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Obama, le Monnerville américain

Barack Obama aurait même été jusqu’à copier cette affiche de Gaston Monnerville.
 
Après l’élection de Barack Obama, il n’y a rien eu de plus exaspérant que cet étalage de complexe d’infériorité de la France face à son voisin américain : ils l’ont fait, pas nous. Un noir à la Maison blanche, vous vous rendez compte ! Même Toni Morrison, Prix Nobel de Littérature, en rajoute cette semaine dans l’Express en parlant d’Obama : « Nulle part ailleurs, un homme ne pourrait ainsi sortir du néant pour accéder aux plus hautes fonctions. Je ne dis pas que le racisme est mort. (…) Et je suis persuadé (sic) que chez vous, en France, tout Prix Nobel et professeur titulaire à Princeton que je suis, on ne m’aurait pas donné un job ». Je me souviens d’un musée aux Etats-Unis où l’on peut apercevoir une photo en noir et blanc. On y voit des toilettes publiques. Sur l’une des portes, on peut lire « White only », blancs seulement. Nous sommes dans les années 60. Tout noir que l’on peut être, il me semble qu’à l’époque moderne, cela ne soit jamais arrivé en France.

Cette manière d’écrire, de réécrire l’histoire quitte à s’acquitter de gros mensonges pour mieux la faire correspondre à son état d’esprit est particulièrement choquant.

Soyons clair, l’élection de Barack Obama est un moment historique. Parce qu’il est le président des Etats-Unis, première puissance mondiale, parce qu’il représente un symbole porteur d’espoirs politiques et sociétaux pour son pays et pour le monde. Parce qu’il est issu d’une minorité, oui aussi et pas surtout. Le style de ses premiers mois de présidence laisse à penser que son mandat sera celui du dialogue avec les autres pays. Bienvenue à une Amérique plus humble. Le racisme est une gangrène. Ceux qui l’acceptent imposent ce prisme dans le débat public et oublient parfois notre histoire.

Monnerville, nous voilà !

J’avais oublié Monnerville. Gaston. Elu d’abord en Guyane puis dans le Lot. La Guyenne après la Guyane. Petit-fils d’esclave, Gaston Monnerville est président du Sénat sous la Vème république, avant Alain Poher. C’est le livre de Daniel Picouly (Mai 68), superbe d’inventivité, qui m’y a refait penser.

Le 29 mai 1968, la France vacille. A Paris sur les barricades, dans les manifestations, on ne marque que de cela. De Gaulle se serait enfui. Parti rejoindre Massu pour discuter de son avenir, il franchit la frontière du pays « sans en informer les autorités ». Au moins officiellement. Selon la Constitution de la Vème république, cela vaut pour le Président de la République, une démission d’office. Techniquement, la Présidence par intérim est assurée par le président du Sénat, à savoir Gaston Monnerville. Dans le livre de Picouly, Monnerville aime à regarder les statues dans le jardin du Luxembourg. Il leur parle. Il est parfois plus facile de s’entendre avec de la pierre qu’avec les autres politique. Car Monnerville n’est pas un allié de De Gaulle. Pompidou qui aspire à prendre la succession du général craint Monnerville. Sans compter que les partisans du général ne signalent pas sa disparition immédiatement. Tout cela concourt à une vacance de pouvoir réelle mais non officialisée. Quand on sait que De Gaulle est parti, il est déjà revenu. Monnerville ne sera pas président de la République par intérim.

Cumul = recul

Pourquoi ce recul finalement ? André Larané y voit finalement la conséquence du cumul des mandats dans la classe politique, « qui permet à quelques jeunes hommes bien nés de consolider d’une élection à l’autre leur assise politique et d’exclure tous les francs-tireurs de la compétition. L’affaire du vote de la loi Hadopi à l’Assemblée nationale en raison d’une tactique de vote du PS et de l’absentéisme des députés de la majorité, témoigne de cela. Dans un entrefilet du Nouvel Observateur de cette semaine, Xavier Bertrand, secrétaire générale de l’UMP, par le truchement de l’un de ses conseillers, dit combien il est surpris de voir que diriger un parti est un job à plein-temps. On veut bien le croire quand on sait qu’il est aussi adjoint au maire de Saint-Quentin, membre de la communauté d’agglomération de Saint-Quentin et député. Et Xavier Bertrand de s’interroger « comment fait Martine Aubry pour diriger le PS à mi-temps ? ». Et bien Martine Aubry n’est que maire de Lille et présidente de la Communauté Urbaine de Lille. Cela explique tout. 

« Il n’y a pas de vertu sans courage »

En 1933, Gaston Monnerville est député de la Guyane. Réputé bon orateur, il prononce un discours de soutien aux juifs d’Allemagne à l’occasion de l’arrivée d’Hitler au pouvoir.

« Me tournant vers les persécutés d’Allemagne, je leur apporte mon fraternel salut et je leur dis :Nous, les Fils de la Race Noire, nous ressentons profondément votre détresse. Nous sommes avec vous dans vos souffrances et dans vos tristesses Elles provoquent en nous des résonances que ne peuvent pas saisir pleinement ceux à qui n’a jamais été ravie la liberté. S’il est vrai que l’hérédité est la mémoire des races, croyez que nous n’avons pas perdu le souvenir des souffrances de la nôtre ».

Et de conclure son discours par « Il n’y a pas de vertu, sans courage ». Yes, he could.


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6 réactions à cet article    


  • Bois-Guisbert 24 avril 2009 17:15

    Il est toujours très intéressant d’évoquer la perception de l’allogène avant l’invasion.

    Gaston Monnerville était un Français en France, sans que cela ne soulève la moindre discussion, à la différence, part exemple, du débarquement de Roselmack au téléjournal de TF1, dont le retentissement médiatique reste la preuve d’un profond malaise.


    • Nicole 24 avril 2009 18:34

      Je pense que dans la présentation que l’on fait couramment de BHO, on commet souvent l’erreur, soit de le dire « sorti de nulle part » (ce qui est totalement faux), soit tenu par les banques qui ont beaucoup investi dans sa campagne.

      Il me semble essentiel de rappeler la place du lobby pro israélien dans le cursus de BHO. A cet égard, l’article « Obama and the Jews » paru dans le Chicago jewish news me parait très important :

      http://www.chicagojewishnews.com/story.htm?sid=212226&id=252218

      De même que celui de James Petras qui reprend une formule du précédent « America’s first jewish president »

      http://lahaine.org/petras/articulo.php?p=1768&more=1&c=1

      J’ai traduit le début là :

      http://www.les-attentats-du-11-septembre-vus-par-une-conspirationniste.com/article-26414447.html

      BHO a été voulu par le lobby et est trop intelligent pour ne pas se libérer de cette emprise. Simplement, il ne le fera pas de façon frontale.

      Tout cela fait que j’ai du mal à suivre votre comparaison. Pour moi BHO est dans une situation unique, et je ne ferais pas le lien avec Monnerville.

      Il a été identifié pour ses qualités très réelles, coaché et modelé par un lobby déterminé à l’instrumentaliser (Folie de Ira Silverstein qui partageait son bureau au sénat de Chicago et se manifeste si fier de l’avoir en quelque sorte « formaté sioniste ») et sa présidence dans ce contexte de crise le contraint à des repositionnements en délicatesse (j’apprécie les articles de dedefensa sur lui).


      • Bois-Guisbert 24 avril 2009 18:43

        Il a été identifié pour ses qualités très réelles, coaché et modelé par un lobby déterminé à l’instrumentaliser

        Sans oublier que les non-Caucasiens formaient le 40 % de son électorat (28 millions d’électeurs sur 70 millions), contre 10 % seulement pour McCain.

        Obama , c’est l’issu du tiers monde porté au pouvoir par des issus du tiers monde, alors que les Caucasiens ont voté McCain à 55 %.

        Cela laissera des traces très profondes dans la société américaine.

        BHO a été voulu par le lobby et est trop intelligent pour ne pas se libérer de cette emprise. Simplement, il ne le fera pas de façon frontale.

        A la différence, alors, de celui qui lui mettra une balle entre les deux yeux.


        • rinaldo maurice 24 avril 2009 20:27

          Je dirai plutôt que le président Obama est le « frère » jumeaux du président Sarkozy,tout deux issue d’ailleurs,en une seule génération accéder à la présidence d’un pays.iL FAUT LE FAIRE.
          Par contre les USA ont donné une leçon à l’Europe,ingrate vis à vis des 555000 combarttants dont faisait partie le commandant SAINT JUST DANS LE MAQUIS EN 1943 ALIAS Gaston Monnerville.Ces combattants représentaient 70% de l’armée française lors des combats en 1942 pour la prise d’Alger aux mains des PETAINISTES,en 1943 à MONTE CASSINO,la libération de la CORSE.
          Pourquoi cet omerta sur ces combats,pourtant les images existent à l’INA,On oublie de dire que les USA ont financé la guerre de 1942_1945 avec leurs propres ressources,alors que le général de Gaulle s ’est servis des richesses de l’OUTRE MER pour avoir son armée.
          Cest toute la différence ,les USA assument son histoire,la FRANCE TRICHE !
          Oùest le président quand les quatres DOM sont en ébullition ?
          Où SONT LES JOURNALISTES ? Où sont les politiques ?
          Veulent-ils savoir que des basanés défendent les armes à la main les frontières de la FRANCE aux quatre coins de la planète ?
          Eux aussi ont droit à l’image ,au respect de leur mission.Aucun fils de notables ne leur dit :bouge de là ,je prends ta place à Kaboul où dans les côtes Somaliennes.


          • Üriniglirimirnäglü Üriniglirimirnäglü 25 avril 2009 02:53

            Oh, Rinaldo, de Guadeloupe je présume, ne crois tu pas que les USA ne se sont pas moins servis, avant la France et après la France, de leur outre-mer à eux : l’Amérique du Sud et centrale, mais aussi l’Arabie ?
             
            La colonisation est une forme d’exploitation, United Fruits ou Standard Oil ou Texaco ou la Sara en sont une autre, l’esclavage encore une autre, la répression sanglante des manifestations d’ouvriers encore une autre, l’importation et la distribution de drogues dans les bas quartiers des villes US par les moyens aériens de la CIA encore une autre, etc... etc...

            Paix sur Obama si son idée est d’arriver à se contorsionner suffisamment imperceptiblement pour rester fidèle aux valeurs qu’il prône sans que ses commanditaires ne s’en rendent compte avant qu’il ne les ait rendus inoffensifs. Paix sur lui s’il est juste et courageux. Et que le peuple l’entoure et le protège comme l’espoir.


            • caramico 25 avril 2009 13:05

              En 58, à Fort de France, je jouais avec mes petits camarades, la plupart noirs.

              Au même moment on lynchait dans ce magnifique temple de la démocratie et de l’égalité des chances que sont les USA

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