Plan banlieues : une grande claque pour Borloo : face à un Président je sais tout, j’ai tout vu
Le Président Macron a revêtu les habits du grand timonier, "pour mettre à bas" la plupart des propositions judicieuses du Plan Banlieues, rapport dirigé par Borloo et soutenu par des élus de tous bords politiques. Pour une fois, les propositions contenues dans ce plan faisaient pratiquement l'unanimité d'une grande partie de l'échiquier politique, des maires de banlieues et des acteurs sociaux.
Mais voilà, le grand timonier a démantibulé au sens littéral du terme, ce document, n'hésitant pas, plein de morgue, à se moquer des propositions et des rédacteurs, allant jusqu'à proclamer que lui "il savait" ce qu'il fallait faire… INEDIT !
Comme d'habitude avec Macron, on fera appel au "mécénat" des grandes entreprises (quelles compensations auront-elles en retour ?).
En fait, l'ensemble de son "one man show" revient à entériner "la gentrification de la société française", à l'image de la technocratie qui a pris le pouvoir en mai 2017.
Gentrification : regroupement des habitants des classes moyennes et supérieures dans les mêmes quartiers, notamment dans les centres villes et fonctionnant dans l'entre soi. Les gentrificateurs se sentent peu liés "au collectif" et méfiants à l'égard des mouvements visant à transformer les rapports sociaux… Autrement dit, Macron "gèle" la situation pour causes d'économies, abandonnant d'une part les quartiers au repli communautaire et identitaire et d'autre part, aux maffias qui les ont mis en coupe réglées… (Marseille). Tout cela favorisant les discours d'extrême droite et de la droite extrême… Pour celui qui veut recomposer le paysage politique, on peut s'interroger sur le but final !
Nous sommes là au cœur de la question sociale et républicaine. Macron, ce jour-là, mardi 22 mai, a rompu le pacte social et le devoir de solidarité que nous devons à ces quartiers ! Pourtant le rapport Borloo employait des mots très forts "réconciliation nationale", "égalité républicaine", "millions d'âmes invisibles", à propos des quartiers d'habitats sociaux. De plus, Borloo "fléchait" le financement de ses mesures par l'argent, fruit des privatisations… a-t-il été dans le sacrilège ?
Le CNAFAL ne le pense pas. Et il convient de revisiter les constats officiels, les mesures phares et les plus innovantes, pour ne pas les enterrer et en faire un outil alternatif :
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Financement et investissement : le plan précédent de rénovation urbaine a généré 48 Mds de travaux, financés à 3% par l'Etat, mais cela a rapporté 4 milliards de TVA à son budget, 6 milliards de cotisations aux autres comptes publics et généré 40 000 emplois pendant 10 ans !
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19 programmes pilotés par une ou deux personnalités reconnues dans leur domaine, afin de lutter contre les inerties administratives et politiques.
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Développer le réseau des crèches et mini crèches en quartier prioritaire et y développer la formation professionnelle pour les parents et particulièrement les femmes seules.
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Scolarisation en maternelle, réclamée par le CNAFAL, depuis des décennies.
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Relancer les "programmes de réussite éducative" (PRE), qui ont fait leurs preuves, là où ils ont été correctement appliqués.
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Former et recruter 5000 coachs d'insertion. C'est essentiel et le CNAFAL peut en témoigner. En 1982, après le rapport de la commission Dubedout, un programme de formation au développement social de jeunes issus de quartiers en difficulté et sans diplômes, avait été lancé : objectif, un Diplôme d'Etat à la Fonction d'Animateur (DEFA), au bout de 3 ans et les "réinjecter" dans les quartiers. Cette innovation intéressante a été abandonnée malheureusement en 1986, lorsque Jacques Chirac est devenu 1er Ministre… Reprendre l'idée de coach, n'a rien de saugrenu.
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Tutorat, coaching et accompagnement à l'emploi, une mesure essentielle, face aux discriminations pour les publics issus de l'immigration et l'Association de la Fondation Etudiante pour la Ville (AFEV) a un savoir-faire sur ce sujet incontestable.
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Mettre en place des quartiers d'excellence numérique et mobiliser massivement les clauses d'insertion des marchés publics qui sont trop souvent oubliées par les élus locaux.
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La mesure phare et innovante des "propositions Borloo" c'est sans doute la création d'une nouvelle grande école réservée aux jeunes des quartiers défavorisés, sans diplôme préalable… La haute technocratie s'en est offusquée : cri du cœur égoïste d'une nomenclature.
Il existait auparavant dans "l'ancien monde", mais supprimé par un gouvernement de gauche, des filières privilégiées et rémunérées d'accès à l'éducation nationale, pour les éléments méritants et favoriser "l'école du peuple". Recrutement dès la seconde, pour les écoles normales d'instituteurs, recrutement avec les IPES des futurs professeurs… Ces filières permettaient une ascension sociale, mot oublié et enfoui par les socialistes libéraux !
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Renforcer le rôle des associations, mouvements d'éducation populaire et la lutte contre les discriminations dans ces quartiers.
Au fond, c'est la popularisation de ces propositions qui doivent faire peur "au petit bras" de Macron.
Jean-Marie Bonnemayre, Jean-François Chalot,
Président du CNAFAL. Secrétaire général du CNAFAL.
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