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Nouvelle mécanique politique à l’ère « Primaires »

Avant les primaires, les prétendants sérieux à la fonction présidentielle ne couraient pas les rues. Pour avoir le profil, il fallait : s’y être pris à plusieurs reprises, avoir donné la preuve de sa compétence, tenir le parti, faire monter le suspens et savoir se relooker un minimum pour être toujours dans le coup.

Avec les primaires, tout est plus simple. L’expérience ? Mieux vaut postuler pour la première fois à la fonction présidentielle et être conscient qu’aucune fonction ministérielle, aussi prestigieuse soit-elle, ne saurait remplacer la rage de vaincre. Le parti ? Bien sûr, il faut savoir s’affirmer mais mieux vaut éviter d’aller à contre-courant de la ligne dominante. Le suspens ? Sauf si on est le grand favori, une année de campagne est un minimum incompressible. Quant à la communication mieux vaut miser sur le fond que sur la forme pour faire entendre sa spécificité par rapport à ses camarades concurrents.

Les Primaires développeraient-elles une conception plus basique de la politique ? Non, tout simplement différente.

Inutile aujourd'hui d’avoir perdu pour espérer gagner

Fini le temps où François Mitterrand et où Jacques Chirac décidaient de se présenter malgré deux échecs antérieurs. L’expérience de la défaite n’est plus perçue comme un passage obligé. Son expérience d’ex-candidate et les « 17 millions d’électeurs et d’électrices » qui lui ont fait confiance en 2007 n’auront été d’aucune aide à Ségolène Royal. Conjuguée à la désacralisation de la fonction présidentielle, le mécanisme de la Primaire se révèle impitoyable pour les ex-perdants et favorise les outsiders. Cet effet de renouvellement s’étendra-t-il au reste du paysage politique ? En tout cas, beaucoup de candidats se présenteront pour la première fois aux présidentielles de 2012.

Rien désormais ne vaut la rage de vaincre (quoi que…)

Fini le temps où un candidat crédible se devait d’avoir fait ses classes à Matignon ou à Bercy. Non seulement 2002 a montré qu’un Premier ministre pouvait échouer dès le premier tour mais l’endurance et la motivation viennent aujourd’hui contrebalancer le poids de l’expérience. Comme aux Etats-Unis, on peut n’avoir exercé que des fonctions « secondaires » et représenter son mouvement aux Présidentielles. En 2007, Ségolène Royal ne pouvait s’appuyer que sur une expérience ministérielle limitée et une victoire (sur Jean-Pierre Raffarin en Poitou-Charentes). Aujourd’hui, on peut être favori de la Primaire socialiste et n’avoir été que ministre des Affaires sociales (comme Martine Aubry), voire ne pas avoir été ministre du tout (comme François Hollande). Mais une fois le cap de la Primaire passé, cette (relative) inexpérience ne risque-t-elle pas d’être aussi pénalisante qu’en 2007 ? La réponse à cette question décisive dépendra beaucoup du degré d’usure et du rejet de la personnalité de Nicolas Sarkozy.

Priorité à l’électorat naturel

Fini le temps où Jacques Chirac pouvait mener campagne sur un registre de gauche (celui de « la fracture sociale ») et où Lionel Jospin déclarait ne pas vouloir être le candidat d’un parti. Pour avoir des chances d’emporter une Primaire, les candidats doivent mobiliser leur électorat naturel. En tant que Première secrétaire du PS, Martine Aubry s’est naturellement inscrite dans cette logique. De son côté, François Hollande a proposé la création de 12 000 postes par an dans l’Education nationale. Après une première partie de campagne axée sur un souci de gestion équitable et responsable, ce réflexe lui a permis de rééquilibrer sa campagne à gauche. D’autres, en revanche, ont commis l’erreur de vouloir rassembler trop tôt au-delà de leur propre camp. Faute d’avoir compris la mécanique spécifique d’une Primaire, Nicolas Hulot a essuyé un vote sanction des écologistes. Même incompréhension de l’enjeu du côté de Manuel Valls qui, par ses prises de position libérales et sécuritaires, s’est condamné de lui-même à l’ultra-marginalité (sauf à imaginer que sa seule ambition se résume à devenir ministre de l’intérieur du futur président).

Battre campagne suffisamment tôt

Fini les stratégies de candidature fondées sur le suspens. Avec la Primaire, impossible d’imaginer se déclarer à peine trois mois avant le scrutin (ce que fit Lionel Jospin en 2002) : les challengers ont intérêt à démarrer tôt pour se faire connaître et apprécier des Français. François Hollande démarre son blog fin 2009, Ségolène Royal déclare sa candidature fin 2010 mais n’a jamais vraiment laissé planer d’incertitude sur son intention de se représenter, Arnaud Montebourg commence sa campagne en juillet de l’année dernière avant de se déclarer en novembre dernier. La déclaration sur le tard de Martine Aubry jette, a contrario, un doute sur sa motivation. Mais il ne suffit pas de se déclarer tôt. Encore faut-il que cette candidature trouve son public. Tel n’aura pas été le cas de Manuel Valls obligé de déclarer deux fois sa candidature pour tenter de créer l’événement.

Moins de communication, plus de stratégie

Fini le temps des paillettes et des postures. Les communicants sont invités à se faire discrets et la communication à être transparente. Après un mandat marqué par les excès de la pipolisation politique, les candidats règlent rapidement (et plus ou moins bien) la question de leur vie privée et limitent les effets d’image. François Hollande a très vite évoqué sa nouvelle compagne pour ne plus être obligé d'en parler par la suite. Martine Aubry et Manuel Valls ont, en revanche, été moins inspirés, la première réglant le problème très tard, le second communicant maladroitement sur sa vie privée en général, et la tauromachie en particulier. La question du message (re)devient centrale. Les candidats sont soumis à une double pression : ne plus faire de la langue de bois et se différencier les uns des autres. Résultat, la politique regagne en crédibilité sans redevenir ennuyeuse. Qui s’en plaindra ?

Franck gintrand


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2 réactions à cet article    


  • Francis, agnotologue JL1 13 octobre 2011 09:44

    On peut dire tout et son contraire à propos de ces primaires.

    Pour moi, ces primaires sont une mauvaise réponse à un mauvais problème. Le mauvais problème c’est le clivage vertical pervers droite gauche fabriqué et entretenu par les dominants pour la bonne raison que reconnaître le bon clivage - lequel est horizontal - leur serait fatal. Avec internet, les rois sont nus : on connait aujourd’hui toutes leurs bassesses pour s’enrichir et garder le pouvoir, et c’est pourquoi il leur faut trouver une parade.

    La mauvaise réponse, ce sont ces parodies d’élections appelées à se généraliser à l’instar des émissions de téléréalité qui sont en passe de tuer les bonnes émissions : la téléréalité comme les primaires, c’est de la fausse monnaie destinées à gaver le peuple de daube spectaculaire, société de consommation oblige.


    • zelectron zelectron 13 octobre 2011 19:51

      Cette nouvelle mécanique cache le vide abyssal d’idées politiques de haute volée, elle sert de cache aux ambitions fantasmagoriques des unes et des uns. Intrinsèquement cela crée une couche supplémentaire de discutailleries ce qui démontre le désaccord qui règne dans le domaine doctrinal (YAKA, YFOKON, YAPUKA)

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