La première difficulté pour discuter de cette question chez nous réside dans le caractère ultrachauvin (en passe de devenir ultra-euronationaliste, d’ailleurs) de la culture institutionnelle française, façonnée par les périodes royale et coloniale. C’est un très lourd passif.
En réalité, LA FRANCE ELLE-MEME EST UN ETAT MULTINATIONAL que le monde politique a toujours refusé de reconnaître.
Suivent trois liens intéressants, et le premier correspond à un article censuré par Agoravox :
http://blog.360.yahoo.com/quicalt?p=87
Nicolas Sarkozy, l’Etat et l’identité nationale (1)
Dans un discours du 9 mars prononcé à Caen, Nicolas Sarkozy a déclaré notamment : « A force de demander à la France d’expier son passé... c’est notre participation à un destin commun qui est remise en question ». Une affirmation grave, qui ne relève plus de l’union nationale, lieu commun de l’actuelle campagne présidentielle, mais de ce que l’on s’est mis à appeler l’identité nationale. Le présent article, premier d’une série, aborde la question du statut des langues dites « minoritaires » et des réticences officielles à leur égard : craindrait-on que le mot « autodétermination » puisse être un jour prononcé pour certaines parties du territoire français ?
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(Complété par ce chapeau :
http://blog.360.yahoo.com/quicalt?p=111
Chapeau additionnel à mon article précédent : Nicolas Sarkozy, l’Etat et l’identité nationale (1)
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« Identité nationale », langues régionales et discours de Nicolas Sarkozy
Les déclarations récentes de Nicolas Sarkozy proposant la création un ministère « de l’immigration et de l’identité nationale » ont suscité en France une sérieuse controverse relevée par des médias du continent africain. Mais le débat est resté relativement circonscrit à la question de l’immigration, sans vraiment aborder la conception globale de ce que Nicolas Sarkozy appelle « identité nationale », mise en avant dans ses discours prononcés à Caen, à Besançon et à Nantes les 9, 13 et 15 mars respectivement. Or, même s’il n’est pas en soi très surprenant, cet exposé d’ensemble a de quoi inquiéter à bien des égards.
D’abord, toute trace d’enjeux économiques et politiques, de lutte des classes et d’évolution sociale est évacuée de la vision de l’histoire de la France que prêche Nicolas Sarkozy. Sous prétexte d’aborder ce qu’il présente comme un « sujet tabou », le président de l’UMP opère des simplifications que n’aurait osées aucun historien des décennies récentes. Pas seulement pour la période coloniale, mais également en ce qui concerne les événements des deux derniers millénaires. Il en résulte un nationalisme pur et dur qui n’est pas vraiment nouveau, mais dont l’expression avait rarement été aussi directe et, à la fois, aussi défensive. Les propos de Nicolas Sarkozy sur la question des langues dites « régionales » en fournissent un exemple frappant.
Ensuite, et dans la même logique, Nicolas Sarkozy demande ouvertement au peuple d’assumer les faits historiques dont se sont rendues responsables « ses » classes dominantes. Pas seulement depuis la Révolution Française, mais depuis bien avant, période féodale comprise. L’histoire de la France se résumerait alors à un « chaos » dont aurait émergé le pouvoir royal, présenté comme représentatif des intérêts des Français.
Enfin, à propos de la « Charte européenne des langues régionales » dont la portée est en réalité très minimale, Nicolas Sarkozy rejette son contenu mais évite de commenter la décision du Conseil Constitutionnel 99-412 DC du 15 juin 1999 qui ne se borne pas à opposer à ladite Charte le rôle de la langue française dans la Constitution mais invoque également les notions d’unité et d’indivisibilité de la République : « la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, en ce qu’elle confère des droits spécifiques à des « groupes » de locuteurs de langues régionales ou minoritaires, à l’intérieur de « territoires » dans lesquels ces langues sont pratiquées, porte atteinte aux principes constitutionnels d’indivisibilité de la République, d’égalité devant la loi et d’unicité du peuple français ». Une lecture de la Constitution qui exclut toute reconnaissance de l’existence même, en France, de communautés historiques utilisant une langue autre que le Français. Comment Nicolas Sarkozy peut-il raisonnablement prétendre que l’actuel dispositif, tel que les institutions l’interprètent, n’est pas de nature à impliquer la disparition des langues dites « régionales » ?
La conception d’ensemble ainsi développée de la « nation » et de l’ « identité nationale » mérite un examen détaillé. (...)
[fin du chapeau] )
http://blog.360.yahoo.com/quicalt?p=119
Nicolas Sarkozy, l’Etat et l’identité nationale (2)
Le 28 mars, à Lille, Nicolas Sarkozy a relancé la thématique de la nation avec un discours qui se veut contre la « pensée unique » et qui refuse « que l’identité nationale soit considérée comme un gros mot ». Ségolène Royal, que le candidat UMP accuse de « prendre le parti des émeutiers » à propos de l’incident de la Gare du Nord, a à son tour dénoncé le « populisme » de Sarkozy et réitéré sa promesse d’un « ordre juste ». François Bayrou attribue à une rivalité entre la « droite » et la « gauche » tous les maux du pays et qualifie la France de « peuple fort regroupé autour de valeurs ». Mais les trois candidats défendent la « construction européenne », qu’ils présentent comme allant de soi. Rien d’atypique, dans la pièce de théâtre électoral qu’on nous joue depuis des mois et qui, conformément à sa vocation, escamote les vrais problèmes. Qui rappellera que les nationalismes du XIX siècle ont été le produit de la montée de la bourgeoisie industrielle et financière, et que c’est en fonction des intérêts des milieux financiers et industriels qu’il convient d’analyser les grands nationalismes du capitalisme actuel ? Ces nationalismes sont en réalité européen et planétaire, si on entend par nationalisme la volonté de mettre en place un Etat au service d’une classe sociale, comme ce fut le cas jadis.
(...)
Ce qui frappe, avec le nationalisme « européen », c’est que presque personne ne semble oser s’opposer frontalement à lui. Au lieu de dénoncer clairement les dangers de la prétendue « construction européenne », on nous administre des discours qui acceptent cette « construction » et proposent de réformer l’Europe des financiers et des multinationales où on voit des « socialistes » influents défendre la « flexibilité » de l’emploi pour le compte du patronat. C’est un peu n’importe quoi. On lit : « une autre Europe », « Europe sociale », « Europe des travailleurs »... Ce qui, si on remplaçait « Europe » par « cauchemar », donnerait : « un autre cauchemar », « cauchemar social », « cauchemar des travailleurs »... On oublie souvent que l’essentiel des acquis historiques des peuples des pays de l’Europe occidentale se trouve recueilli dans les lois et règlements des actuels Etats. Un Etat européen en ferait table rase, et les baratins pseudo-alter ne changeront rien au problème. Ce n’est pas une question de « nationalisme » ni de défense des actuels Etats, mais il paraît nécessaire de préserver au maximum des droits pour lesquels beaucoup de sang a jadis été versé et de ne pas favoriser objectivement la stratégie de l’impérialisme à l’échelle planétaire.