Pourquoi je suis de Centre-droit
Il y a de nombreuses années que j’observe la vie politique de mon pays. J’en maîtrise quelques clés qui me permettent ici et là, de porter un jugement mesuré sur les uns et sur les autres.
Je suis critique sur la méthode de gouvernance de Nicolas Sarkozy qui ne fait pas, à l’inverse de ce qu’il laisse croire ou entendre, montre d’équité. Et s’il y a bien dans la devise de la République une notion dont les français sont les plus particulièrement attachés, c’est le concept d’Egalité.
Or cette République irréprochable est à mon avis plus proche de l’argument marketing que de la réalité concrète. Mais si la République façon Nicolas Sarkozy n’est pas irréprochable, elle ne l’a jamais été non plus auparavant.
En revanche, il me semble évidement que la miterrandie fut beaucoup plus permissive et opaque par exemple, que ne l’est le Sarkozysme. Combien d’affaires étouffées, combien de mensonges d’Etat, combien de sbires infréquentables, combien de suicides et de petits meurtres entre amis. S’il faut organiser un débat sur ce thème ou rafraichir la mémoire de certains, c’est avec plaisir et gourmandise que je m’y emploierai.
Mais la méthode de gouvernance n’est pas l’action.
Dans un article que j’ai écrit récemment, en réaction à l’affaire Woerth-Bettencourt(*), je laissais entendre que cette nouvelle affaire ne nous apprenait rien qui ne soit véritablement nouveau et que nous ne sachions déjà. Je voulais parler des passerelles permissives qui s’installent entre les différents pouvoirs, qui ont existé de tout temps et qui s’alimentent constamment à l’intérieur et à l’extérieur du pays comme ce qui fonde par ailleurs les relations franco-africaines et qu’on appelle le système Françafrique.
C’est déplorable, il faut améliorer la gouvernance, se battre pour une plus grande transparence et la séparation des pouvoirs ; mais c’est ainsi.
Puis je continuais en écrivant qu’il fallait néanmoins poursuivre le travail des réformes pour le bien commun de notre pays et des français et ne pas se complaire à ne vivre qu’au rythme des rebondissements des affaires. Le « tous pourris » est une paresse intellectuelle démagogique qui nous mène tout droit vers un populisme dangereux (**).
Je ne voulais pas dire pour autant qu’il fallait balayer d’un revers de manche la forme sur le fond. Je soutiens une presse libre et défends le principe de la séparation des pouvoirs. Je m’en suis par ailleurs expliqué (***). J’affirmais que les français, c’est-à-dire vous et moi, ne pouvaient pas se contenter d’immobilisme dans la période économique et financière grave que nous traversions.
Un type du MODEM qui se fait appelé F. NL, ou quelque chose dans ce genre, dont il m’est arrivé de parcourir le blog une fois ou deux et qui se proclame Démocrate Sans Frontière (l’estampillage « Sans Frontière » est en ce moment à la mode et décliné à toutes les sauces) a réagi en écrivant une ânerie du style « A quoi rime l’appel à "continuer le travail des réformes pour le bien commun" quand depuis des années, ces prétendues "réformes" consistent essentiellement à piller le pays et ses finances au profit de quelques intérêts privés et de leurs amis ou complices dans la classe politique ? »
La première chose qui me soit venue à l’esprit à la lecture de son commentaire est que j’avais à faire à un Conservateur. Je suppose que ce monsieur porte la bonne parole Bayrouiste et comme François Bayrou n’est pas encore au pouvoir, il trouve ma position pour la moins ambiguë dès lors que je soutiens l’effort engagé sur les réformes.
Tant que je me montre critique sur la gouvernance du pouvoir en place, cela lui sied, mais dès que j’émets l’hypothèse qu’il nous faut quand même avancer pour le bien commun de tous, le voici qu’il part dans un délire à la Besancenot. Ça me confirme que Bayrou et ses émules sont dans une posture Gaullo-Miterandienne qui n’a rien à voir avec le Centrisme.
Jean-Louis Bourlanges rappelle qu’il n’est pas drôle d’être Centriste parce qu’on se situe dans le prosaïsme et le discours de vérité. Dans ce que Raymond Barre appelait la modération impitoyable : on est dans le courage ordinaire des gens qui refusent simplement de dire à tout le monde ce qu’il veut entendre. Ce qui fait bondir les souverainistes et les volontaristes qui vous soupçonnent d’insulter la grandeur de votre pays. Vous êtes donc toujours mis en accusation. Je refuse pour ma part l’équation démagogique du discours déconnecté de la réalité politique et de l’opportuniste dont on fait preuve une fois aux affaires.
Je pense que François Bayrou se montrerait bien meilleur sur la méthode de gouvernance que celle qui est pratiquée par Nicolas Sarkozy (enfin on est en droit de le supposer) mais que ferait-il de si différent sur le fond des réformes ?
Un Centriste ne gouverne jamais seul. Il participe à un pouvoir qui est délibératif. Il croit au régime représentatif, il croit à la délibération parlementaire, à la délibération avec les partenaires sociaux, il pense au fond que ce sont les compromis qui font les réformes et non pas les compromis qui les détruisent. Il est attaché à des valeurs sociales et à une économie libérale.
On me parle de la gauche comme une alternative pouvant réduire les inégalités ! Depuis quand la gauche moderne, celle dont les cadres sont issus de l’ère mitterrandienne a-t-elle contribué à réduire les inégalités ?
L’Observatoire des inégalités est clair là-dessus lorsqu’il affirme dans une étude que « ..La croissance a fait davantage le jeu des riches que des pauvres si l’on raisonne en terme d’écart de niveau de vie. Les pouvoirs publics, et donc la couleur de la majorité, n’influence guère les inégalités au niveau général, en tous cas bien moins que l’évolution globale de l’économie. Reste qu’au cours de ces deux périodes, aucune politique de redistribution forte n’a été mise en place, hormis la prime pour l’emploi, créée en 2001 et augmentée ensuite. Dans les deux cas, les baisses d’impôt ont bien davantage profité aux plus aisés et accentué le mouvement au lieu de répartir la richesse. » (****)
Le cheval de bataille de l’inégalité est à la Gauche ce que le thème de la Sécurité est à la Droite. Mais l’un comme l’autre se heurtent au principe d’une réalité sociale qui dans un cas comme dans l’autre est infiniment plus complexe à transformer. L’émergence de nouvelles formes d’inégalités comme l’émergence de nouvelles formes de violences sociales obligent les politiques à renouveler leurs discours volontaristes et à imaginer des nouveaux instruments pour combattre les deux fléaux.
L’un des problèmes majeurs par exemple que traverse les vieilles démocraties comme la nôtre, est que le jeu économique est aujourd’hui profondément mondial et que cela nous oblige à penser différemment lorsqu’on veut protéger notre modèle si particulier. Cela nous oblige au fond à réfléchir sur la notion d’équité plutôt que d’égalité.
De la même façon, on ne traitera pas durablement le problème de l’insécurité dans les banlieues si on ne s’attaque pas de front aux défis que représentent son économie souterraine, aux nouvelles formes de l’intégrisme religieux, à l’invisibilité sociale dont souffrent les jeunes issus de ces minorités dont les parents ne sont toujours pas représentés aux deux Chambres de l’exécutif et, à la bataille à mener pour combattre nos préjugés contre la stigmatisation dont ils sont souvent victimes.
L’économiste de gauche Daniel Cohen, l’exprime très bien lorsqu’il écrit de la Gauche : » Son problème (à la Gauche) se trouve « dans la difficulté à renouveler sa réflexion sur les instruments à utiliser. La gauche reste prisonnière de l’idée selon laquelle l’économie entraîne le social et du corrélat qui veut que pour agir sur celui-ci, il suffit d’agir sur celle-là. Or cette équation est invalidée deux fois. D’abord, il est de plus en plus difficile de réguler l’économie. Ensuite, à supposer qu’on y parvienne, cela ne suffit plus à résorber les nouvelles inégalités sociales. » (*****)
L’un des problèmes de la Droite classique est son volontarisme qui laisse croire que tout est possible lorsqu’on a la réforme joyeuse et cela, quelles que soient les difficultés économiques extérieures. Jacques Chirac a gagné en 1995 là-dessus : « Si nous voulons, nous pourrons ». Sauf qu’en décembre de la même année la France était dans la rue et qu’à l’adjectif volontariste s’est alors substitué le terme de Fracture Sociale.
Quant aux socialistes français, leur malhonnêteté verbale est légendaire. Les élections seraient pour le discours et l’opportunisme pour le gouvernement. Toute la construction politique de la Gauche se situe dans un discours de promesses non tenues une fois qu’elle se trouve confrontée à la réalité du pouvoir. Cela exaspère certains et en désabuse d’autres.
Vous ne pouvez pas avec de la malhonnêteté verbale réformer un pays. Parce que les gens sauront que vous leur avez menti. Toutefois, vous pouvez essayer de ne pas faire trop de bêtises en ne réalisant pas celles que vous aviez annoncées mais vous ne pouvez pas animer un mouvement réformateur.
C’est ce que Jean-Louis Bourlanges appelle le refus du verbalisme. L’exemple du moment est la position arcboutée des Socialistes sur la modification de l’âge de la retraite. Sur cette question, les socialistes français se sentent ressaisis par la nécessité de la fidélité à un dogme verbal qui est décalé de la réalité et qui, lorsqu’ils reviendront aux affaires, même s’ils affirment le contraire, ils ne reviendront plus sur le système des retraites. Parce que dans la situation démographique et économique dans lesquelles nous nous trouvons, la vérité est qu’il faut dire qu’on ne restera pas à 60 ans. D’ailleurs dès 1982 c’était déjà une idiotie de l’affirmer et de légiférer. Et maintenant à fortiori...
Voilà pourquoi je ne suis pas de Gauche.
La municipalité dans laquelle je suis Conseiller est UMP par exemple. Il s’avère que le Maire de Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine) gère sa ville parfaitement bien. Je le dis avec l’aisance de quelqu’un qui s’est présenté contre lui, en tête de liste, aux municipales de mars 2008 sous les couleurs du MODEM.
Et bien je ne confierais pas les clés de la mairie à l’opposition socialiste locale. Non pas par idéologie, mais parce que je suis certain qu’une coalisation de gauche dans laquelle le parti socialiste dominerait, obérerait l’équilibre fragile de cette ville aux faibles moyens financiers et serait dans l’ensemble, une catastrophe économique et sociale. Le niveau local étant là où s’exerce la démocratie la plus vivante, je suis globalement satisfait de la manière dont la municipalité gère la ville de Châtenay-Malabry.
Voici pourquoi j’assume une culture du compromis et non pas une culture du Salut Public. Voici pourquoi je privilégie à la mauvaise gouvernance, le devoir d’agir et de mener des réformes pour que la France conserve son modèle de société équilibré et qu’en revanche, je ne m’empêche pas d’exprimer les convictions qui sont les miennes dans un esprit constructif sans trop utiliser l’arme de la polémique. Voilà aussi pourquoi je suis de Centre-droit.
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