Nicolas Dupont-Aignan : un gaulliste ambigu made in USA ?
Présenté souvent comme le candidat gaulliste à l’élection, Nicolas Dupont Aignan se pose souvent dans les médias comme l’héritier naturel du général de Gaulle. Pour autant, le parcours du candidat souverainiste auto-déclaré suscite quelques interrogations. En 2001 en effet, le Président de Debout la France est devenu membre d’un club très discret à la réputation sulfureuse rassemblant de jeunes élites atlantistes, les Young Leaders de la French-American Foundation. Un passé en eaux troubles que le candidat gaulliste a tout fait pour cacher, sans jamais le renier tout à fait.
Quel est le point commun entre Najat Vallaud-Belkacem, Alain Minc, Alain Juppé, François Hollande et Nicolas Dupont Aignan ? Tous les cinq furent membre des Young Leaders, un programme de soft power très discret mené par Washington auprès des élites françaises. Dans cette liste, le nom de gaulliste semble détonner. Pour autant, sa présence n’a rien d’incongrue et celui-ci n’a jamais renié publiquement cet engagement de jeune député.
Malgré sa posture d’outsider antisystème savamment mise en scène, Nicolas Dupont Aignan est un vieux routier de la politique française dont la carrière débute dès les années 1990. Ancien membre des cabinets de François Bayrou (actuel soutien d’Emmanuel Macron) et de Michel Barnier (aujourd’hui commissaire européen), Dupont Aignan a commencé sa carrière de parlementaire dans l’opposition après la dissolution ratée de 1997.
Sur les bancs de l’Assemblée nationale, l’ancien énarque devenu député d’opposition se fait rapidement remarquer. Il ne passe pas non plus inaperçu aux yeux de la French American Foundation à New-York, une institution discrète au rôle pourtant fondamental dans les relations entre Paris et Washington. Fondée en 1976, la fondation se donne pour mission de « renforcer les liens entre la France et les Etats-Unis » en favorisant la carrière de jeunes dirigeants du monde de la finance, de la presse et de la politique « appelés à jouer un rôle important dans leur pays et dans les relations franco-américaines ». Une manière pour Washington de s’assurer de la continuité des politiques atlantistes et néo-libérales malgré les alternances électorales.
En 2001, Dupont Aignan est ainsi sélectionné parmi plusieurs jeunes chefs d’entreprises, banquiers, journalistes et politiciens pour participer à plusieurs séminaires aux Etats-Unis et à plusieurs rencontres avec des représentants de l’élite américaine. Pour autant, le Président de Debout la France n’a jamais assumé cette étape de son parcours et a toujours refusé de s’en expliquer ou de la renier publiquement. Au cours des années suivantes, il demandera même sa radiation de la liste des participants du programme sans s’expliquer sur ce point de son CV. Une manière pour celui qui se présente comme le héraut du souverainisme de cacher ce détail embarrassant de son parcours sans avoir à répondre aux questions là-dessus.
Une posture toute en ambiguïtés
Le passage de Nicolas Dupont Aignan constitue le véritable début de son ascension en politique. A la tête de son propre parti depuis 2008, Dupont Aignan se présente aujourd’hui comme l’héritier d’un gaullisme sans compromission pour rallier les électeurs de droite déçus par LR, échaudés par le FN ou tout simplement acquis aux valeurs de souveraineté et d’indépendance de la France. Son passé est tout simplement passé sous silence, mais qui expliquent peut être certaine de ses ambiguïtés.
Hostile à l’intervention de l’Etat en économie, Dupont Aignan a aussi affiché des positions très libérales au regard de sa position politique à la droite de la droite (il a par exemple multiplié les gestes de rapprochement à l’égard du MPF ou d’Alain Soral), refusant par exemple de participer aux manifestations contre le mariage pour tous en 2013.
Le gaullisme intégral est une conviction intime du Président de Debout la France, mais aussi une activité très lucrative. Cumulant ses salaires de maire, de député, de président de la communauté d’agglomération et de président de parti politique, l’ancien énarque fils d’un couple de la classe moyenne a su se constituer un patrimoine de plus de 2 millions d’euros sans avoir jamais travaillé dans le privé.
Cette ascension, Dupont Aignan la doit à son ancrage local, favorisé par l’usage très généreux de sa réserve parlementaire vis-à-vis de sa propre commune, à la limite du clientélisme. Il la doit aussi à son habileté à alterner les signaux de radicalité politique vis-à-vis de son électorat et les gages d’acceptation du système pour organiser la longévité de sa propre carrière politique.
Il la doit aussi, on l’a vu, à sa rencontre avec les « bonnes personnes » au bon moment de son parcours.
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