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Accueil du site > Actualités > Politique > Plan banlieue : l’espoir fait vivre

Plan banlieue : l’espoir fait vivre

Nicolas Sarkozy a détaillé, vendredi 8 février, le plan en faveur des banlieues préparé par la secrétaire d’Etat à la Ville, Fadela Amara. Venue quelques jours plus tôt à Vaulx-en-Velin (69) pour réaliser cette annonce, court-circuité par sa hiérarchie, la secrétaire d’Etat avait bel et bien peu de choses à proposer. Le plan espoir est sans aucun doute un aveu d’incapacité à agir sur le fond des choses : il faudra vivre avec ou plutôt sans.

Après les émeutes de 2005 et la crise latente de ce que l’on appelle communément « banlieues », les attentes sur le terrain étaient et sont fortes.

Marginalisées socialement et spatialement, mises à l’écart des réseaux (transports, vie politique, vie sociale...), montrées à l’index et illustrées en permanence par des « problèmes », les populations vivant en banlieue concentrent l’essentiel des maux du pays.

A en croire les médias, il n’y aurait que des délinquants, du trafic de drogue, des associations et des écoles en difficulté.

Quel que soit le diagnostic, on se trompe de problème à la base : en cristallisant sur la banlieue, on fait de ces quartiers des questions traitées à part alors qu’il s’agit plus d’une question de vie sociale d’ensemble avec des priorités fortes à arbitrer sur des quartiers aux ressources financières limitées.

Il fallait donc, pour assurer une rupture, continuer à produire un énième plan banlieue. Cette fois-ci, un plan « sexy » avec F. Amara en paravent, Mme Boutin et M. Sarkozy en maîtres d’ouvrage.

Et quel ouvrage !

On prend les mêmes et on recommence !

Parmi les dispositions citées :

  • une inscription de la diversité dans la constitution : j’imagine que cela va changer les réalités de ségrégation et de mise à l’écart sur le terrain et particulièrement lors de l’accès à l’emploi ;
  • de nouvelles incitations pour attirer les fonctionnaires sur ces « territoires » alors qu’il s’agit plus de développer un tissu administratif et de vie locale là où les grands pontes ont déserté ;
  • un nouveau partenariat avec les associations ou, plus simplement, la poursuite de la politique carnet de chèques pour acheter la paix sociale ;
  • un renforcement notable de la police et, plus particulièrement, de la police de proximité qui ne dit pas son nom ;
  • un énième contrat « jeune », le contrat d’autonomie, succédant à la cohorte de contrats aidés, tous plus stigmatisant les uns que les autres sans parler de l’absence de résultats... ;
  • une redite de l’affectation de financement aux transports publics lors du Grenelle, c’est-à-dire qu’il s’agit toujours des mêmes 500 M€, mais cette fois-ci avec un fléchage spatial. Un montant permettant à peine la réalisation de 2/3 lignes de tramway ;
  • une énième aide à la création d’entreprise dont on sait qu’elle ne peut pas se faire toute seule sans appui ;
  • une compensation à la disparition de la carte scolaire pour générer un peu plus de circulation afin d’amener les moins pauvres dans des établissements moins « exposés » (les profs sur sites apprécieront) ;
  • une invitation à entrer en classe prépa, dans un moule où de toute façon les « promus » ne pourront que difficilement subsister.

A la lecture de ces éléments, outre la fâcheuse absence de financements, me vient une réaction spontanée : on compte se foutre de la gueule des habitants de banlieue pendant combien de temps ?

Cela fait des années que l’on sait qu’il n’y aura pas de changements notables si l’école ne change pas sur le fond, afin de permettre aux plus modestes de trouver aussi un emploi sans faire des études longues.

Des années qu’il est nécessaire de casser les réseaux de drogue pour changer les repères des jeunes.

Des années que la place de la femme doit changer, parce que les femmes sont celles qui restent sur le terrain et suivent l’éducation des enfants avec des journées de folie.

Et l’emploi, impossible à créer sans appui, sans accompagnement, sans conseil et sans financement de banques frileuses à prêter.

Que dire aussi du sport, vecteur de cohésion, même pas évoqué alors que le sport et les équipements sportifs des banlieues sont des forces sur lesquelles s’appuyer.

Des années également que l’on sait qu’il est nécessaire de reconstruire certains quartiers, redimensionner les logements et entretenir, qu’il faut tirer des lignes de transport en commun, qu’il faut sensibiliser au recrutement - et particulièrement dans le public - de publics issus des banlieues.

Il serait aussi un poil intéressant de cesser l’assistanat et de rebattre les cartes de l’égalité réelle des chances, dans l’école, mais aussi dans le monde du travail (je pense aux contenus, mais aussi aux réseaux). On pourrait aussi se pencher sur les financements associatifs et le financement de ceux qui aident pour redéployer de l’argent mal engagé vers des projets plus solides.

Il y a également des choses existantes que l’on évoque peu, de la loi SRU en passant par la localisation et la densité même des services publics.

Allons allons, un jour peut-être comprendra-t-on que c’est en intégrant ces quartiers aux villes, en ne mettant pas à part ces secteurs dans des politiques sectorielles, mais plutôt en force dans les politiques d’ensemble, que l’on pourra rehausser des pans entiers de villes de laissés-pour-compte.

La mixité sociale, il y a ceux qui en parlent et ceux qui la construisent tous les jours sur le terrain.

Avec l’argent public mis par les fenêtres pour annoncer ce type de « blague » (je pense en l’occurrence au salon de Lyon sur le logement), il aurait mieux valu engager une campagne de publicité au 20 heures : « Dans les banlieues, il y a des gens qui se lèvent tôt, que ne dealent pas, qui ne sont pas représentés et qui pourtant sont indispensables à la société : ce sont eux qui font toutes les tâches ingrates, de la construction des pavillons en passant par le ménage et la mécanique. La moindre des choses serait au moins de les considérer. »


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10 réactions à cet article    


  • non666 non666 11 février 2008 13:34

    Juste avant les municipales, apres avoir renié ses promesses d’etre le président de la relance du pouvoir d’achat pour cause de caisse vide curieusement decouverte apres coup, Sarkozy de nagy bosca va s’acheter quelques voix dans les banlieues en y versants quelques sous.

    Malheureusement , il y va a coup de programme minimum, a cout minimum et il est prévisible que cela sera sans effet, meme si c’est vendu par une icone des representants des colons.


    • Rage Rage 11 février 2008 13:43

      Effectivement, c’est service minimum...


      • Hakim I. 11 février 2008 14:02

        Il y a un truc que ce pays, ou en tout cas ses élites n’ont toujours pas compris.

        Je vais ici me pencher sur un aspect qui a un effet très négatif (pour ne pas dire destructeur) dans le psyché d’un jeune de banlieue, ou de quartier populaire.

        Tous les plans de banlieue jusqu’ici ont un chapitre d’aide à la création d’entreprises, ou d’aide à l’inscrtiption aux classes prépa, ou de financer des "écoles d’excellence" ou je ne sais quoi encore. Et pour cela quelquefois, des profils sont présentés comme exemple : des ministres, des chefs d’entreprise, des ingénieurs ou sportifs pour montrer que "réussir" c’est possible.

        Réussir... c’est donc cela ? Si on ne termine pas son parcours en élite, c’est qu’on a échoué ? Rendez-vous compte des dégats que cela fait dans la tete d’un gamin qu’on a dévalorisé depuis le primaire. Voila comment il voit cette initiative : "Si t’es pas le meilleur, t’es qu’un raté".

        Ca merci, il le sait déja, les écoles pourries, les insultes de la police et l’humiliation due au fait de prévoir 1h de transport (qui lui coutera entre 2 et 6 euros environs)pour évacuer le stress, le lui rappellent quotidiennement.

        Par pitié, tout ce que demandent ces populations, ce n’est pas d’etre traité mieux que les autres, ou qu’on attende d’eux qu’ils deviennent ministres, c’est d’etre quelqu’un d’ordinaire avant tout, et considéré comme tel. Avoir un boulot, un toit, et surtout qu’on les considère en tant qu’etre humains et non en "jeune de banlieue" ou "d’origine XXX" ou "en difficulté" ou "avenir du pays". Que si quelqu’un ne les aime pas (ou les aime) ce ne sera pas a cause de leur couleur ou origine sociale.

        Passer au stade d’ordinaire (ou normal), c’est déja très bien quand on est considéré comme inférieur.

        Tout ce que l’on veut, c’est l’Egalité, pilier de cette république. Quand on aura réussi cela, ce sera une grande victoire, le reste n’est que du superflu.


        • ronchonaire 11 février 2008 14:30

          100% d’accord !

          Le vrai problème de ces quartiers, c’est l’absence d’égalité, au sens républicain du terme. Or, ces "plans" successifs ne sont ni plus moins que de la discrimination positive qui ne dit pas son nom, en contradiction complète avec nos principes républicains, et pour les résultats que l’on sait.


        • aquad69 11 février 2008 15:04

          Bonjour Rage,

           

          ... et celà fait aussi des années que l’on nous présente le "bizness" comme le fin du fin de la réussite sociale et de l’utilité citoyenne, sous la forme du "libéralisme économique" et de tous ces commerces et traffics mondiaux qui fleurissent et enrichissent les omniprésentes et omnipotentes maffias financières et commerciales de toutes sortes : matières brutes, céréales, fruits, coton, vêtements, etc...mais aussi armes en tous genres, qui sont la spécialité de nos très moralistes Etats.

           

          Comment voulez-vous ëtre crédibles quand, au nom de la morale (et de laquelle, grand Dieu !), vous voulez stigmatiser les traffics qui ont cours dans les cités, même les plus illégaux et les plus meurtriers ?

           

          Apportez dans ces zones de l’activité économique , quelle qu’elle soit, et vous y serez considéré comme utile, sérieux et crédibles par ceux qui s’y morfondent le plus, cad les jeunes.

           

          Il n’y a rien de pire que les nantis qui se mêlent de faire la morale aux démunis, et c’est bien l’attitude permanentes des fausses élites et de leurs médias qui mènent ce pays aujourd’hui.

           

          Merci pour votre article auquel je souscrit absolument.

           

          Amicalement Thierry


          • Bulgroz 12 février 2008 11:30

            "Allons allons, un jour peut-être comprendra-t-on que c’est en intégrant ces quartiers aux villes, en ne mettant pas à part ces secteurs dans des politiques sectorielles, mais plutôt en force dans les politiques d’ensemble, que l’on pourra rehausser des pans entiers de villes de laissés-pour-compte."

            Il a raison Rage, c’est pourtant facile (integrer les quartiers aux villes et integrer les villes a la campagne ), je comprends pas que personne n’y ait pas pense...

            Des annees que ce merdier persiste et personne ne met en application cette idee geniale et pourtant simple de Rage.

            Merde de merde. 


            • Bulgroz 12 février 2008 11:35

              Dans ces debats sur les banlieues, jamais au grand jamais, on n’y denonce la trop grande concentration de correziens dans ces quartiers difficiles. Ces zabitants de banlieue y zont une origine, non ?

               


            • pallas 12 février 2008 12:18

              Les problemes de la banlieue sont multiples, il y a celle des jeunes désabusé ainsi que des locataires ou proprietaires de leurs appartements qui ne protege pas leurs biens du vandalisme, le fait de casser les boites aux lettres, les ascenceurs, les graffitis, l’insecurité en regle general c’est un soucis interne et donc cela demande un savoir vivre en communauté de toutes personnes resident, c’est uniquement du savoir vivre. Ensuite pour ce qui est de la vision sur les habitants des divers banlieues, ont y a mis des individues issu de l’immigration ainsi que les classes de categorie la plus pauvre, sa demoralise les habitants de se savoir rejeté de la societe de cette maniere. Ce sentiment de rejet est renforcé par le biai de manque d’infrastructure la plus banal, c’est pourquoi il y a de voitures, les travailleurs n’ont d’autre choix que de prendre une voiture, les transports sont inexistants. Il y a un paralelle avec le choix anti voiture crée par la municipalité de Paris qui aggrave la situation d’injustice et cela pour le salarié qui doit travailler a Paris meme se tappant une 30 enes de kilometre a l’allé, un mepris des plus simple de la couche populaire. La personne qui sort de la Banlieue, l’homme de menage tout simplement, va prendre sa voiture, allé dans Paris faire le Menage dans un Magasin chic. D’une part il ne sera pas respecter, pas un bonjour, pas un regard, il sera inexistant, le fait qu’il soit obliger d’utilisé la voiture, car tout le monde ne peut pas se deplacer en Velib et se faire 30 kilometre en moin de 30 minutes a moin d’etre un sportif cycliste digne du tour de France, je ne vois guere de monde. Cette personne rentre chez elle, fatigué, a cause des embouteillage, fatigué de cette routine et invisible au monde auquel il contribu a faire tourné, n’a pas la force psychologique pour soutenir sa famille, il se sent meprisé. Ses enfants voi ainsi leur Pere humilier, fatiguer, leurs Meres tout aussi detruite de l’interieur, ont compris que le systeme les rejetent, dans cette famille , composé d’une fille de 16 ans, d’un grand frere de 30 ans, et du dernier petit frere qui a 15 ans. La fille qui a 16 ans, regarde la television, vogue sur internet, revant de fringues qu’elle ne pourra jamais s’acheter, regarde les series tv ou les ados sont riches, beau chanceux, une existence qu’elle ne pourra jamais esperer. Elle a la meme ecole que son jeune frere de 15 ans, un college lycée, regroupée, les profs toujours absents, recitant parcoeur leurs cours, aveugle au bordel de la classe, aucunes communications entre le prof et les eleves, un monde qui les separent, pas d’insulte, pas un regard echanger, rien, le vide. Le jeune frere adore son grand frere qui a 30 ans, il est la reussite de la famille, Bac S reussi avec Mention, il a fait des etudes d’ingenieurs, malgré qu’il est bataillé dur, qu’il n’a pas reussi a se faire un seul ami car different des autres eleves du a sa classe social, il reussi a avoir son diplome d’ingenieur d’electronique. Apres cela, ce jeune ingenieur peut revé a une vie meilleur, il cherche du travail, encore, toujours, jamais de reponse, il fait des petits jobs, il vie encore chez ces parents, il se couche seul, ne peut esperer a fondé une famille, deprimé, se humilié, il s’en veut a lui meme et non a la societé, il a abandonné de chercher du travail, trop longtemps qu’il est resté inactif a force de chercher et encore chercher du travail, les entreprises ne recrutent pas. Le jeune frere de 15 ans part en vrille, sa famille est dechiré, assommé, pourquoi ferait il des etudes si sa ne mene nul part ? pk se cantonné de faire un travail si en plus d’etre peut remuneré il ne sera pas respecté. Ses amis sont comme lui, ils font du petit larcin, ils ont un ban bien a eux, sirote des bieres, se fume des joins, se saoul jour et la nuit, il a abandonner l’ecole, sa ne lui plaisait, il c’est que sa vie son futur, c’est la minute d’apres. Voila ce qu’est la banlieue pour beaucoups d’habitant la bas.

               


              • Marsiho Marsiho 12 février 2008 13:36

                Il y a d’autres choses qu’on peut lire dans ce discours :

                "Vingt ans d’efforts de la part de tous les gouvernements, avec des moyens qui ont fini au bout du compte par être considérables, vingt ans de politique de la ville, vingt ans de travail de tant de femmes et d’hommes de bonne volonté, de tant de Ministres compétents, de tant de maires ayant chevillé au corps le souci du bien public, vingt ans de travail acharné de tant d’enseignants, de tant d’éducateurs, de travailleurs sociaux, de tant d’associations qui ont déployé tant de trésors d’intelligence et de générosité n’ont pas réussi à empêcher que les fractures se creusent, qu’une forme de désespérance s’installe et finisse par devenir une souffrance". Ces propos de notre Président lors de son discours du 8 février pour présenter le plan Espoir Banlieues reconnaissent donc les efforts de tous ceux qui oeuvrent pour ou dans les quartiers. Si j’avais l’esprit retors, je glisserais perfidement que c’est la moindre des choses pour le représentant d’une mouvance politique qui a soigneusement sabré les subventions aux associations de quartier et démoli la police de proximité, pour la remettre en place aujourd’hui sous un autre nom... Mais les contradictions en politique c’est d’abord de la gestion comme l’écrivait Franz-Olivier Giesbert...

                Alors ce plan Marshall des banlieues, qu’en est-il ? Tout d’abord un constat que je veux bien partager
                , l’échec de la politique de la ville nous dit Nicolas Sarkozy, c’est parce que "les habitants des quartiers n’ont eu qu’un seul ministre, celui de la ville. Les autres administrations s’en sont désintéressées et les services publics ont déserté les quartiers". Oui, mais les administrations ne sont pas autonomes du pouvoir me semble t-il...
                Notre Président évoque avec raison qu’il faut traiter les quartiers en les désenclavant, mais qu’il ne faut pas oublier les habitants, c’est à dire la dimension humaine qui ne doit pas disparaître sous les aspects techniques des rénovations passées et à venir. Fort bien. Mais qui diminue les budgets de l’action sociale, entraînant en conséquence la disparition progressive des postes d’assistant(e)s sociaux ? Quel est donc ce gouvernement qui a menacé une assistante sociale de poursuite en tentant de la faire transgresser son secret professionnel pour permettre une expulsion ?... N’est-ce pas le Ministère de la Ville de ce même gouvernement qui a récemment critiqué l’action des travailleurs sociaux (ce n’est d’ailleurs pas la première fois) ? Ce discours présidentiel suit donc des préceptes bien connus en politique, une application stricte des conseils de Mazarin dans le Bréviaire des politiciens ; mais qui ne cache pas aux yeux concernés plusieurs contradictions flagrantes.

                A compter du 1er septembre, il devrait donc y avoir un shérif dans chaque quartier, représentant l’état et "obligeant" les différents services publics à travailler ensemble. Ce rôle était jusqu’ici celui des chefs de projet politique de la ville ; mais il est vrai que ces derniers non pas de pouvoir direct sur les services de l’état, ni sur les collectivités territoriales, ni sur les bailleurs sociaux. Ils agissent dans des comités de pilotage d’où doit sortir le consensus (mou ?) et organiser, trop souvent à minima, la participation des habitants. Un vrai donneur d’ordre ne serait donc pas malvenu. Reste à voir concrètement comment il tiendra compte du terrain et comment il ménagera, tout de même, les susceptibilités locales...

                Le reste du discours se décompose en plusieurs thématiques :

                L’insécurité. Voilà bien un sujet que notre président maîtrise et qui constitue son principal "fond de commerce"... La lutte contre la délinquance et les bandes organisées reste donc son credo. Pour se faire, de nouveaux moyens viennent donc renforcer ceux existants ; saluons à cette occasion le retour de la police de proximité sous un nouveau pseudonyme : les Unités Territoriales de Quartiers. En 3 ans, 4000 policiers seront recrutés. Soit 5 policiers par Zones Urbaines Sensibles (il y en a 751)... Mais l’annonce la plus étonnante dans ce domaine (sans que cela fasse bondir qui que ce soit pour l’instant), c’est la création de "volontaires citoyens de la police nationale, c’est à dire des habitants dont je veux engager le recrutement pour qu’ils s’impliquent dans la sécurité de leur propre quartier". On peut penser immédiatement à une sorte de milice... Contradiction flagrante avec cette annonce alors que dans le même discours notre Président rappelle que le premier devoir de l’Etat est d’assurer la sécurité. Alors pourquoi accoler à cette tâche régalienne une organisation de non professionnels qui risquent fort de mélanger intérêts privés et collectifs. Les seuls états dont l’histoire a retenu ce type d’organisation étaient des états totalitaires... S’il s’agit simplement de faire remonter les problèmes aux forces de l’ordre (il faut dire que le propos est vague dans le discours officiel), une Gestion Urbaine de Proximité parfaitement opérante n’a que faire de ces volontaires citoyens. On flirte ici avec des concepts dangereux et tendancieux... Cette obsession de l’insécurité reste toutefois étonnante car elle n’est pas la principale priorité des habitants (lire à ce sujet les cahiers de doléances organisés et compilés par ACLEFEU). Mais il faut bien flatter un certain électorat à quelques semaines des élections à venir... Electorat qui trouvera son compte dans les propos sur l’immigration et sur la nation... "Car la France est un pays dont on peut qu’être fier".

                A propos du logement, le propos présidentiel milite pour l’accession à la propriété (il faut se souvenir qu’il souhaitait lors de sa campagne une France de propriétaires). Christine Boutin doit donc réfléchir sur ce sujet avec les bailleurs sociaux. Comment peut-on accéder à une propriété avec des minimas sociaux, je me le demande... Certes, tous les habitants des offices publics ne sont pas dans ce cas, mais s’ils avaient une autonomie financière suffisante, ils n’habiteraient pas en collectif pour la majorité. Mais bon, attendons pour voir ce qu’il sortira de cette réflexion. Autre point, la nécessaire obligation de veiller à la salubrité et la sécurité des habitats sociaux. Tâche dévolue au représentant de l’état dans chaque quartier. A noter que Nicolas Sarkozy souhaite que l’on cesse d’attribuer les logements "par communautés et par ethnies". Mais pour cela, il faut une offre de logement plus vaste, et donc que l’on commence par respecter la loi sur le parc de logements sociaux dans toutes les communes...

                Concernant l’école, Nicolas Sarkozy veut "casser les ghettos scolaires en fermant les collèges les plus dégradés". Son idée est d’éloigner les élèves de leurs environnements immédiat pour les scolariser "dans d’autres écoles de la même ville". Il cite l’exemple de l’école de Oullins (commune de l’agglomération lyonnaise) qui selon sa directrice (et Fadela Amara fort impressionnée par cet exemple) est une réussite. Je pense personnellement que cette idée est effectivement très bonne pour certains quartiers ou certaines villes. Mais la question des transports va devenir encore plus compliquée qu’elle ne n’est déjà. Et qui dit compliqué, dit onéreux... Quid des moyens ? Quid d’une dotation compensatrice de l’état aux collectivités territoriales ?

                Les transports justement, et particulièrement en Ile-de-France devront faire l’objet d’une distribution autre que celle connue aujourd’hui. Il est vrai que certaines situations sont kafkaïennes ! Pour faire quatre kilomètres d’une commune à l’autre séparée uniquement par une troisième qui refuse le passage de transports en commun, il faut parfois faire des détours avec trois changements et plus d’une heure de voyage ! Un véritable frein à la mobilité et à l’emploi. Oui il faut désenclaver les quartiers par la fluidité des transports. Mais là encore, quid des moyens financiers ?

                A propos d’emploi, Nicolas Sarkozy veut la généralisation des Ecoles de la deuxième chance. A défaut de dégraisser le mammouth, on contourne l’obstacle... Pourquoi pas, le procédé n’est pas idiot, et ces écoles ont des bilans plutôt flatteurs. Notre Président lance également un "appel aux entreprises françaises" pour qu’elles ne refusent pas de recruter des jeunes issus des quartiers. Pas d’obligation, juste une incitation. J’ai pourtant mémoire que les Zones Franches n’ont pas donné grand chose à ce sujet... Pourquoi cela changerait-il ? Parce que notre Président le souhaite ? Il faudra également que les banques (surtout en cette période frileuse de crise) accepte d’aider ceux qui voudront créer leurs entreprises... Mais il est vrai qu’ils auront à leurs côtés des professionnels de la création d’entreprise pour les aider. Non je ne moque pas, je trouve d’ailleurs que l’on devrait trouver ces professionnels dans les centres sociaux et autres maisons de quartier. Il existe aujourd’hui des structures privées (C3 Consultants par exemple) qui se sont spécialisées dans l’insertion professionnelle et le reclassement et qui obtiennent des résultats largement supérieurs aux structures classiques (ANPE et Missions Locales). Cette carte à jouer ne peut être laissée de côté. Autre "innovation", le contrat d’autonomie. Personnellement je n’y vois qu’un dispositif qui ne diffère pas vraiment de ce que l’on a connu jusqu’ici. Les Missions Locales proposent par exemple des accompagnements sur six mois qui sont du même type... Il faudra attendre plus de renseignements pour en tirer de plus amples conclusions.

                Aide toi, l’Etat t’aidera, voilà en substance ce qu’il faut retenir de ce discours en ce qui concerne l’emploi. Et "ceux qui ne veulent rien faire, l’Etat ne fera rien pour eux". Car qu’il soit bien entendu que "l’assistanat est dégradant pour la personne humaine et il la rend de plus en plus dépendante quand il s’agirait au contraire de lui donner les moyens de reconquérir son autonomie". Voilà un vrai discours de droite, vive l’effort individuel, que chacun se bouge et se sorte les doigts du c.. Certes, l’assistanat est un facteur de blocage sur le respect de l’habitat collectif par exemple. Mais tous les individus ne sont pas égaux dans notre société. Tout le monde n’a pas la force, ou tout simplement le goût pour l’entreprise individuelle. La French Way of Life, je n’y crois pas. Parce que la jeunesse par définition à besoin d’assistance puisqu’elle manque de moyens et d’expérience. Ce n’est pas un manque de confiance en elle, mais un constat. Non, assister n’est pas déshonorant, si l’on fixe dès le départ les conditions de sortie de cet assistanat. Deux choses dans notre société poussent à l’individualisme forcené : le capitalisme bien sûr, mais également l’essence même de la démocratie (lisez Tocqueville pour comprendre). Face à cela, on proposerait encore plus de chacun pour soi ? Certains jeunes des cités ont bien compris qu’en étant fragilisés seule l’organisation et l’assistance collective pouvaient leur donner l’avantage. Malheureusement, ils n’utilisent ce mode que pour les règlements de compte entre bandes. Ce qui prouve toutefois qu’ils ont conscience de cette force collective. N’est-ce pas cette piste sur laquelle il faudrait faire plancher sociologues et professionnels ? Voilà ce que pourrait être la vraie "révolution des mentalités, une révolution des comportements, un changement profond dans nos priorités et dans nos méthodes". Une société à venir qui ne soit pas ancrée dans le jouir de tout tout de suite que pratique notre président, lui qui attaquait pourtant dans sa campagne électorale l’héritage de Mai 68... Mais une contradiction de plus ou de moins... Il gère...

                Le reste du discours est suffisamment éloquent pour que chacun puisse avoir l’impression d’être pris en compte. Mais à la relecture reste surtout un sentiment d’empilement de bons sentiments mâtinés d’une certaine utopie. Que ce soit concernant la diversité (mais quelles mesures concrètes ?) ou la vision de villes à reconstruire qui "est un enjeu de civilisation", rien sur les financements, rien sur une articulation concrète, aucun calendrier, juste des promesses qui n’engagent, on le sait trop bien maintenant, que ceux qui veulent bien y croire. Par contre, ce qui est bien réel entre les lignes, c’est l’attaque contre les services publics et ses fonctionnaires : "Pourquoi ne pas envisager des postes qui sortiraient des catégories de la Fonction Publique ?" ; plus loin : "Pour financer quatre ballons de football, il n’y a pas besoin d’une commission réunissant 15 fonctionnaires ?" (je suis curieux de savoir où cela se pratique...) ; ou encore "C’est un nouveau service public d’excellence (Sarkozy adore ce terme) qui sera mis sur pied au coeur des cités dès le mois de juin". Il entend par là un service public dans lequel le privé dirigerait les opérations... Bref, les fonctionnaires sont des nuls... Ils apprécieront, et moi également même si je ne suis que contractuel.

                Autre détail un peu intriguant (mais là je coupe les cheveux en quatre), cette manière de présenter les responsables de son gouvernement : Xavier Darcos, Christine Boutin, Michelle Alliot-Marie, Christine Lagarde ou Brice Hortefeux (cachez les clandestins !) avec prénom et patronyme, même si ils sont cités plus d’une fois ; mais quand il s’agit de la secrétaire d’état chargé de la politique de la ville ; de la secrétaire d’état aux droits de l’homme ou de la ministre de la justice, elles deviennent dans le discours Rama, Fadela et Rachida... Condescendance pour ces femmes issues des générations de l’immigration ? Machisme ? En attendant, je trouve cette différenciation assez malheureuse. Oui Nicolas Sarkozy est le premier président à avoir laissé une chance d’apparaître au premier plan à ces femmes capables et travailleuses, mais si c’est pour les considérer ensuite avec une sorte de "paternalisme" déplacé ; à quoi bon ? Je serais ces dames, je serais furieuse... Comme quoi Rage, voir les femmes autrement n’est pas gagné...

                Voilà la fin de cette analyse sans prétention et uniquement subjective. Alors ce plan qui se voulait ambitieux ? Sur le sondage que j’avais proposé sur mon site il n’y avait (sur 30 réponses) que 17% à croire en ce programme. Je ne vois pas aujourd’hui ce qui permettrait de faire croître ce pourcentage. Faut-il rester optimiste ? Bien sûr ! Mais pas dupe... Surtout avant les élections municipales... A bon entendeur, salut. Oups ! J’allais oublier ! Savez-vous comment tout cela sera évalué ? Moi non plus. Mais ce qui est sûr, c’est que comme le Conseil Interministériel à la Ville devra examiner les avancées des travaux "quartier par quartier", ce qui est dur à imaginer sans un travail fastidieux, lourd et "chronophage" pour les acteurs de terrain, la tendance risque fort de faire en sorte d’évacuer certains quartiers du dispositif. Ce qui est annoncé clairement en page 4 du discours : "En 2009, lorsqu’il s’agira de les renouveller, il faudra bien se demander si les 2200 quartiers bénéficiant de ces aides exceptionnelles sont tous en difficulté". Qu’est-ce que je disais moi déjà ? Ha oui ! A bon entendeur, salut...

                 


                • jo l'indien jo l’indien 12 février 2008 17:44

                  l’espoir fait vivre c sûr ...mais combien de temps pouvons nous vivre avec l’espoir ?

                  il est une evidene aussi c’est celle du désespoir qui rend les jeunes et moins jeunes de nos quartiers populaires appellés approximativement banlieue, c’est la question de la représentation et des clichés.

                  d’un côté on croit que tous sont dealer ou proxénète, de l’autre que tous les blancs sont racistes et que l’image de la réussite est celle du créateur d’entreprise ou du sportif de haut niveau qui fait croire que si on ne se projettent pas dans ce genre d’activité on est à côté de la plaque...là se crée l’exclusion, voire d’auto exclusion, du matin au soir on nous rabâche le concept de la réussite par le business, voyez autour de chacun d’entre nous tout le monde veut sa boîte, pas de création innovante que du plagiat de surcroît (vêtement, resto rapide...) bref on insiste dans l’offre interne en délaissant le commerce extérieur alors que le pouvoir d’achat est faible...

                  Je dis que les jeunes et moins jeunes ne doivent pas attendre de l’état quil fasse des miracles...LES FORCES vives de sont déjà sur le terrain il faut les soutenirs ce qui veulent croire que banlieusards = bad boys ...ça les regardent mais qu’ils ne sa plaignent pas si ils sont tous des bad boys dans ce cas, tel est le jeu du paraitre !

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