Quand Sarkozy annonce des chiffres faux pour justifier sa future politique carcérale
Lundi, devant le Congrès, Nicolas Sarkozy a lancé une statistique assez lourde de sens (mais pénalement non répréhensible) au sujet des prisons françaises : « Comment peut-on parler de justice quand 82.000 peines sont non exécutées parce qu’il n’y a pas assez de place dans nos prisons ? »
Pas de hasard, ce chiffre n’était destiné qu’à justifier la suite de son discours présidentiel : « Nous construirons donc d’autres prisons (...). Ce sera un impératif du prochain gouvernement ». Autrement dit, selon le raisonnement de Sarkozy, la construction de nouvelles places permettrait enfin d’exécuter les peines d’emprisonnement prononcées par les tribunaux.
Quid de la réalité ? Mediapart.fr vient analyser cette propagande présidentielle :
Selon une officielle étude du ministère, (en 2001) les tribunaux correctionnels ont prononcé 79.515 peines d’emprisonnement ferme qui devaient être exécutées.
Dans cette masse, 54% des condamnations à des peines d’emprisonnement (soit 43.000 dossiers) ont été suivies d’un passage derrière les barreaux dans les 18 mois.
- Les places en cellules n’ont donc pas manqué, pour la majorité des condamnés, contrairement à ce qu’avance le discours de Versailles.
- Le raisonnement du chef de l’Etat souffre d’un autre défaut : la non-application des autres 46% des condamnations ne relève pas vraiment du manque de places dans les établissements pénitentiaires...
Contrairement au discours sarkozyste, la plupart de ces peines de prison ferme non appliquées au bout de dix-huit mois (26.500 personnes condamnées) renvoient à des motifs strictement juridiques... et non pas au manque de places de prison. (Il s’agissait de condamnations non définitives, pour l’essentiel, ou bien encore de mesures de grâce ou d’amnistie).
Pour le reste, il s’agit de difficultés pratiques de mise à exécution des peines prononcées avec, au premier rang, l’absence de domicile connu des intéressés
A ce jour, la France est surtout montrée du doigt pour la surpopulation de ses prisons (63.200 détenus pour 53.000 places, selon les chiffres officiels les plus récents) et pour l’importance des suicides de détenus. Sur ce point là, on attend toujours les solutions de Nicolas Sarkozy.
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