Macron a bon espoir…
Air France, Good Year, Pentair : Les conflits sociaux ont un petit air de Germinal. Ils sont de plus en plus violents, et on a la nette impression d’un deux-poids – deux-mesures.
Récemment, 8 militants CGT ont été condamnés à 24 mois de prison, dont 9 mois ferme, pour avoir séquestré deux cadres de l’usine Good Year d’Amiens-Nord. Apparemment, il n’y a pas eu de violences, et cette séquestration intervient après sept années de lutte pour la défense de l’emploi dans cette usine. Il n’y a pas que la CGT pour trouver que cette condamnation a quelque chose de disproportionné.
Deuxième conflit social : L’usine Pentair de Ham, dans la Somme, va fermer et supprimer du même coup 133 emplois. Cette décision est, j’allais dire incompréhensible, mais elle n’est que trop compréhensible : les patrons américains ont décidé de délocaliser en Italie, en Chine et, plus surprenant, en Suisse.
« Inacceptable », vraiment ?
Ce qui est révélateur, c’est l’attitude du gouvernement dans cette affaire. Le ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, a jugé, le 12 janvier, que la décision de fermeture de l’usine Pentair était « inacceptable ». En effet, il est avéré que cette usine a annoncé 5 millions d’euros de bénéfices pour 2015, prospérité confirmée par les services du gouvernement.
Cette fermeture est « inacceptable ». Cependant, des contacts ont été pris avec la direction américaine « pour demander des explications sur ces restructurations. » « Nous avons bon espoir (...) de conduire le groupe à revisiter ses choix […] et à revenir sur sa décision » –je cite M. Macron.
Si cette décision est « inacceptable », même par le très libéral Emmanuel Macron, on se demande pourquoi les dirigeants sont invités à s’expliquer, et on se demande pourquoi on va se contenter d’« avoir bon espoir » qu’ils reviennent sur leur décision. Leur attitude, c’est du gangstérisme patronal. Quand des ouvriers se laissent aller à des actions musclées pour défendre leur survie et celle de leur famille, la justice répond par de la prison ferme. Quand des industriels sont prêts à sacrifier toute une localité pour faire davantage d’argent ailleurs, quand ils jettent des travailleurs qui non seulement ne leur coûtent rien, mais qui sont les agents de leur prospérité, on se contente de discuter et d’« avoir bon espoir ».
L’Europe « sociale » ?
Dans quel monde vivons-nous ? À quoi sert-il d’avoir un Ministère de l’Économie ? À quoi sert-il d’avoir une Ministre du Travail ? Pourquoi la France, qui se targue si souvent d’être le phare du monde, n’a-t-elle pas le courage de prendre, même seule au départ, l’initiative d’interdire tout licenciement en période de bénéfice, ce qui serait une simple mesure de bon sens ?
Parce que les industriels ne voudront plus investir en France ? Mais alors, pourquoi l’Europe ne serait-elle pas incitée par la France à voter ce type d’interdiction en bloc sur tout le territoire européen ? Et puis, si on fait le compte des délocalisations, si on recense tous les groupes qui ont empoché les aides de l’État français avant de licencier malgré leurs engagements, qu’avons-nous à perdre ? Qu’ils aillent licencier ailleurs ! En changeant de tactique, nous aurons peut-être à gagner de travailler avec des entreprises honnêtes (en espérant qu’il en reste). On ne gagne rien à entretenir l’injustice. À force de concessions permanentes aux dirigeants de grandes entreprises, on arrive à quoi ? Au chômage qui ne cesse de grimper.
62 / 3 500 000 000
Pendant ce temps, les 62 personnes les plus riches du monde possèdent davantage que la moitié de la population mondiale. 62 individus possèdent autant que 3 milliards 500 millions d’êtres humains. Alors, de quoi M. Macron a-t-il bon espoir ?…
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