Ces élections municipales resteront probablement comme un des plus gros ratés démocratiques de notre pays. Après un premier tour, qui n’aurait jamais du se tenir en plein décollage de l’épidémie de coronavirus, qui a éclipsé la campagne, le second tour a été encore plus fantomatique, avec une abstention encore plus forte, malgré de vrais enjeux, ce qui en dit long sur la colère des Français.

Déroute en marche, astres morts et vaguelette verte
Ce refus de voter a un vrai sens politique. Michel Onfray souligne que les Français «
veulent du régalien, de l’étatique, du lourd et ils savent que la seule élection qui plane sur ces hauteurs est l’élection présidentielle ». On peut voir dans la désaffection de dimanche non seulement la déception à l’égard de tous les partis en place, mais aussi la conséquence des réformes des collectivités locales. Il y a 40 ans, un maire avait un rôle bien plus important. Depuis, sa responsabilité a été amoindrie par la création des agglomérations et sa désautonomisation fiscale progressive, l’Etat finançant une part grandissante des budgets municipaux avec la suppression de la taxe professionnelle, puis de la taxe d’habitation. Ces réformes déresponsabilisent les maires et créent une forme de statut hydride, entre élu responsable devant des citoyens et fonctionnaire gérant un budget venu d’en haut.
Avec si peu de Français qui ont voté, le sens des résultats ne doit pas être exagéré,
Marianne rappellant que Martine Aubry conserve son mandat avec le vote de seulement 12,4% des inscrits… Parler de vague verte est totalement ridicule. Il s’agit juste d’une vaguelette, circonscrite aux seules grandes villes,
ce qui risque d’accentuer encore cet embourgeoisement qui coupe la gauche du peuple. En outre,
les Verts n’en ont gagné que 7 sur 41, contre 15 à la droite et 16 à la gauche. Et sous les 100 000 habitants, les Verts ne pèsent pas plus lourd que le RN… Si les métropoles ont penché à gauche,
la droite y conserve environ 40% des mairies et sous les 100 000 habitants, elle emporte plus de 60% des municipalités. Il n’y a pas de vague de gauche lors de ces élections. Et si la gauche se reprend à espérer, les motifs d’espoir sont limités, d’autant plus, que, comme le rappellent
David Desgouilles et
Michel Onfray, se posera la question du candidat à la présidentielle, ce qui promet une belle empoignade.
Malgré leurs dénégations, la raclée est sévère pour LREM,
Agnès Buzyn n’étant même pas élue conseillère de Paris, la présence de marcheurs semblant avoir été le repoussoir ultime lors de ce second tour, faisant tomber les forteresses imprenables. Les alliances avec LR ont été sanctionnées, ce qui en dit long sur l’appréciation des Français sur la majorité présidentielle. Malgré tout, la question de la suprématie à droite sera complexe. Si LR domine localement,
les européennes et les sondages actuels sur la présidentielle indiquent qu’au niveau national, c’est Macron qui domine. En outre, avec un Premier ministre venu de LR, et des candidats putatifs à la présidentielle trop proches de la ligne présidentielle, Macron conserve une bonne position pour incarner ce que l’on appelle le centre-droit en France,
la voie naturelle pour le président, comme le dit Alexis Brézet dans un bon éditorial sur l’élection.