Nouvelle politique au Moyen-Orient

Ségolène Royal est donc allé au Proche-Orient. On ne peut pas dire que les médias en général traitent le sujet en profondeur.
En effet, depuis qu’elle n’a pas, au Liban, relevé une comparaison au nazisme, tout le bruit médiatique tourne autour de cela. On opposera même à cette polémique son excellent accueil en Israël. Bref, de la forme, pas du fond.

Pourtant, il y en a des choses à dire. L’épisode "nazisme" n’est pas révélateur du voyage dans sa globalité.

Ce voyage est ce qui pourrait être qualifié de voyage d’étude parlementaire. Mais bon, d’étude il n’en gardera que le nom, car point de rapport parlementaire, simplement une visite et des déclarations. Elle n’a aucun mandat officiel, et ne parle pas au nom de la France. Pourtant, il aurait été mieux vu qu’elle soutînt la politique française et européenne au lieu de faire l’électron libre.

La question principale est donc : s’est-elle constitué une stature crédible sur le dossier du Proche-Orient ?

Le mieux est de demander à la presse étrangère. Haaretz, journal isralien :
« The French socialist presidential candidate listened closely as her hosts explained to her the complexities of the arab-israeli labyrinth. More than once she asked basic, simplistic questions such as "what do you think of the Palestinian problem ?" »

Le ton est donné.
On peut retenir par exemple à son arrivée au Liban, ceci, après avoir présenté ses condoléances à la famille Gemayel (M. Gemayel, ministre, a été assassiné peu avant son arrivée) :

"Je vois dans cette foule (la manifestation anti-gouvernementale à Beyrouth) un élan démocratique."

Bravo. La diplomatie européenne, qui soutient le gouvernement en place, a apprécié.

Visite à la Finul, elle condamne les survols :

« Je crois que ces survols doivent cesser parce que c’est à la fois l’intérêt d’Israël et du Liban.  »

« Il est vrai que les survols par des avions israéliens mettent en difficulté la Finul, portent atteinte à sa crédibilité et donc j’ai bien l’intention d’en parler aux dirigeants israéliens", lors de sa visite le dimanche en Israël.

Arrivée en Israël, retournement de veste, elle motive les survols et estime que les reproches de la Finul, mandatée par l’Onu, ne sont qu’un "vécu" :

“Je ne me suis prononcée que par rapport au vécu de la Finul par rapport à ces survols, qui sont mal vécus. Je l’ai toujours mis en parallèle avec la sécurité d’Israël. Je sais que ces survols sont liés à la défense de la sécurité d’Israël."

C’est ce qu’on peut appeler une désolidarisation de Mme Royal avec la position de l’Onu, non ?

Toujours en Israël :
« Vous avez devant vous la seule responsable politique qui s’est clairement exprimée contre l’accès de l’Iran au nucléaire civil. Là se trouve le plus grand danger pour Israël et toute cette partie du monde (...)  »
Il est normal qu’elle soit bien accueillie, elle vient de prendre une deuxième position contre l’Onu et le TNP.

A propos du mur de séparation, qui rappelons-le est jugé illégal par l’Onu, elle le justifie comme étant un des éléments de la sécurité d’Israël. (France info, Intertreize)

Belle démonstration : trois prises de position qui vont à l’encontre de la communauté internationale, de l’Europe et de la France.

La politique de Mme Royal au Proche-Orient va, selon ses dires, grandement mettre le curseur du côté des positions israéliennes (là, elle ne peut pas parler de continuité avec la politique de Chirac, pourtant, elle le clame ! ).

Voilà ce qu’on peut tirer de ce voyage, si on a la curiosité de ne pas s’arrêter à "Ségolène bien reçue en Israël" (et pour cause) ou "Polémique au Liban"..

Je terminerai par un délicieux moment, rapporté ici

- Ségolène au Liban : « J’aimerais que l’on puisse avoir des nouvelles des soldats israéliens détenus au Liban. »

- Journaliste libanaise : « Allez-vous demander des nouvelles des prisonniers libanais en Israël ? »

- Ségolène : "Euh, la conférence de presse est terminée."

[source : France Info]