Pourquoi je n’ai pas voté aux élections présidentielles algériennes
Malheureusement, je n’ai pas exercé mon droit de vote aux dernières élections présidentielles algériennes, organisées le 12 décembre dernier. Cela n’est pas dû à un oubli, ni à un cas de force majeure. Tout simplement, pour des raisons objectives diverses, j’ai délibérément boycotté ce scrutin de tous les dangers.
Je n’ai pas voté, parce que je ne pourrais reconnaitre une légitimité à des élections imposées par un vieux général de 82 ans. Des élections rejetées par la majorité du peuple algérien. Comment pourrais-je tomber dans le piège d’une fausse élection, jouée d’avance ? Une fausse élection qui n’a d’autre but que celui d’installer un président civil, pour cacher l’arbre militaire composé d’une poignée de généraux voulant continuer à gérer le pays d’une main de fer. Un simple habillage destiné à la consommation internationale.
Je n’ai pas voté, car je ne voulais pas cautionner un candidat parmi cinq autres, tous choisis avec soin par le pouvoir du fait militaire accompli. Tous issus de l’ancien régime, corrompu et corrupteur. Et même si je voulais voter ; est-ce un choix bien libre que de se retrouver dans l’isoloir face à une liste composée de 4 candidats lièvres et d’un gagnant connu d’avance par tout le monde ? L’un des fervents défenseurs du cinquième mandat du président déchu Bouteflika, avorté par la révolution du sourire déclenchée le 22 février dernier.
Je n’ai pas été voté, parce qu’il n’y avait rien à élire, rien à choisir. Aucun de ces candidats ne possède un programme électoral digne ce nom, une manière de voir, une stratégie, ni même un minimum de charisme. Dénués de toute identité politique ou philosophique identifiable. Aucun d’eux n’eût le courage d’exprimer sa pensée profonde, s’il en avait une. Sont-ils de gauche, de droite, islamistes, libéraux ? Les électeurs n’en savent rien. La chose la plus certaine, c’est qu’ils ont peu à voir avec la modernité et rien à voir avec la laïcité.
Pourquoi aller voter quand il s’agit d’une désignation déguisée en élections ? Je ne voulais surtout pas offrir ma voix à une bande qui n’a et ne pourrait jamais digérer l’idée de l’alternance car elle a toujours considéré l’Algérie comme son dû, son jardin privé, son butin de guerre.
Il ne m’était pas venu à l’esprit un instant de trahir la révolution du sourire, cette belle révolution pacifique, en s’intégrant dans une pure opération électoraliste ayant pour but de pérenniser le pouvoir dictatorial en place depuis 1962, l’année de l’indépendance. Ce pouvoir qui est devenu, au fil du temps, le principal obstacle à la modernisation de l’Algérie. Je ne pourrais souiller ma voix électorale en la glissant dans cette urne-piège, recyclatrice de ce régime, qui a pillé le pays et privé les algériens de leur liberté durant 57 ans.
Je n’ai pas voté, afin de préserver ma voix, pour qu’elle ne se mélange pas avec celle de l’islamiste fanatique Hamadache Abdelfetah, celui qui considère la moitié des algériens comme des mécréants et qui n’a de cesse de lancer des fatwas (Avis juridique islamique ) autorisant le meurtre des apostats. Celui-là même qui appelait ses acolytes à aller voter massivement à ces élections.
Je ne voulais pas non plus participer à un scrutin où ma voix serait l’égale dans l’urne de celle d’un terroriste notoire qui a, lui aussi, appelé les algériens à aller voter. Cet individu n’est autre que le chef de la sinistre ‘armée islamique du salut’, responsable d’horribles massacres pendant la décennie noire. Ce triste personnage qui avait un soir reconnu, sur un plateau de télévision, qu’il avait achevé, à bout portant, un jeune appelé blessé.
Je ne me suis pas déplacé, parce que les prisons algériennes sont pleines de militants des droits de l’homme, de détenus d’opinion. Arrêtés, incarcérés, juste parce qu’ils ont manifesté leur refus et leur rejet de ces élections imposées contre la volonté populaire.
Je n’ai pas voté, parce que ces élections ne sont pas tenues pour résoudre le problème de la légitimité et dépasser la crise politique en Algérie, mais bel et bien pour assassiner la révolution du sourire. Voter, selon moi, s’agirait de bâtir un régime politique moderne, laïcisé, où femmes et hommes seraient radicalement égaux, où je ne verrais plus de bureaux de vote réservés aux femmes, et d’autres, aux hommes. Ces élections sont loin, très loin de cette problématique vitale. Pire encore : elles pourraient donner lieu à des luttes ethniques, régionalistes et religieuses chroniques.
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