Les écolos sont-ils solubles dans Nicolas Hulot ?
La semaine dernière, trois députés verts européens ont invité leur candidate Dominique Voynet à céder sa place à Nicolas Hulot. Dans le même temps Corinne Lepage, dans un Rebond paru dans le journal Libération, a expliqué qu’elle ne voyait pas comment Nicolas Hulot pourrait représenter les écologistes.
Les chiffres laissent penser que Nicolas Hulot est en effet le mieux placé pour porter la parole écologiste, avec plus de 10% d’intentions de vote (alors qu’il ne s’est pas encore prononcé sur sa candidature), face aux 2% de Dominique Voynet et 1% de Corinne Lepage, même si rien n’est joué, même si les sondages peuvent se tromper. Mais une logique de rapprochement n’est-elle qu’arithmétique ? Il faut aussi confronter les programmes, afin de voir les divergences et les points communs. Car finalement, si tout le monde est d’accord, on parle bien d’un combat d’ego et de personnes, mais l’écologie est-elle monolithique ?
Il ne s’agit pas bien sûr de les comparer sur des sujets de société (quoique cela puisse être intéressant) comme la loi Dadvsi sur laquelle Nicolas Hulot n’a pris aucune position, tandis les Verts sont contre et Corinne Lepage aussi. Il en va de même pour une VIe République, silence de Nicolas Hulot sur ce sujet, tandis que les Verts la réclament et que Cap21, le parti de Corinne Lepage, aussi. Il y aurait de nombreux autres sujets à explorer, mais si Cap21 et les Verts se sont déjà prononcés sur ces questions (parfois à l’identique, comme on peut le voir), ce n’est pas le cas de Nicolas Hulot qui évite en fait tout sujet autre qu’écologique.
Retenons arbitrairement, quatre sujets centraux dans le débat autour de l’écologie. Le nucléaire, les OGM, le réchauffement et la fiscalité écologique.
Concernant le nucléaire tout d’abord
- Nicolas Hulot est souvent chahuté sur cette question. En effet ce dernier n’en parle même pas dans la proposition “énergie” de son Pacte écologique . D’ailleurs, dernièrement, le réseau Sortir du nucléaire a interpellé Nicolas Hulot sur cette question.
- Les Verts souhaitent sortir du nucléaire d’ici 2030.
- Corinne Lepage le dit elle-même, elle est plus nuancée que les Verts sur cette question, et n’est pas pour une sortie immédiate du nucléaire.
Sur cette question, Les Verts et Corinne Lepage semblent plus ou moins se retrouver.
Concernant les OGM
- Nicolas Hulot, dans ses propositions, inclut la question non pas dans l’agriculture, mais dans la partie santé, parmi d’autres questions qu’il aborde sous l’angle de la prévention.
- Les Verts se sont souvent illustrés sur cette question des OGM, par la voix notamment de leur ancien candidat à la présidentielle, Noël Mamère, qui passe en procès pour fauchage d’OGM. Dans leur programme, ils annoncent que la France deviendra une région européenne sans OGM.
- Corinne Lepage se prononce, elle, sur un moratoire sur les mises en culture et l’obligation de procéder à des études sur l’impact sanitaire, qui sont aujourd’hui très rares et couvertes par le secret industriel.
Sur ce sujet, Nicolas Hulot et Corinne Lepage semblent assez proches.
Concernant le réchauffement
- Nicolas Hulot se prononce pour une réduction massive du recours au pétrole, au gaz et au charbon afin de diviser par quatre nos émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050.
- Les Verts sont aussi pour une division par quatre de nos émissions de gaz à effet de serre, mais d’ici à 2030.
- Pour Corinne Lepage, une réduction s’impose aussi, toujours une division par quatre, mais en quarante ans.
Si les trois candidats semblent d’accord sur la nécessité de diviser les effets de serre par quatre (cela laisse supposer que c’est une diminution nécessaire, rappelons pour mémoire que le Protocole de Kyoto parle de 5%), ils ne proposent pas le même timing.
Concernant une fiscalité environnementale
- Nicolas Hulot souhaite instaurer une "taxe carbone" et supprimer les subventions publiques aux entreprises polluantes.
- Les Verts ont de nombreuses propositions sur cette question de la fiscalité, mais seule une est directement reliée à l’environnement : une part de la taxe professionnelle serait adossée à l’empreinte écologique des entreprises. Leurs investissements en énergies renouvelables ou en économies d’énergies bénéficieraient d’exonérations dans le calcul de l’impôt sur les sociétés.
- Corinne Lepage a aussi de nombreuses propositions sur ce sujet : mettre en place une fiscalité favorisant l’émergence des écotechnologies et arrêter toutes les aides publiques aux activités destructrices de l’environnement. Elle veut de plus créer un livret d’épargne CO2, favorisant les bonnes pratiques environnementales et finançant les investissement des particuliers.
De façon peut-être surprenante, sur cette dernière question, les trois candidats ont des vues assez similaires.
Cependant, comme on peut le voir, il existe tout de même de nombreuses différences entre toutes ces composantes du mouvement écologiste, même si d’après l’ex-secrétaire national des Verts, Yann Wehrling, les propositions de Nicolas Hulot sont celles des Verts depuis vingt ans, même s’il est difficile de se faire une idée de Nicolas Hulot, ce dernier n’ayant pas vraiment développé son programme. Mais plus que des différences de programme, il existe des différences de stratégie politique à long terme. Nicolas Hulot se place uniquement dans le cadre de l’élection présidentielle. Cap 21 essaie plus ou moins de survivre, et les Verts sont dans une stratégie d’existence face au PS. Le choix de Dominique Voynet est clair : obtenir un score suffisamment important pour pouvoir être en position de force, relative il est vrai, pour discuter avec le PS des législatives à venir en échange d’un report de ses voix au second tour de la présidentielle.
Comme la candidature antilibérale, une candidature écologiste unique n’est pas pour demain, trop de choses les séparent. En revanche, ce qui est sûr (je sais, on n’est jamais sûr de rien), c’est qu’en cas de candidature de Nicolas Hulot, les Verts et Cap21 vont avoir beaucoup de mal à se faire entendre, notamment à rendre intelligibles leurs différences. Ce cas de figure permettrait-il un développement durable de l’écologie, pas sûr...
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