Martine Aubry peut-elle perdre les primaires ?
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Le Parti Socialiste n’a toujours pas établi de calendrier officiel, mais les primaires en vue de la désignation du candidat à l’élection présidentielle devraient avoir lieu à l’automne 2011, et le dépôt des candidatures s’achever en juin. Reste à connaître l’identité du vainqueur. Et encore... Derrière un suspens de façade fabriqué de toute pièce par les médias, la désignation de Martine Aubry est aujourd’hui un secret de polichinelle. En effet, la première secrétaire socialiste dispose actuellement de toutes les cartes en main pour prendre part aux prochaines échéances présidentielles, à la condition qu’elle en ait l’envie, ce dont personne ne doute.
Cependant, le choix de Martine Aubry, qui semble se dessiner jour après jour, n’est pas comparable à l’effervescence populaire unanime qui avait accompagnée Ségolène Royal en 2006. La dame des 35 Heures sera plus un choix par défaut, car, nous le verrons plus bas, aucun candidat ne peut rivaliser avec elle et elle bénéficiera du désir des militants d’enterrer la guerre des clans. Mais elle reste donc un choix par défaut, n’oublions pas qu’elle incarne le "vieux parti", celui des accords en coulisses, des tripatouillages avec les barons locaux, les magouilles qu’il lui aurait permis de succéder à François Hollande. (voir Holds-up, arnaques et trahisons)
Les enquêtes d’opinions la donnent d’ailleurs au coude à coude avec Dominique Strauss-Kahn. Récemment, la Sofres le créditait de 59% des suffrages exprimés au second tour des élections présidentielles contre Nicolas Sarkozy, tandis que Martine Aubry réunirait moins de 53%.
DSK : une popularité de façade ?
Néanmoins, les sondages qui désignent Dominique Strauss-Kahn comme candidat favori des sympathisants socialistes ne doivent pas être pris au sérieux : DSK est aimé loin de la France et les sondés qui le citent ne portent leur choix sur lui que parce qu’il est considéré comme le seul à même de battre Nicolas Sarkozy. Il n’est pas véritablement apprécié et bénéficie largement du mutisme que lui impose son rôle au FMI. Cette planche de Vidberg résume parfaitement la situation.
Mais petit à petit, bénéficiant de son statut de première secrétaire socialiste et de sa victoire aux régionales, Martine Aubry se forge une stature de chef d’état. DSK perd dès lors un peu de son aura d’homme providentiel. Le président du FMI doit en plus faire face à un casse-tête : son mandat s’achève en automne 2012, il devra donc démissionner si il souhaite conquérir l’Elysée et cela très rapidement : il ne peut pas arriver au dernier moment, à quelques semaines des primaires. Or, après plusieurs années passées sans interventions médiatiques, un retour au pays paraîtrait forcément brusque...trop brusque.
Les lourds handicaps de Manuel Valls
Les autres candidats ne sont guère plus susceptibles de battre Martine Aubry que Dominique Strauss-Kahn. Manuel Valls tout d’abord, s’est lancé très tôt dans la campagne, il avait déclaré au JDD en juin 2009 qu’il serait candidat à des primaires pour représenter les socialistes et la gauche à la présidentielle. Mais le député maire d’Evry ne bénéficie que d’une faible couverture médiatique, ce qui le rend méconnu des français. En juin 2010, un sondage CSA ne le créditait que d’un petit pourcent en vue des primaires au près des sympathisants socialistes, et de 4% au près des français.
Le député maire d’Evry ne doute néanmoins pas de ses chances et invoque l’exemple de Barack Obama, autre quadra ayant bousculé les pronostics grâce à un discours novateur. Reste qu’Obama avait amplement bénéficié de l’élection état par état, qui permet de crédibiliser certaines candidatures. A défaut de primaires locales, Valls ne devrait pas avoir la possibilité de jouer un rôle dans ces primaires, mais à 48 ans, cet espagnol de naissance a encore tout le temps devant lui...
Ségolène Royal porte les stigmates de la guerre des clans
Ségolène Royal, candidate socialiste en 2007, première femme à atteindre le second tour d’une échéance présidentielle s’impose naturellement comme une potentielle candidate après avoir tergiversé sur sa candidature : Je préfère faire le sacrifice d’une ambition personnelle et voir gagner la gauche que le contraire avait-t-elle déclaré en mai sur FR5. Pourtant, depuis quelques temps, les médias ne cessent de relayer son "envie de faire campagne". Et l’ambition faisant parti du code génétique de l’homme politique, on voie mal Madame Royal se coucher devant Martine Aubry.
Mais la présidente du conseil régional de Poitou-Charentes n’a pas les armes pour rééditer sa performance de 2006. En premier lieu, et c’est ce qui lui a manqué pour battre Sarkozy, elle n’a pas l’image d’une femme d’état, elle parait quelque peu dépassée, pas assez rigide peut-être, trop différente du moule. Le travail de dé-légitimation mené par Fabius et DSK puis Sarkozy reste présent dans les mémoires. Et les français sont prêts à élire une femme à la condition qu’elle ressemble à un homme. Ils veulent une mère autoritaire, pas une épouse joyeuse et bien habillée. Les belles tenues et le sourire de Madame Royal lui barrent toute suite la route.
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