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Accueil du site > Actualités > Politique > Projet de budget 2011 : l’austérité sans espoir

Projet de budget 2011 : l’austérité sans espoir

Les grandes lignes du projet de loi de finances 2011 ont été officiellement présentées par le gouvernement. Sans surprise, il poursuit son plan d’austérité de réduction des dépenses publiques se fixant l’objectif de ramener le déficit public à 6% fin 2011. La ministre de l’économie allant jusqu’à déclarer « nous y sommes allés à la tronçonneuse »…

Le chef de l’Etat et son gouvernement consacrent donc la rigueur – sans pour autant l’assumer publiquement - en règle imposée pour répondre au dogme de réduction tous azimuts des déficits publics et au diktat des marchés financiers. Les choix fiscaux en sont un exemple frappant. En y consacrant plus de 45 milliards d’euros, le gouvernement fait de la charge de la dette la première dépense de l’Etat !

En réduisant les dépenses qui concernent essentiellement les salariés et les ménages modestes (classes moyennes et précaires), en supprimant les dépenses de fonctionnement et d’investissement de l’Etat, en asphyxiant les collectivités territoriales (ce qui contribue à rendre impossible la mise en œuvre des aides sociales et de solidarité) et en refusant d’investir pour lutter contre le chômage de masse, le gouvernement de François Fillon crée lui-même les conditions pour aggraver les effets de la crise, voire pour en instaurer une nouvelle.

Concomitamment, l’Insee publie le dernier chiffre de la pauvreté en France. Loin des heureux bénéficiaires du bouclier fiscal ou des actionnaires et autres financiers non taxés comme ils devraient l’être, plus de 8 millions de personnes, salariés notamment, vivent au-dessous du seuil de pauvreté avec moins de 950 euros par mois !

Et Nicolas Sarkozy, malgré ses discours sur la moralisation du capitalisme, continue à se situer plus que jamais dans une logique économique ultra-libérale. À cause de la concurrence, de la compétitivité, de l’attirance des capitaux financiers (tout ce qui est à l’origine de la crise), il faut réduire les dépenses publiques et sociales, donc réduire les dépenses notamment en matière de retraite en reculant les âges de départ et en allongeant la durée de cotisation.

Le gouvernement opère de trois façons différentes pour parvenir aux baisses escomptées de salaires, pensions et allocations diverses par rapport à leur niveau de l’année précédente :

  • Baisse ouvertement annoncée

C’est le cas par exemple de l’Allocation aux Adultes Handicapés dont le montant actuel se situe en dessous du seuil de pauvreté et qui, contrairement aux promesses de Nicolas Sarkozy durant la campagne présidentielle, voit son évolution programmée revue à la baisse reportant à une échéance de quatre années son augmentation prévue.

  • Baisse de fait après une augmentation inférieure au taux d’inflation.

C’est le cas par exemple du montant des différentes prestations familiales qui est fixé en pourcentage de la base mensuelle de calcul des allocations familiales (BMAF). Cette base est revalorisée chaque année par décret mais sans tenir compte de l’augmentation réelle du coût de la vie. C’est le cas aussi des rémunérations des fonctionnaires qui sont bien majorées mais d’un pourcentage inférieur à celui du taux d’inflation.

On peut noter à ce sujet que la plupart des médias « bien-pensants » nous présentent systématiquement ces revalorisations minimes comme des augmentations et donc comme un progrès alors qu’il s’agit en réalité de baisses !

  • Baisse par un pur blocage

C’est une variante de la méthode précédente mais en plus brutale. La baisse réelle est ainsi plus importante que dans le cas d’une majoration inférieure au taux d’inflation.

Au final, de très nombreuses allocations, prestations, pensions, rentes, indemnités servies par une série d’organismes diminuent à des degrés divers (c’est aussi le cas pour les salaires depuis le tournant de la rigueur en 1983…) et conduisent à une véritable paupérisation des salariés et de leurs familles.

  • Le financement des retraites et de la Sécurité sociale

S’agissant du financement des retraites et d’une façon générale de l’ensemble des branches de la Sécurité sociale, ce budget 2011 ne résoudra rien. Ni la réforme des retraites, ni les plans d’économie de l’assurance maladie sur le dos des assurés sociaux (par une multitude de franchises médicales et de déremboursements de médicaments…) ne sont à la hauteur des enjeux financiers.

Quelques propositions simples permettraient pourtant de régler définitivement le problème des déficits chroniques de la Sécurité sociale : la création d’une cotisation universelle, accompagnée d’un changement d’assiette significatif.

L’assiette salariale des cotisations actuelles est en effet largement inappropriée car les salaires ne reflètent pas la réalité des revenus perçus et déclarés à l’administration fiscale. De plus, une part importante n’est pas soumise à cotisation (intéressement, participation, stock-options…). La cour des comptes évaluait, en 2009, à près de 10 milliards d’euros le manque à gagner pour les caisses de protection sociale.

Il suffirait donc d’élargir la CSG actuelle à toutes les personnes physiques, salariées ou pas, s’appliquant sur une assiette commune constituée par le revenu fiscal pour accroître sensiblement les rentrées financières. A taux égal en effet, un point de cotisation sur le revenu est plus rémunérateur qu’un point basé sur le seul salaire. Un point de CSG sur l’ensemble des revenus représente près de 12 milliards d’euros ! Cette cotisation universelle de Sécurité sociale pourrait même être fusionnée avec l’IRPP afin de la rendre progressive, plus juste et encore plus rémunératrice.

En ce qui concerne les cotisations patronales, elles s’appliquent là-aussi sur les seuls salaires. Cette situation est tout à fait anormale car les sociétés ayant une forte masse salariale mais une faible valeur ajoutée (sociétés de main d’œuvre par exemple) sont pénalisées par rapport à celles ayant une faible masse salariale et une haute valeur ajoutée. C’est pourquoi, aux cotisations patronales pourrait s’ajouter une contribution basée sur la valeur ajoutée dont le montant pourrait être égal au minimum à l’équivalent de l’augmentation d’un point de la cotisation patronale actuelle (4 à 5 milliards d’euros).

Mais un budget équilibré et capable de répondre aux besoins de plus en plus importants d’une République sociale ne peut se concevoir sans une réforme fiscale d’ampleur visant à rétablir un véritable impôt républicain progressif et à supprimer ou plafonner un certain nombre de dispositifs particulièrement scandaleux (pléthore de niches fiscales, exonération des grosses successions, quotient familial, bouclier fiscal, dispositif d’allégement des plus-values, dit parfois "niche fiscale Copé", exonérations de charges patronales, etc.)

Toutes les diminutions fiscales, introduites depuis dix ans, font perdre aujourd’hui 90 milliards d’euros aux finances publiques ! Les fraudes à l’impôt et aux cotisations sociales coûtent entre 30 et 50 milliards d’euros par an à l’État ! A titre de comparaison, l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés ont rapporté un peu plus de 100 milliards d’euros au budget de l’État en 2008 !

Enfin, une politique plus active en matière d’emplois et plus soucieuse en matière de maintien du pouvoir d’achat permettrait d’enregistrer des rentrées financières supplémentaires (1% d’augmentation des salaires équivaut à 700 millions d’euros de recettes supplémentaires pour la seule caisse vieillesse).

Mais Nicolas Sarkozy et sa majorité présidentielle UMP-Nouveau Centre préfèrent aujourd’hui réduire les impôts sur le revenu et privilégier (sans le dire) la fiscalité indirecte (impôts locaux, taxes foncières, TIPP, TVA, forfaits hospitaliers et franchises médicales de toute sorte, etc…) qui représente la bagatelle de 83% du total des recettes fiscales, faisant de la France l’un des pays les plus inégalitaires d’Europe…


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6 réactions à cet article    


  • Gabriel Gabriel 21 octobre 2010 09:51

    Les grands financiers par le biais des gouvernements serviles ordonnent et imposent des budgets qui étranglent les populations européennes afin de mieux les asservir. Leurs actions pour la paupérisation et l’esclavage des citoyens de l’UE sont passées à la vitesse supérieure. La servilité des masses passe obligatoirement par un appauvrissement généralisé, ainsi ils pourront asseoir un pouvoir sans partage. Ce nouveau monde qu’ils appellent de leurs vœux est entrain de s’imposer par le désordre et la violence. Rappelons nous cet citation d’Arthur Koestler : « Si l’homme ne peux s’endormir dans une société totalitaire, il risque de se réveiller dans un monde qui le soit devenu durant son sommeil » 


    • frugeky 21 octobre 2010 10:53

      L’AAH n’augmente pas et les remboursements des ALD (affections longue durée) diminuent ce qui obère encore plus les revenus des adultes handicapés déjà sous le seuil de pauvreté.

      On va pas épiloguer sur les « augmentations » en dessous du seuil de l’inflation, ça fait des années que ça dure. Voire la part des revenus des salaires dans le PIB qui, comme répété partout, aurait baissé de dix points en vingt ans et que c’est pas fini...

      Pas tellement d’accord sur l’augmentation d’un point de la CSG. Commençons d’abord par taxer ce qui n’est pas soumis (comme vous le soulignez d’ailleurs). Ça fait des années qu’on fait des réformes pour équilibrer les comptes qui ne cessent de se dégrader du fait de politique de redistribution vers les plus aisés ou les entreprises à la moindre disponibilité de cash ! Ceux-ci d’ailleurs sont systématiquement épargnés par les nouveaux efforts promis à la majorité sous prétexte de préserver l’emploi (les chiffres du chômage sont là pour prouver que ça ne fonctionne pas) ou pour éviter la fuite des riches qui, de toute façon, défiscalisent tout ce qu’ils peuvent. On en arrive à des aberrations où une multimilliardaire est taxée à moins de 10% sur ses revenus quand une infirmière en fin de carrière (environ 2400 euros, veuve) est taxée à environ 15% (cas que je connais).

      Oui, réforme de l’impôt sur le revenu et élargissement de l’assiette. En 1994 (il me semble), un article de Christian de Brie dans le Monde Diplomatique parlait déjà de ça. Le problème est connu depuis longtemps mais rien n’a été fait dans ce sens bien au contraire.
       


      • Daniel Roux Daniel Roux 21 octobre 2010 10:56

        Sarkozy veut faire oublier les conséquences néfastes de sa politique partisane en faveur des grands bourgeois.

        « Le paiement des intérêts de la dette deviendra en 2011 le premier poste du budget : 46,9 milliards, contre 44,5 pour l’Education nationale (et 30,1 pour la défense). Avant même de songer à la moindre dépense publique, il faut déjà réserver 46,9 milliards pour payer les intérêts de la dette ! Et encore sommes-nous dans une période de très faibles taux d’intérêt. [...] Leur parler d’une dette publique qui a dépassé les 1600 milliards, c’est trop abstrait. Mais on peut leur dire qu’elle représente plus de 25 000 euros par personne. »

        http://www.chretiente.info/20101013...

        En bref, la France est en perdition par la faute de l’oligarchie qui s’en croit propriétaire. A nous de leur démontrer leur erreur.


        • wesson wesson 21 octobre 2010 13:49

          Bonjour l’auteur,

          les éléments de langages sont déjà prêt :

          « Regardez ce qu’ils font en Angleterre, et estimez-vous heureux ... »


          • BA 24 octobre 2010 14:07

            Nicolas Sarkozy bat son record d’impopularité selon notre baromètre Ifop-JDD. La loi sur les retraites va être votée mercredi et pourtant le mouvement continue.

            Sept français sur dix sont mécontents de Nicolas Sarkozy.

            Selon le baromètre Ifop-Journal du Dimanche , jamais le président de la République n’a été aussi impopulaire depuis le début de son quinquennat.

            Il égale même le record historique d’impopularité depuis 1958.

            Avant lui, seul Jacques Chirac avait atteint un tel niveau.

            A dix-huit mois de la prochaine élection présidentielle, Nicolas Sarkozy va devoir se transformer en magicien pour retourner un pays qui a basculé dans un antisarkozysme de plus en plus virulent.

            http://www.lejdd.fr/Politique/Actualite/Le-conflit-se-concentre-sur-le-president-228977/


            • Marc Bruxman 24 octobre 2010 16:21

              Les Anglais étaient mécontent de Tatcher et maintenant ils l’aiment. Le risque c’est que je crains que le gouvernement n’aille pas assez loin dans ses réformes pour nous créer plus de 20 ans de croissance facile. Les Anglais eux ont compris et vont refaire ce qu’il faut. On s’étonnera alors pourquoi il y a de la croissance à Londres et pas chez nous. 


              Parce que même si la crise a été plus violente chez eux que chez nous, si vous prenez la période 1990-2010 et comparez la croissance des deux pays, mieux valait vivre en Angleterre qu’en France. 

              Voila les Français ralent mais ils seront bien content quand les finances publiques seront assainies et la croissance de retour. 

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