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants. Cette priorité m’a accompagné tout au long de ma vie publique, depuis mon tout premier engagement aux côtés du tout premier ministre français de l’environnement, dans mon pays de Savoie, à l’Assemblée Nationale et au Sénat où j’ai eu l’honneur de siéger, au ministère de l’environnement puis au ministère de l’agriculture et de la pêche, à la Commission Européenne enfin. Elle sera au cœur de notre action, parce que j’ai en mémoire la recommandation d’un homme d’État que je respectais et admirais, Pierre Mendès France : ne jamais "sacrifier l’avenir au présent". ».
Effectivement, l'autre dette, écologique, fait partie des préoccupations majeures de Michel Barnier : « J’entends bien ceux qui disent : à quoi bon ? Que peut faire la France seule, face à un problème qui concerne l’ensemble de l’humanité ? Je pense qu’on peut faire beaucoup. Nos émissions de gaz à effet de serre ont à nouveau diminué de 3,6% au premier semestre de 2024 : c’est la preuve que les efforts paient. Nous pouvons et devons faire plus pour lutter contre le changement climatique et prévenir tous les risques de plus en plus nombreux et violents qu’il porte en lui, préserver la biodiversité et encourager l’économie circulaire. Nous devons agir plus concrètement au sein de l’Union Européenne et dans le cadre des Accords de Paris, et valoriser les initiatives des communes, de nos régions, des départements, de tant d’entreprises et d’associations. La transition écologique doit être l’un des moteurs de notre politique industrielle. Décarbonation des usines, encouragement à l’innovation, implantation de nouvelles industries de la transition, renforcement de nos filières de recyclage : je crois depuis longtemps à une écologie des solutions. Ensemble, nous allons agir aussi sur l’offre énergétique, en poursuivant résolument le développement du nucléaire, notamment des nouveaux réacteurs, mais aussi des énergies renouvelables en mesurant mieux tous leurs impacts, je pense en particulier aux éoliennes, en valorisant la biomasse pour décarboner efficacement la production de chaleur et de gaz, en développant la filière française des biocarburants pour l’aviation. Enfin, dans les outre-mer, engagés vers un objectif de 100% d’électricité renouvelable en 2030, seront développés des laboratoires d’innovation pour le solaire et la géothermie. Ensemble, nous devons maîtriser nos besoins d’énergie, en poursuivant les efforts engagés et en faisant preuve de sobriété et d’efficacité. Nous allons mieux cibler l’accompagnement des particuliers et des entreprises, notamment pour la rénovation thermique des bâtiments. En attendant, le diagnostic de performance énergétique sera simplifié et son calendrier adapté. ».
Et de faire de l'État le premier acteur de la transition écologique : « L’État qui est avec ses opérateurs le plus gros propriétaire immobilier foncier du pays doit aussi être exemplaire et réduira sa consommation d’énergie en isolant les surfaces qu’il gère. Pour tout cela, les travaux de planification vont reprendre immédiatement, avec les outils dont nous disposons : la stratégie française pour l’énergie et le climat, le troisième plan national d’adaptation au changement climatique, la nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie. Je voudrais dire un dernier mot sur la question de l’eau. Sécheresses ou inondations, conflit des usages, pollution des nappes phréatiques, envolée des prix : soixante ans après la toute première loi sur l’eau de 1963, le moment est venu, en prenant en compte les travaux et les réflexions engagées ces dernières années, de consacrer aux enjeux stratégiques liés à l’eau une grande conférence nationale pour agir. ».
Pour rassurer son aile gauche, Michel Barnier a indiqué ses propres lignes rouges : « Madame la Présidente, mesdames et messieurs les députés, j’ai entendu que certains ont des lignes rouges, parfois très rouges. On préfère les lignes bleues aux lignes rouges ! Depuis que j’ai accepté la proposition du Président de la République d’être le Premier Ministre de notre pays, j’ai gardé en mémoire mes propres lignes rouges, qui sont celles de tout le gouvernement. Il n’y aura aucune tolérance à l’égard du racisme et de l’antisémitisme. Il n’y aura aucune tolérance à l’égard des violences faites aux femmes. Il n’y aura aucune tolérance à l’égard du communautarisme. Il n’y aura aucun accommodement en ce qui concerne la défense de la laïcité, aucun. Nous n’accepterons aucune discrimination. Nous n’accepterons aucune remise en cause des libertés conquises au fil des ans. Je pense à la loi sur l’interruption volontaire de grossesse défendue par Simone Veil. Pour tout vous dire, avoir siégé dans le même gouvernement que Simone Veil reste un des grands honneurs de ma vie. Il n’y aura donc aucune remise en cause de cette loi désormais protégée par la Constitution. De même, il n’y aura aucune remise en cause de la loi sur le mariage pour tous ni des dispositions législatives sur la procréation médicalement assistée. ». Ça va mieux en le disant.
Et pour un clin d'œil à Emmanuel Macron, il a évoqué MacKinsey (sans le citer) : « Pour conserver ou reconstruire une vraie capacité de prospective, j’ai toujours pensé que les acteurs publics tels que les députés ou les membres du gouvernement en avaient besoin, nous fusionnerons France Stratégie avec le Haut-commissariat au plan. Il y a dans les services de l’État de l’intelligence et de l’expertise ; elles peuvent être mieux utilisées, sans avoir recours à des cabinets de conseil privés. ».
L'action du gouvernement aura cinq grands chantiers : le niveau de vie des Français ; l'accès à des services publics de qualité ; la sécurité au quotidien ; la maîtrise de l'immigration ; plus de fraternité.
1. Niveau de vie des Français
Pouvoir d'achat : « Nous avons besoin d’une économie vigoureuse où chacun puisse bien vivre des fruits de son travail. Il y a dans notre pays de nombreuses créations d’emplois et de plus en plus de personnes au travail grâce à l’attractivité de la France pour les investissements internationaux, qui est depuis sept ans une priorité du Président de la République, et grâce à la réussite des entrepreneurs et des entreprises, qu’elles soient grandes, petites ou intermédiaires, des artisans et des commerçants qui travaillent et produisent en France dans de nombreux secteurs, y compris le numérique et l’intelligence artificielle. Notre pays doit et veut amplifier son ambition industrielle. Le gouvernement encouragera une meilleure mobilisation de l’épargne des Français pour soutenir cette dynamique, par exemple à travers un nouveau livret d’épargne dédié à l’industrie. ».
Renforcer l'emploi : « Nous n’avons pas encore atteint le plein emploi. Le RSA ne doit pas être uniquement un filet de sécurité. Nous devons en faire un tremplin vers l’insertion, un nouveau contrat social fait du droit d’être aidé et du devoir de chercher, vraiment, un travail. Cela passe notamment, mais pas seulement, par l’action de France Travail, qui accompagnera désormais progressivement, en lien avec les départements et l’ensemble des acteurs de l’emploi, tous les allocataires du RSA et toutes les entreprises qui ont besoin de recruter. Là où la réforme du RSA a été engagée, ça marche, comme à Marseille où, après six mois d’accompagnement, une personne sur trois est sortie du RSA. Enfin, nous avons de nombreux dispositifs d’insertion par l’activité économique, auxquels je suis attentif, notamment le travail adapté pour les personnes en situation de handicap, ou des expérimentations que je connais assez bien comme Territoires zéro chômeur de longue durée, qui donnent des résultats et doivent être encouragés. ».
Augmenter le SMIC et autres rémunérations des salariés : « Encore faut-il que le travail paie. Nous revaloriserons le SMIC de 2% dès le 1er novembre 2024, anticipant ainsi l’augmentation prévue le 1er janvier 2025. (…) Nous relancerons la participation, l’intéressement et l’actionnariat salarié, et cela pas seulement dans les grandes entreprises. ».
Assouplir les contraintes qui affectent le logement : « Nous devons faire évoluer de manière pragmatique et différenciée la réglementation zéro artificialisation nette pour répondre aux besoins essentiels de l’industrie et du logement. Dans un contexte de crise du secteur de la construction, des mesures rapides sont nécessaires pour relancer l’investissement locatif et l’accession à la propriété, notamment chez les primo-accédants, pour lesquels le gouvernement est favorable à l’extension du prêt à taux zéro, sur tout le territoire. En outre, nous devons simplifier au maximum les normes qui pèsent sur la construction des logements neufs ou la réhabilitation des logements anciens. Quant au logement social, il ne devrait être qu’une étape. Les bailleurs doivent pouvoir réexaminer régulièrement la situation de leurs locataires afin d’adapter les loyers à leurs ressources. C’est aussi une mesure de justice sociale. Pour faciliter l’accession sociale à la propriété, il y a, j’en suis sûr, des mesures innovantes à trouver avec les offices HLM ; nous y sommes prêts. Il faut également donner plus de pouvoir aux maires dans l’attribution et la priorisation des logements sociaux sur leur territoire. Faisons-leur confiance pour permettre une vraie mobilité dans le parc social. ».
2. Accès aux services publics de qualité
Un constat : « Les Français sont attachés à leurs services publics dans tous les territoires. Je comprends leur colère et leur désarroi, que vous connaissez vous aussi, quand il faut attendre de longues semaines pour obtenir une pièce d’identité ou quand des professeurs absents ne sont pas remplacés. ». Michel Barnier a évoqué notamment l'école (qui sera sa priorité, comme pour tout gouvernement), l'hôpital, et il a insisté sur la santé mentale.
3. Sécurité au quotidien
Michel Barnier a annoncé la création de nouvelles brigades de gendarmerie : « Tous les Français ont besoin d’être rassurés par la présence de nos forces, qui seront encore plus visibles et présentes sur la voie publique, ainsi que dans les villes et les villages de France. ». Rendre plus rapide l'application des peines : « Les Français s’attendent à des sanctions rapides, quand elles sont justifiées. Nous devons nous attaquer de manière volontariste à la réduction des délais de jugement, en particulier pour les mineurs. Nous reprendrons la discussion sur la création d’une procédure de comparution immédiate pour les mineurs délinquants de plus de 16 ans déjà connus de la justice et poursuivis pour des actes graves d’atteinte à l’intégrité physique des personnes. Nous poursuivrons la réflexion sur les atténuations de l’excuse de minorité. Il faut stopper la montée continue de la violence des mineurs, qui rend impossible la vie dans de nombreux quartiers. Enfin, les Français demandent que les peines soient réellement exécutées. Il est nécessaire que les jugements soient respectés et que les peines soient exécutées sans être transformées, au risque, si ce n’est pas le cas, de faire perdre toute crédibilité à la réponse pénale. C’est pourquoi nous proposons des peines de prison courtes et immédiatement exécutées pour certains délits. Il nous faut également réviser les conditions d’octroi du sursis et limiter les possibilités de réduction ou d’aménagement de peine. ».
Il faut construire de nouvelles prisons : « Pour réaffirmer le rôle dissuasif de la sanction, nous devons construire des places de prison. La France compte actuellement 80 000 détenus pour environ 62 000 places. Ce nombre est très insuffisant. J’ajoute, parce que ce sujet m’intéresse, qu’il nuit à la dignité des conditions de détention. Il est donc urgent de construire de nouvelles places de prison, effort qu’ont déjà engagé les gouvernements précédents. Devant l’ampleur du chantier, il faut aussi diversifier les solutions d’enfermement ou de surveillance effective en fonction du profil de la personne détenue et de la peine prononcée, notamment pour les mineurs délinquants. À ce titre, je suis favorable à la création de nouveaux établissements pour les courtes peines. ».
État de droit (en réponse à Bruno Retailleau) : « D’une manière générale, la fermeté de la politique pénale demandée par les Français est indissociable du respect de l’État de droit et des principes d’indépendance et d’impartialité de la justice, auxquels je suis profondément et définitivement attaché. ».
4. Maîtrise de l'immigration
Chantier dont il ne pouvait pas se passer face aux demandes populaires et parlementaires. Mais avec un réel flou car le Premier Ministre veut à la fois plus de fermeté et plus d'humanité : « Il est urgent de sortir l’immigration de l’impasse idéologique où l’ont mise les uns et les autres. Un jour, dans un moment d’utopie, j’ai même imaginé qu’on pouvait en faire un sujet d’intelligence nationale. Ce sujet, qui ne laisse personne indifférent, doit être traité avec dignité et gravité, au lieu d’être instrumentalisé dans des controverses inutiles. Nous devons regarder la question de l’immigration avec lucidité et l’affronter avec pragmatisme. (…) C’est en appliquant ces mesures strictes de maîtrise de l’immigration que nous serons mieux en mesure d’atteindre notre objectif : intégrer dignement celles et ceux que nous choisissons d’accueillir, en leur ouvrant plus rapidement l’accès à un titre de séjour, à l’apprentissage du français, à un logement et à un emploi. ».
5. « Notre pays a besoin de plus de fraternité. »
La leçon des Jeux olympiques et paralympiques : « La formidable réussite des Jeux olympiques et paralympiques de Paris a encouragé la pratique sportive, qui est une des clés pour soutenir le moral individuel et collectif des Français, l’apprentissage des règles du jeu, l’acceptation de l’autre ainsi que pour améliorer la santé de nos concitoyens. Au-delà des belles cérémonies et des médailles françaises, la plus grande réussite de ces Jeux a été aussi de changer notre regard sur le handicap. Tous ces athlètes paralympiques nous ont rendus fiers. L’une des priorités du gouvernement sera de maintenir cet élan pour résoudre les inégalités qui demeurent, pour renforcer la scolarisation, l’accessibilité des transports et de l’espace public, et combattre les discriminations à l’embauche. La fraternité, c’est renouer avec une politique familiale, soutenir toutes les familles, en particulier les familles monoparentales, combattre aux côtés de tant d’associations, avec la plus grande énergie, la pauvreté qui progresse à nouveau dans nos villes et dans nos campagnes. La fraternité, c’est encourager le bénévolat et la vie associative qui font reculer l’isolement et la solitude, et apportent tant de générosité à notre pays. (…) La fraternité, c’est aussi développer une politique culturelle accessible à tous, notamment aux jeunes, dans tout le territoire : l’accès à la culture est à la fois un facteur essentiel d’ouverture personnelle, une condition pour faire progresser l’égalité des chances et l’un des ciments de notre lien social. (…) La fraternité, c’est aussi tisser davantage de liens entre les générations. La cohabitation intergénérationnelle, qui aide beaucoup de jeunes à se loger tout en aidant les plus âgés à vivre chez eux le plus longtemps possible, doit être développée. ».
Je n'ai pas tout évoquer, notamment les sujets de politique étrangère et aussi les urgences en outre-mer (notamment en Nouvelle-Calédonie), ni certains sujets politiques et sociaux importants, j'y reviendrai spécifiquement le cas échéant.
Le mot de la fin de Michel Barnier était le suivant : « Devant l’urgence de la situation, et pour l’avenir, recherchons des chemins communs, dégageons des compromis, relevons la ligne d’horizon. Un dernier mot : prenons soin de la République, elle est fragile. Prenons soin de l’Europe : elle est nécessaire. Prenons soin ensemble de la France et des Français : ils nous demandent, je l’entends tous les jours sur le terrain, de dépasser nos divisions, nos querelles, d’agir dans l’intérêt supérieur du pays. Les Français méritent notre engagement. ».
À la suite de cette déclaration de politique générale qui était de bonne tenue, au contraire des hurlements de certains députés (à gauche), l'ensemble des groupes politiques se sont exprimés par la voix de leur président. Aucun vote n'a été prévu puisque le gouvernement n'a pas demandé la confiance à l'Assemblée, mais une motion de censure sera prochainement examinée.
Dans ses réponses aux groupes politiques, je retiens, s'il n'en faut retenir qu'une, son dialogue avec Mathilde Panot, avec un petit chuintement grand-bourgeois qui n'est pas sans rappeler Valéry Giscard d'Estaing : « J’ai du mal à comprendre votre ton et votre agressivité. J’ai du mal à comprendre la manière dont vous attaquez personnellement et de manière systématique le chef de l’État. Je vais vous dire une chose, madame la présidente : plus vous serez agressive, plus je serai respectueux. ».
Michel Barnier restera toujours sur la ligne de crête. En prônant l'écoute permanente de tous les groupes politiques, il se montre humble mais aussi indécis, laissant les groupes lui apporter les idées. Il faut dire qu'il marche sur des œufs. Mais il faudra bien trancher, et donc, faire des mécontents. Le premier exercice, celui de la déclaration de politique générale, a été accompli de manière satisfaisante. Le deuxième sera autrement plus délicat : le mercredi 9 octobre 2024, il présentera le projet de loi de finances pour 2025. Ce sera le premier PLF (projet de loi de finances) qui aura été préparé en si peu de temps (il a été nommé à Matignon le 5 septembre 2024). Ce texte aura de quoi énerver tous les groupes politiques à la fois !
Son expérience et sa prudence sont ses deux atouts, ceux qui ont fait du négociateur en chef du Brexit pour l'Union Européenne un redoutable interlocuteur des Britanniques. Pour l'instant, son gouvernement a la vie sauve. Prochaine séance à l'Assemblée : ce mercredi 2 octobre 2024 pour la première séance des questions au gouvernement (qui promet d'être ardue) et l'examen de la stupide motion de destitution du Président de la République soutenue par les insoumis et acceptée par les socialistes. Haut les cœurs !
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (01er octobre 2024)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Législatives 2024 (51) : la quadrature du cercle de Michel Barnier.
Déclaration de politique générale du Premier Ministre Michel Barnier le 1er octobre 2024 au Palais-Bourbon (vidéo et texte intégral).
Législatives 2024 (50) : les premiers pas du gouvernement Barnier.
Composition du Gouvernement Michel Barnier I nommé le 21 septembre 2024.
Législatives 2024 (49) : les socialistes crient au secours la droite revient !
Législatives 2024 (48) : les adieux de Bruno Le Maire à Bercy.
Législatives 2024 (47) : le dur accouchement du gouvernement Barnier.
Législatives 2024 (46) : les socialistes entraînés dans la destitution...
Gérard Larcher, protecteur des institutions.
"À vendre" Lucie Castets 9 000 €/mois !
Législatives 2024 (45) : Michel Barnier, le choix de l'apaisement.
Législatives 2024 (44) : l'introuvable Premier Ministre.
Édouard Philippe massivement candidat.
Législatives 2024 (43) : Haro sur le Beaudet !
Législatives 2024 (42) : Bernard Cazeneuve et le retour à la case départ ?
Législatives 2024 (41) : intérêt national et mode de scrutin.
Législatives 2024 (40) : Patrick Cohen a raison !
Législatives 2024 (39) : Consultations et mains tendues !
Législatives 2024 (38) : la coconstruction du Premier Ministre.
Législatives 2024 (37) : stupide chantage à la destitution !
Législatives 2024 (36) : Gérald Darmanin plaide pour un Premier Ministre non macroniste !
François Hollande sera-t-il le Premier Ministre de son ancien Ministre de l'Économie ?
Législatives 2024 (35) : Vers une cohabitation du troisième type ?
Législatives 2024 (34) : Lucie Castets noyée dans une réalité alternative !
Législatives 2024 (33) : Le grain de sel du Sénat !
Législatives 2024 (32) : Le casse-tête de Lucie Castets.
Législatives 2024 (31) : Emmanuel Macron et les joyeux JO.
Interview du Président Emmanuel Macron le 23 juillet 2024 sur France 2 (vidéo intégrale).
Claude Malhuret au Sénat : le spectacle continue !
Législatives 2024 (30) : coalition ou pacte ?
Législatives 2024 (29) : le staff de l'Assemblée Nationale.
Législatives 2024 (28) : la stratégie du chaos institutionnel de Jean-Luc Mélenchon.
Législatives 2024 (27) : l'émotion de Yaël Braun-Pivet.
Législatives 2024 (26) : les larmes de Marine Tondelier.
Législatives 2024 (25) : faut-il ostraciser le RN à l'Assemblée Nationale ?
Législatives 2024 (24) : Huguette Bello, mélenchonette en peau de lapin.
Législatives 2024 (23) : grand pays recherche son gouvernement.
Législatives 2024 (22) : qui au perchoir ?
Législatives 2024 (21) : marche sur Matignon ?
Lettre aux Français par Emmanuel Macron le 10 juillet 2024 (texte intégral).
Législatives 2024 (20) : le poison du scrutin proportionnel.
Législatives 2024 (19) : quel possible Premier Ministre pour une impossible majorité ?
Législatives 2024 (18) : la fin du cauchemar Bardella (pour le moment).
Résultats du second tour des élections législatives du 7 juillet 2024.
Fake news : la scandaleuse manipulation politique du RN.
Législatives 2024 (17) : rien n'est joué dimanche prochain !
Législatives 2024 (16) : la question de dimanche prochain.
Législatives 2024 (15) : les promesses n'engagent que ceux qui y croient !
Législatives 2024 (14) : la revanche des gilets jaunes ?
Législatives 2024 (13) : fortes mobilisations au premier tour.
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Appel aux sociaux-démocrates.
Éric Le Boucher : la France va plutôt bien (27 juin 2024).
Législatives 2024 (12) : un isoloir, ce n'est pas un cabine d'essayage !
Législatives 2024 (11) : front, rassemblement, union nationale, barrage, consignes de vote...
Législatives 2024 (10) : il était une fois Jordan Bardella, Gabriel Attal et Manuel Bompard.
Législatives 2024 (9) : Emmanuel Macron et son n'ayez-pas-peur !
Interview d'Emmanuel Macron à Génération Do It Yourself le 24 juin 2024 (podcast intégral).
Lettre aux Français d'Emmanuel Macron le 23 juin 2024 (texte intégral).
Législatives 2024 (8) : la bataille de Matignon.
Le programme aux élections législatives du 30 juin 2024 d'Ensemble pour la République (document à télécharger).
Législatives 2024 (7) : Ensemble pour la République.
Législatives 2024 (6) : Nicolas Sarkozy et François Fillon bougent encore !
Législatives 2024 (5) : le trouble de Lionel Jospin.
Législatives 2024 (4) : l'angoisse de Manuel Valls.
Législatives 2024 (3) : François Hollande dans l'irresponsabilité totale !
Législatives 2024 (2) : clarification ou chaos ?
Législatives 2024 (1) : vaudeville chez Les Républicains.
Sidération institutionnelle.
Élections européennes 2024 (4) : la surprise du chef !
Résultats des élections européennes du dimanche 9 juin 2024.
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