Pour un second débat présidentiel ?
Quinze jours entre deux tours, c’est court, mais deux heures pour tout se dire, aussi. Si les élections présidentielles américaines ne constituent pas un modèle à suivre, n’y aurait-il pas quelques « best practices » à recycler ?
Quelque part, le marathon américain a bien prouvé sa capacité à former des leaders et affiner les jugements : en 2004, le pays a confirmé à sa tête un fondamentaliste dont toute la stratégie tend à précipiter le jour du jugement dernier.
Physiquement, il faut déjà tenir le coup pour traverser ce continent en long, en large et en travers. Quand un candidat français s’inflige quelques heures de décalage horaire, c’est juste pour s’accorder quelques photos de vacances sous les tropiques et réveiller la fibre coloniale de métropole, avant de sous-traiter l’épineuse question du sous-développement des DOM-TOM par un sous-secrétaire de sous-état à deux sous.
En France, l’espace est donc plus ramassé, mais le calendrier aussi... et avec beaucoup d’organisation de dernière minute parce que, chez nous, la date des élections dépend de la santé du président ou à la rigueur de ses sautes d’humeur (dissolution), pas d’une règle immuable à laquelle chacun se plie (le président meurt ? on a déjà la pièce de rechange - un référendum sur l’Europe ? il suffira d’ajouter une case à côté de ceux sur l’avortement, le mariage gay lesbien et transsexuel, la peine de mort pour les vendeurs d’armes qui s’enrayent avant que le prof soit flingué...).
Aux States, le vainqueur des primaires est issu de la sélection naturelle et ça se joue à l’endurance. Le candidat doit ainsi puiser jusqu’au bout de ses ressources, c’est-à-dire jusqu’au dernier centime du trésor de guerre accumulé avant et pendant la campagne... A part pour Bush, bien sûr : avec lui, pas de risque de tarir la source et, surtout, Darwin n’a rien à voir à l’affaire. C’est une question d’Intelligent Design : le candidat est tout simplement l’Elu de la Bible Belt.
Une fois la diversité politique anéantie à coups de d’armes de désherbage massif fournies par Monsanto et d’autres généreux donateurs, deux individus s’affrontent en duel sur un seul tour dans une élection en fin de compte indirecte où des Etats basculent dans un camp ou dans l’autre en fonction des liens de parenté du Gouverneur avec l’un ou l’autre des candidats. Quand un milliardaire farfelu parvient à convaincre à lui seul les grands électeurs potentiels, on peut se retrouver à trois pour l’a-Perot mais en général on en reste là.
En réalité, les finalistes ne sont pas deux mais quatre puisqu’il faut compter avec les vice-présidents. Le choix doit donc être doublement réfléchi. Jay Leno faisait ainsi fort justement remarquer, suite à l’attentat raté contre Dick Cheney, que l’on était passé de peu à côté du pire : George W. Bush serait alors devenu le président des Etats-Unis d’Amérique. On en frémit rien que d’y penser...
Les Américains ont donc droit à des débats pour les primaires, des débats entre les candidats à la présidence, et des débats entre les candidats à la vice-présidence. Et comme les candidats respectent l’agenda des débats dans ce pays, il est possible de saucissonner le débat présidentiel en plusieurs débats thématiques (ex : les affaires extérieures, les affaires intérieures, les affaires de Clinton à l’intérieur de la Maison-Blanche mais à l’extérieur de son mariage...).
Faut-il, comme aux USA, désacraliser la grand-messe du débat unique en passant à un système de débats thématiques ? Quelque part, cela permettrait d’aller plus loin sur le fond, mais aussi d’accorder le droit à l’erreur, une séance de rattrapage.
D’un autre côté, une fois qu’on a appuyé sur le bouton rouge, il n’a pas vraiment de séance de rattrapage.
2 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON