Obsession présidentielle
Ceux qui ont fait campagne aux élections européennes ont entendu très souvent un message des citoyens : le rejet du système politique. Message en grande partie lié à un phénomène devenu primordial en France depuis l’instauration du quinquennat. Ce phénomène, c’est l’obsession présidentielle.
Une fois tous les 5 ans, le peuple de France désigne le chef de l’Etat et, aussitôt dans la foulée, vote pour ses députés. Résultat : l’Assemblée est asservie à la victoire du chef suprême. Et l’élection présidentielle est la seule « utile » pour les partis. Bayrou le sait ; il l’a trop dit. Sarkozy le sait aussi ; il fait tout pour que ça dure. Les chefs socialistes se déchirent pour cela ; l’obsession, chez eux, tourne au drame collectif. Les autres tentent leur chance.
Dans ce « délire » généralisé, un OVNI déboule : Europe Ecologie. Pour une campagne qui mobilise une partie minoritaire de l’électorat (40% de votants). Europe Ecologie réussit à conjuguer, pour le moment, des horizons associatifs et citoyens largement autonomes, bien dans l’air du temps (au bon sens du terme). Cette dynamique s’est cristallisée en quelques mois autour d’un chef de file qui rejette toute ambition présidentielle. Cohn-Bendit ne veut être ni président de la République (de toute façon il n’est pas Français de nationalité), ni même président de parti (« c’est pas mon truc » dit-il). L’OVNI vert a, en quelque sorte, percuté l’obsession présidentielle à la française, un peu comme on ouvre une brèche en psychanalyse.
Il y a encore des électeurs fidèles à des socles classiques (minoritaires). Mais pour ceux qui attendent « autre chose », la cohérence du message est essentielle. C’est une question de stratégie. Sortir de l’obsession n’est pas facile. Mais c’est nécessaire.
Vers une VIè République guérie de son obsession
Bayrou veut une VIè République. Cela tombe bien. Que le Modem se mette en cohérence avec son projet ! Et si cette République nouvelle abandonnait l’idée de l’élection suprême ? Cela permettrait plus facilement de présenter aux citoyens des projets plutôt que des chefs.
Chez les Verts et au Modem, on trouve des candidats et des militants motivés, des contenus élaborés et réfléchis collégialement, ainsi qu’un projet de société. Depuis octobre dernier, le Modem a mobilisé près de 4 mille personnes pour construire son programme européen, avec un message écologique fort mais mal mis en valeur ! Le Mouvement Démocrate doit sans doute s’offrir un nouveau mode de gouvernance, comme le souhaite Corinne Lepage.
Inutile de jouer les boyscouts au pied d’une pyramide qui s’enfonce. Il vaut mieux miser sur des réseaux pensants, organisés pour le débat et l’affirmation d’alliances électorales, le moment venu. Passer de l’obsession présidentielle à l’obsession de placer les personnes au centre de la politique.
L’idéal serait que les abstentionnistes viennent participer à cette façon de faire de la politique « autrement », comme dirait Jean-François Kahn. Un rêve ?
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