Municipales : la grande tromperie
Quel est le véritable enjeu des municipales ? Est-ce un enjeu politique ? Avoir des élus compétents ? Des projets qui tiennent la route ? Enfourcher des thématiques qui répondent à l’air du temps ? Ou bien un cache misères ?
La politique dans tout cela…
On serait tenté de dire que l’enjeu des municipales n’est pas politique compte tenu du nombre de listes « sans étiquette » qui fleurissent un peu partout. Même le Premier Ministre candidat au Havre se présente sur une liste sans étiquette : Alors, M. Philippe, pas convaincu par la politique que vous menez à Matignon pour que vous éprouviez le besoin de vous cacher derrière un apolitisme de façade ?
C’est vrai qu’après deux ans de politiques régressives et répressives, le « label » LREM n’a plus tellement la cote, sauf dans les grandes villes (sauf Le Havre…), comme si le résultat des élections ne devait s’apprécier que pour un peu moins de la moitié du corps électoral. On retrouve donc là les petites magouilles de la circulaire Castaner sur le nuançage politique des listes, épinglé par le Conseil d’Etat.
Alors sorti des grandes villes, lorsqu’on s’intéresse aux autres communes, en particulier les périurbaines, là où il n’était pas rare de voir des étiquettes de gauche ou de droite clairement formulées, on se trouve désormais avec des listes faux-cul de « rassemblement » avec des titres portant fréquemment le terme « Ensemble » et dans lesquelles en grattant un peu ou trouvera des traces de LREM comme dans ma commune où la liste sortante PS contient une assistante parlementaire de la Députée LREM de la circonscription…
C’est un peu comme les lasagnes de cheval vendues sous l’étiquette « bœuf véritable ».
On devrait faire appel à la DGCCRF qui vérifie la loyauté de l'information fournie au consommateur, contrôle la bonne application des règles d'étiquetage, de composition et de dénomination des produits de toute nature et de lutte contre les falsifications et tromperies.
Tout ce flou servira à compter les bouses à la fin du marché, c’est-à-dire le nombre d’élus LREM qui sortiront de l’ombre, comme par magie, pour faire un résultat présentable.
C’est quoi des élus compétents ?
C’est d’abord celui qui ne prend pas les électeurs pour des cons en jouant les coucous, en revendiquant une appartenance politique après le scrutin.
C’est celui qui se présentera avec son programme pour la commune en n’oubliant pas de dire que les compétences et les finances communales ayant fondu comme peau de chagrin, la marge de manœuvre sera étroite, notamment en terme d’urbanisation si la compétence du PLU est passée à l’intercommunalité.
Sans les compétences essentielles comme l’urbanisme et avec des dotations de l’Etat en baisse drastique, sans compter la fin programmée de la taxe d’habitation, il va falloir sérieusement se pencher sur ce qui reste pour le Maire et les élus communaux. Au choix, la fête de la musique, le fleurissement du rond-point construit pat l’interco, le repas de fin d’année à la maison de retraite ou bien encore le banquet des chasseurs qui seront bientôt les seules compétences restantes aux communes. J’exagère à peine.
Ajoutons à cela « l’amicale » pression du BTP qui met en garde les communes sur le niveau d’investissement nécessaire à la bonne santé de leurs entreprises (et actionnaires) ou bien encore les exigences des FDSEA sur la limitation de l’artificialisation des sols (même plombés aux pesticides) ou la consommation des produits locaux (même plombés aux pesticides, également) dans les cantines et vous comprendrez que la marge de manœuvre d’un élu, même pétri de bonne volonté écologique ou de bonne gestion du budget communal, se trouve réduite à sa plus simple expression.
La tentation des « politiques nouvelles »
Vidée des compétences qui faisaient leur légitimité (on peut citer également l’eau, l’assainissement ou le ramassage des ordures ménagères), les communes doivent donc se réinventer pour garder leur existence et celle des élus qui les dirigent.
A l’occasion de cette campagne on voit donc se développer de nouvelles thématiques, comme l’écologie et le développement durable ou bien encore la sécurité.
Bon, les promesses faites en matière d’écologie relèvent de la cosmétique comme celle du gouvernement qui fait de la suppression des couverts en plastiques et des pailles, l’alpha et l’oméga de sa politique. C’est donc cette politique qui sera déclinée localement avec la diminution des déchets des cantines scolaires et l’aménagement des bacs de compostage. Vous ne trouverez certainement pas de mesures qui fâchent l’agriculture. La FNSEA veille !
Rien sur les pesticides ou les zones d’épandage, rien sur les rejets dans les rivières qui finissent en marée vertes sur les plages bretonnes, pas plus que des remarques sur la pollution lumineuse nocturne provoquée par l’éclairage des serres où l’on produit des tomates à marche forcée. Evitons les sujets qui fâchent…
Quant à la sécurité, il s’agit tout simplement de faire avaler aux électeurs que la situation de leur commune nécessite l’embauche de policiers municipaux, armés, si possible, pour traquer les voleurs de poules en oubliant de dire que c’est le désengagement de l’Etat en ce domaine qui oblige les communes à se substituer à lui.
L’écran de fumée qui cache l’essentiel
Toutes les réformes de ces dernières décennies ont vidé de leur contenu les communes, et pourtant la demande de proximité de la part des citoyens est toujours là. Ils plébiscitent leurs Maires sans percevoir l’affaiblissement du périmètre de ses responsabilités et de ses compétences.
Du Maire, on retiendra aujourd’hui l’image de celui qui se démène lorsqu’il y a une catastrophe sur sa commune (incendie, inondation, tremblement de terre,…) et qui se plaint de la faiblesse de la réponse de l’Etat ou de la mauvaise volonté des assureurs à indemniser.
C’est aussi l’image du Maire qui se fait agresser et qui perd parfois la vie en voulant mettre fin à des incivilités.
C’est parfois aussi celle de l’élu aux dents qui rayent le parquet et qui est prêt à tout pour obtenir une investiture pour un mandat départemental, Régional, voire National et pour lequel une Mairie n’est qu’un marchepied.
Dans ces conditions, on peut se poser la question du maintien du nombre de conseillers municipaux actuels, sauf s’il s’agit de maintenir un vivier politique local qui fera émerger de jeunes pousses pour les partis politiques ou qui serviront à légitimer les élections sénatoriales par les grands électeurs.
La gestion communale ne serait donc plus la priorité et serait réduite à sa plus simple expression.
Et Macron dans tout ça ?
Il s’auto congratule devant le spectacle qu’il a offert lors du grand débat, entouré de maires flattés d’être réunis par le Président de la République, mais qui n’ont rien obtenu de concret, hormis les belles paroles. Ce qui intéresse Macron en maintenant des élus locaux, c’est le leur faire porter le chapeau des politiques de restrictions budgétaires qu’il veut mettre en œuvre en leur demandant de faire le sale boulot (compétences sociales des départements ou fermeture des lignes ferroviaires non rentables par les Régions, par exemple) et en leur demandant par-dessus le marché de supprimer 70 000 postes de fonctionnaires territoriaux.
On remarquera à cette occasion le cynisme gouvernemental puisque cette diminution de postes se traduira par une baisse de cotisations sociales et que celle-ci provoquera un déficit du régime des retraites nécessitant des mesures d’équilibre (âge pivot, allongement de la durée des cotisations,…). Chapeau les artistes !
Tout le tissu local est en train de disparaître silencieusement par la mise en œuvre de politiques néolibérales qui ont pour seul objet d’absorber les productions de richesses locales qui ne sont pas que matérielles.
Macron se comporte avec les élus locaux comme il le fait avec tous les autres corps intermédiaires, c’est-à-dire avec mépris et autoritarisme. Il ne supporte pas que d’autres que lui puissent décider des ressources qu’il reste à distribuer et des politiques locales qu’il faut mettre en œuvre.
Macron n’est pas un centralisateur dans l’âme, d’ailleurs on ne sait même pas s’il maîtrise le concept. Il veut simplement faire plaisir à ceux qui l’ont mis en place, c’est-à-dire les affairistes et les financiers et les adeptes de la mondialisation heureuse, qui est en train de se fracasser sur un coronavirus.
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