PS : OPA des éléphants sur les « Reconstructeurs »
Faire du neuf avec du vieux. L’idée n’est pas nouvelle. C’est par ce biais que la vieille garde du PS (Fabius, Lang, Aubry) a choisi de se positionner en vue du prochain congrès en apportant leur soutien ou en participant activement à la démarche des Reconstructeurs. Une petite claque aux « petits jeunes » à l’initiative de l’alliance, les Montebourg, Dray et Moscovici dont les deux derniers n’ont pas caché leur aspiration à devenir Premier secrétaire.
L’irritation était visible dimanche soir sur le visage de Pierre Moscovici. Il faut dire que la réunion censée promouvoir et structurer l’objectif des reconstructeurs de constituer une force d’interposition entre Bertrand Delanoë et Ségolène Royal a tourné en one-woman-show de Martine Aubry. Difficile à admettre quand le pôle des Reconstructeurs se veut un exercice collectif et novateur. Difficile à digérer quand, pour faire passer la pilule, on vous sert une rasade de Fabius et de Lang.
« C’est le mouvement je crois le plus novateur », a déclaré Laurent Fabius à Europe 1, évoquant « des responsables et militants qui viennent de sensibilités différentes (et) décident de travailler ensemble sur le fond et de rechercher des solutions communes pour une gauche décomplexée et qui puisse gagner ».
Jack Lang, plus distant, mais soucieux de préserver ses intérêts au cas où, s’est borné à qualifier samedi « d’initiative positive » la réunion des Reconstructeurs du PS, estimant qu’elle pourrait déboucher sur « un rassemblement le plus large possible des talents, des énergies, des capacités ». L’ancien ministre de la Culture a expliqué, avec d’autres élus du Pas-de-Calais, être disposé à soutenir une contribution dont une des premières signataires serait Martine Aubry.
Une réunion plus tard, les Reconstructeurs se trouvent donc subitement ringardisés, étiqueté cartel des non face aux aspirations Delanoë-Royal. Volonté de nuire ou volonté de construire, Martine Aubry n’a jamais caché son aversion à l’égard de Ségolène Royal. Beaucoup gardent en mémoire sa petite phrase décochée en août 2006 à La Rochelle à l’égard de celle qui allait devenir la candidate des socialistes : « je ne suis pas née moi pour être présidente de la République ». La fille de Jacques Delors n’a rien perdu de son acidité désormais étendue à Bertrand Delanoë : « Nous sommes tout simplement socialistes, sans besoin d’y ajouter d’autre qualificatif. Cela se suffit à soi-même. Ceux qui ont honte de le dire n’ont rien à faire dans notre parti. » Ségolène Royal et sa démocratie participative n’a pas été oubliée : « Je n’ai rien dit, mais je ne me suis pas sentie bien. On avait oublié que, le politique, c’est donner une vision, un sens et pas demander à chacun ce qu’il veut ».
Etrange retour sur le devant de la scène de la maire de Lille. La dame des 35 heures se présente aujourd’hui comme l’incarnation de la résistance au rouleau compresseur sarkozyste. « Touche pas à mes 35 heures » ne saurait pourtant être un slogan d’avenir. En 2002 pourtant, ces mêmes 35 heures, par le désordre qu’elles avaient généré dans leur mise en œuvre, avaient été accusées d’être responsables de la défaite de la gauche.
Alors que Delanoë et Royal chassent à droite du parti, la maire de Lille tente de séduire la gauche du parti. « Je suis fière des congés payés, de l’abolition de la peine de mort et des 35 heures… Je veux retrouver la gauche collective, créatrice, solidaire et joyeuse ; laissons de côté nos querelles dépassées ! », a-t-elle lancé, en conclusion du meeting de dimanche. Ca fera certes plaisir aux fabiusiens, mais aux autres ? Car la difficulté est bien là, donner de la consistante à un attelage des plus hétéroclites.
Derrière cette montée en puissance surprise de Martine Aubry, on devine la patte de Laurent Fabius. Le retrait de celui-ci des instances nationales au profit de son lieutenant Guillaume Bachelay n’était qu’un simple affichage. Ses ambitions sont intactes : l’Elysée. En vieux fauve de la politique, l’ancien Premier ministre sait composer, jouer des rivalités et placer ses hommes de main aux endroits stratégiques. Claude Bartolone, par exemple, présent dès le départ dans les négociations pour la constitution du pôle des Reconstructeurs. Marginalisés jusqu’alors, les fabiusiens ont trouvé une bouée de sauvetage dans une alliance qu’ils comptent bien retourner en leur faveur. « Le test, ce sera le moment de la motion, à la rentrée », précisait Claude Bartolone, qui se félicitait que « l’alternative prenne si vite » se léchant par avance les babines, tout comme son mentor.
A l’inverse, Manuel Valls est sceptique. « Ca ne marchera pas », a-t-il déclaré sur France 2, se prononçant contre l’idée “de rassembler tous ceux qui ne veulent ni Delanoë ni Ségolène Royal” à la tête du PS. Manuel Valls prône une relève “générationnelle”. Un sentiment que doivent partager Arnaud Montebourg, Julien Dray et Pierre Moscovici.
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