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Nucléaire : mutualisation du risque et privatisation des recettes

Jouant les oiseaux de mauvais augure, les écologistes tentent de surfer sur la catastrophe de Fukushima pour ouvrir enfin un débat public sur la place du nucléaire en France. Ce faisant, ils prennent le risque de jouer sur les peurs et de promettre ce qui ne peut être tenu : une sortie sans douleurs du nucléaire.

Indécence et politique font depuis longtemps bon ménage. On parle même de “lois circonstancielles” pour évoquer des textes adoptés dans la précipitation à la suite de drames qui ont frappé l’opinion. Nicolas Sarkozy s’est révélé un maître en la matière. Un exemple repris aujourd’hui, certes pour une bonne cause, par les écologistes. A défaut de pouvoir avancer depuis des décennies sur un sujet qui lui tient à cœur, EELV a recours à des ficelles un peu honteuses qualifiées d’indécentes par une partie de la classe politique, de NKM à Ségolène Royal, souvent amnésique de ses propres pratiques.

Les Français sont nourris au lait du nucléaire depuis 40 ans” rappelait ce matin sur France Inter Dominique Voynet. A équation complexe, réponse complexe. La dépendance française à l’égard du nucléaire n’est pas un mythe. Un peu plus de 80% de l’électricité produite dans l’hexagone est issue des 19 centrales nucléaires réparties sur le territoire.

Face à une telle addiction, aucune sortie rapide et miraculeuse n’est possible. Même avec une éventuelle décision sans équivoque de la nation. C’est donc d’une longue cure de désintoxication qu’il faut parler en mettant cet objectif en parallèle d’une contrainte de taille : la demande croissante en énergie et notamment en électricité.

C’est d’ailleurs ce que propose Noël Mamère. “On ne pourrait pas se passer demain matin du nucléaire, puisque notre alimentation en électricité en dépend à 80 %. La France s’est placée sous la servitude du nucléaire, servitude involontaire pour le peuple français car le choix de cette énergie n’a jamais fait l’objet d’un débat démocratique. Nous n’avons pas attendu l’accident du Japon pour réclamer la sortie du nucléaire ; cela fait 35 ans que les écologistes alertent sur les risques. On ne demande pas la sortie immédiate. Mais comme les Allemands l’ont fait par la loi, les Français pourraient se donner 25 ans pour en sortir progressivement“.

S’ajoute à cela les fourches caudines d’un marché de l’énergie que l’Union Européenne a condamné à la libéralisation sauvage. On regrette à ce niveau le silence et l’absence des écologistes lors de l’adoption de la loi sur la nouvelle organisation du marché électrique (Nome).

Un texte scélérat dont le niveau de communication des travaux préparatoires jusqu’au vote n’a d’équivalent que le choix sur un coin de bureau présidentiel du tout nucléaire dans les années 70.

Une loi qui, sous des aspects techniques et le prétexte fallacieux de concurrence libre et non faussée, est éminemment dogmatique puisqu’elle acte le démantèlement de l’organisation du marché français de l’énergie de l’après-guerre.

Le gouvernement Fillon loin d’apporter la moindre résistance ou tentative de correction a trouvé dans les oracles Bruxellois une belle justification pour mettre à disposition de la concurrence l’énergie nucléaire produite à bas coût par EDF. Ni plus ni moins qu’une répartition de la manne financière que constitue l’énergie nucléaire bon marché. Autrement dit, une mutualisation du risque nucléaire et une privatisation des recettes d’aujourd’hui.

La production nucléaire est devenue d’autant plus rentable que l’essentiel du parc est désormais amorti. Pour autant, elle n’intègre pas le coût pharaonique de leur démantèlement lié aux impératifs de décontamination, de stockage et de recyclage des résidus.

Par un coup de baguette magique, les amis électriciens privés sans avoir réalisé le moindre investissement, peuvent désormais accéder à un quart de la rente nucléaire. Ce faisant le gouvernement a rendu encore plus difficile toute sortie programmée du nucléaire. La prolongation de la durée de vie des centrales françaises est à ce titre éclairante et inquiétante.

Grands perdants dans l’affaire les contribuables-clients qui après avoir financé la réalisation centrales, endossé pour quelques siècles le risque sanitaire, se voient offrir en remerciement une augmentation artificielle des tarifs qui va directement dans la poche des électriciens.


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18 réactions à cet article    


  • Fergus Fergus 16 mars 2011 09:44

    Bonjour, Henry.

    Pas d’accord avec vous sur le rôle joué par les écologistes : ils ont eu raison de saisir la balle au bond, non pour réclamer une sortie rapide, voire immédiate si l’on en croit quelques imbéciles manipulateurs comme Kouchner (« on ne peut arrêter du jour au lendemain »), mais une totale remise à plat du dossier en vue d’une éventuelle sortie à 25 ou 30 ans. Où est l’indécence, alors qu’ils parlent dans le vide depuis des décennies ?

    Pour le reste, l’un des principaux scandales du nucléaire en France est parfaitement résumé dans votre titre. Tout cela devra, à l’évidence, faire l’objet d’une clarification sans ambiguïté en vue de la présidentielle.


    • Henry Moreigne Henry Moreigne 16 mars 2011 09:51

      @ Fergus. Bonjour. Les écolos ont raison sur le fond mais on sous-estimé la forme. Leur précipitation les a desservis alors que le drame n’est pas terminé.


      • Cocasse cocasse 16 mars 2011 09:58

        S’ajoute à cela les fourches caudines d’un marché de l’énergie que l’Union Européenne a condamné à la libéralisation sauvage. On regrette à ce niveau le silence et l’absence des écologistes lors de l’adoption de la loi sur la nouvelle organisation du marché électrique

        Ces soit disant écolos sont aussi là pour taxer le populo au lieu de régler les problèmes.
        La libéralisation sauvage, ils y sont favorables, ils sont pour l’europe facholibérale.
        Tout le reste n’est que pipeau de bois vert et pipe au cannabis .


        • Gabriel Gabriel 16 mars 2011 10:06

          Volonté et choix de société, non seulement nous pouvons à terme nous passer du nucléaire (je rappel qu’une fois la décision prise il faudra compté au minimum 30 ans pour en sortir) mais de plus, la mise en œuvre d’énergies propres créerait des centaines de milliers d’emplois. Cela se fera lorsque les grands groupes tel Total, Areva et autres bandits monopoliseront le marché avec la complicité de nos élus afin de remplir leurs tiroirs caisses. Seulement pour l’instant ils ne sont pas encore prêts et ils ont des stocks de pétrole et de nucléaire à nous refiler.


          • Fergus Fergus 16 mars 2011 10:20

            Bonjour, Gabriel.

            Vous avez raison de souligner que la sortie du nucléaire au profit des énergies propres créerait des emplois, et nettement plus que l’abandon du nucléaire n’en ferait disparaître. Mais, et c’est là que le bât blesse, de puissants lobbies industriels veillent au grain pour sauvegarder leurs juteux profits. Seul EDF dont les actions (tant au sens propre que figuré) de la filiale énergie renouvelable sont appelées à une trève forte pregression pourrait jouer un rôle moteur dans cette mutation pour peu que ses dirigeants aient une vision à moyen et long terme.

            Cordialement.


          • titi titi 16 mars 2011 12:03

            Et augmenterait le prix du kWh...


          • jef88 jef88 16 mars 2011 12:10

            On le remplace par quoi ?


          • Furax Furax 16 mars 2011 13:24

            « S’ajoute à cela les fourches caudines d’un marché de l’énergie que l’Union Européenne a condamné à la libéralisation sauvage. On regrette à ce niveau le silence et l’absence des écologistes lors de l’adoption de la loi sur la nouvelle organisation du marché électrique (Nome) ».

            Une petite remarque, comme ça en passant. Ces joyeux drilles viennent de nous proposer un REFERENDUM. La dernière fois que peuple français s’est exprimé par référendum, on sait ce qu’il en est advenu...Ils étaient avec qui, les Verts, quand Sarkozy a convoqué tout le joli monde pour ratifier « Lisbonne » ? Avec le peuple français ?
            Il faut sortir du nucléaire, sans panique, en renforçant la sécurité, dernier souci des actionnaires. Donc renationaliser la production et la distribution d’énergie qui n’a pas pour fonction d’enrichir des fonds de pension ;
            Si l’UE n’est pas d’accord, organisons un référendum : « Sortir de l’UE : Oui ou Non ». Cohn -Bendit sera d’accord !


          • oscar oscar 16 mars 2011 20:05

            Je regardais voici un mois () un reportage sur Ushauaïa TV qui donnait la parole à un écologisye (lucide) allemand.
            Ce dernier expliquait que si tous les toit des zones urbaines étaient recouvert de panneaux solaires... la production d’énergie serait supérieuse à la demande dans toute la république fédérale...
            Alors on attend quoi pour s’y mettre... la bénédiction des « barons du pétrole » ?


          • Fergus Fergus 17 mars 2011 09:28

            Bonjour, Oscar.

            Vous avez raison, d’autant plus que les temps sont à la généralisation des couvertures en disgrâcieux bac acier en lieu et place de la tuile et de l’ardoise.

            Installer des panneaux solaire sur tous les toits règlerait effectivement une bonne partie du problème posé. Deux difficultés :
            1) Le poids des lobbies évoqué par Gabriel ;
            2) Le coût élevé de la fabrication et de l’installation de ces panneaux qui ferait grimper très nettement la facture énergiétique dans un premier temps. Vu l’état des déficits, les Français sont-ils prêts à payer leur électricité nettement plus cher en l’absence probable d’aide publique significative ? 


          • Yohan Yohan 16 mars 2011 16:27

            Heureusement qu’elle est écolo et pas prof de géo smiley


          • Berkano Othala 16 mars 2011 15:58

            J’avais lu dans un canard enchainé , qu’au temps où D VOYNET était Ministre de l’écologie,
            c’ était elle qui avait signé l’autorisation d’utiliser le MOX dans les centrales nucléaires françaises
            Berkano Othala


            • Alain-Goethe 20 mars 2011 16:18

              Je n’ai pas vérifié si c’est vrai . ;

              - Le MOX a des avantages .
              - bien sûr, il faut une excellente sûreté dans les centrales où il est utilisé

              - Japon Fukushima R.I.N N° 3 = vieille centrale B.W.R

              En france centrales PWR avec au moins 2 circuits d’eau différents ( RCP et Circuit secondaire en échange de chaleur dans les G.V)

              Et puis la politique .. faire baisser un peu le chomage .. en vue que les partis au pouvoir soient réelus etc


            • Yohan Yohan 16 mars 2011 16:28

              Attendons un peu, le Canard enchainé va nous en livrer quelques bonnes


              • Cocasse cocasse 16 mars 2011 19:17

                Allez voir ça :
                http://www.agoravox.tv/actualites/politique/article/cecile-duflot-le-japon-est-dans-l-29553

                La fille du coupeur de joint, DEA en géographie !
                Crise de rire garantie !!! smiley


                • le moine du côté obscur 16 mars 2011 21:04

                  Pourra-t-on avoir un débat civilisé loin des passions et des intérêts égoïstes sur le nucléaire ? C’est tout le mal que l’on puisse souhaiter au peuple français ! Il y a un choix important à faire ?


                  • french_car 17 mars 2011 09:13

                    Le pouvoir médiatico-politico-sarkozyste a trouvé le bon filon pour nous refaire un 21 avril en 2012 : faire siphonner les voix du candidat socialiste par les Verts en leur donnant un maximum d’audience.


                    • Axel de Saint Mauxe Axel de Saint Mauxe 20 mars 2011 11:19

                      La France s’est placée sous la servitude du nucléaire, servitude involontaire pour le peuple français car le choix de cette énergie n’a jamais fait l’objet d’un débat démocratique.


                      Assertion partagée.

                      J’aimerais toutefois que l’on m’explique ce qu’est un débat démocratique.

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Henry Moreigne

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