Président Sarkozy : l’ouverture jusqu’au bout ?
En faisant l’ouverture, Nicolas Sarkozy étonne et séduit. Mais cette ouverture va-t-elle aussi loin qu’on le croit ?
En faisant l’ouverture, Nicolas Sarkozy répond à une attente manifestée notamment par le vote pour François Bayrou. Beaucoup de Français attendaient qu’enfin les responsables du pays dépassent leurs préjugés pour travailler ensemble sur le fond des sujets.
D’un point de vue politique, l’ouverture doit mettre fin aux hypocrisies qui ont souvent poussé les grands partis à soutenir des réformes quand ils étaient au pouvoir, et à rejeter les mêmes réformes lorsqu’ils étaient ensuite dans l’opposition.
Ainsi la gauche critiquait les privatisations de Raffarin alors qu’elle avait elle-même beaucoup privatisé. Ainsi la droite rejetait les hausses d’impôt décidées pour financer les déficits sociaux, alors qu’elle fait exactement la même chose depuis longtemps.
D’un point de vue économique, la théorie montre également que les réformes ont un impact plus fort sur l’économie d’un pays lorsqu’elles font l’objet d’un consensus. Dans le cas contraire, l’effet des réformes est atténué par les doutes qui portent sur elle et conduisent les acteurs à attendre leur remise en cause : l’impact des 35 heures a ainsi été considérablement amoindri par la force avec laquelle la droit a annoncé, puis réalisé leur assouplissement.
On ne peut donc que saluer l’orientation prise par Nicolas Sarkozy. Mais on peut aussi se demander si elle va réellement aussi loin qu’il y paraît.
Il y a en effet de grandes oubliées de l’ouverture : ce sont les régions, qui sont pourtant aujourd’hui le grand bastion de la gauche, et devraient à ce titre faire l’objet d’une attention toute particulière.
Le président Sarkozy, ancien président de département, marque un dédain superbe à leur égard : il n’en parle même pas, sauf pour dire qu’il refuse que la région Île-de-France fixe les règles d’aménagement de son territoire, sous le prétexte que cette prérogative devrait rester à l’Etat. C’est pourtant la loi Raffarin de décentralisation, votée en 2004, qui prévoit la décentralisation des prérogatives d’aménagement.
Certes, les régions, et Ségolène Royal en tête, ont adopté depuis 2004 une attitude très hostile à l’égard du gouvernement, et particulièrement lors de la négociation des contrats de plan, où elles n’ont pas hésité à mener la vie dure au ministre en charge de l’Aménagement du territoire, un certain... Nicolas Sarkozy.
Mais voilà, l’ouverture ne consiste-t-elle pas précisément à oublier les rancunes du passé ? La droite ne peut pas honnêtement reprocher à la gauche sa réaction hostile face à l’ouverture si, en même temps, elle persiste à ne pas l’écouter là où elle est présente.
Surtout que la question du renforcement des régions est un sujet important pour notre pays :
- le renforcement des pouvoirs économiques des régions peut permettre de valoriser les savoir-faire locaux et de mieux anticiper les restructurations, avec des effets positifs sur l’emploi et la compétitivité ;
- la réforme fiscale devra transférer aux régions une part de TVA et d’impôt sur le revenu, pour les faire sortir de la dépendance aux subventions de l’Etat, et surtout ;
- il faudra créer une conférence des régions, consultée sur les grands projets de loi, qui serait beaucoup plus utile que le Sénat représentatif essentiellement des petites communes du pays.
La main tendue de Nicolas Sarkozy à la gauche ne va pas jusque-là, et c’est dommage : la politique d’ouverture mérite d’aller jusqu’au bout.
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