Quid des nominations au ministère de la culture
La Ministre de la culture Aurélie Filippetti a fait grand bruit en annonçant dans un entretien avec le journal le Monde l’abandon de nombreux projets culturels pour raison de restrictions budgétaires. Ce n’est jamais bien agréable Pour autant le « mètre étalon » des points gagnés dans l’obtention d’un budget ne saura être l’alpha et l’oméga d’une politique. Le parti Socialiste étant au pouvoir, il lui sera loisible d’ouvrir un grand chantier de réformes attendues par tous les professionnels de la culture : les nominations ! L’objectif de parité ne dépendant en aucune manière de la manne financière.

Mettre fin à l’omniprésence de l’Elysée dans les nominations.
Les pratiques du temps de Sarkozy et Frédéric Mitterrand étant assez pitoyables, on peut espérer une « éclaircie du changement » sur ce terrain là. Souvenons-nous de la manière dont fut débarqué sur la demande de Carla Bruni, Olivier Py du théâtre de l’Odéon, pour laisser la place à Luc Bondy. Face aux réactions exaspérées des professionnels, dans l’urgence, le même pouvoir nomma de manière anticipée (pour 2013) Olivier Py à la tête du festival d’Avignon au grand dam de ses actuels dirigeants.
Dans ce premier état des lieux on peut stigmatiser des situations de cumuls inexplicables et inadmissibles. Au-delà des personnes , qui sont des personnes de qualité, on ne peut s’empêcher de citer les cas d’Emmanuel Demarcy-Mota[1] qui cumule la direction du Théâtre de la ville à Paris et du festival d’Automne, de Laurent Bayle qui est à la tête de la Cité de la Musique à Paris, de la salle Pleyel, du Philharmonique et de Didier Fusillier qui fait le grand écart entre Le Manège à Maubeuge et la Maison des arts à Créteil et il est aussi en charge du projet d’aménagement des berges de la Seine rive gauche à Paris. Pourtant on ne peut pas dire que l’on manque de talent artistique en France !
Il serait temps de faire le ménage rue de Valois pour donner plus de transparence aux nominations. D’autant plus qu’un train de nominations se profile à l’horizon : Musée d’Orsay, Louvre et Bibliothèque national de France, rien que cela les principaux vaisseaux amiraux de la culture auxquels il faut encore ajouter : le Musée Picasso, la Cité de la Musique, l’Opéra de Paris… et une multitude de centres dramatiques Nationaux (CDN).
Donner de la transparence dans les choix.
Le Syndéac (Syndicat qui regroupe les patrons des grands établissements du spectacle vivant), légitime par ses origines, a formulé quelques critiques et esquissé quelques propositions pour améliorer le système de nomination. Tout d’abord il s’agit de mettre fin au principe de la nomination discrétionnaire. Il propose d’opérer comme cela se fait déjà pour les CDN, à savoir la mise en place de jury composé de représentants des organisations professionnelles.
Outre le scandaleux problème des cumulards auquel il convient de mettre un terme, il demande aussi sur la question des rémunérations de la transparence et l’encadrement de celles-ci. Enfin et pas la moindre il pose l’exigence de la parité dans ces nominations.
Etat des lieux de la parité.
Il existe un intéressant rapport, passé sous silence, celui sur les inégalités hommes femmes dans le spectacle vivant (2009), il constate que si trois des cinq postes de direction des théâtres nationaux étaient occupés par des femmes, seul sept des trente-neuf CDN le sont par des femmes. Et qu’enfin aucun orchestre n’est dirigé par une femme ! Et aujourd’hui que constate-t-on ? Que le nombre de 3 est tombé à deux pour les théâtres nationaux et à cinq pour les CDN.
De son côté la SACD s’est emparé de la question à l’occasion d’un colloque au Sénat en rendant public les chiffres suivants :
· 81,5% des postes dirigeants de l’administration culturelle sont occupés par des hommes
· 75% des théâtres nationaux sont dirigés par des hommes
· 96% des opéras sont dirigés par des hommes
· 70% des centres chorégraphiques nationaux sont dirigés par des hommes
· 85% des centres dramatiques nationaux sont dirigés par des hommes
· 95% des concerts sont dirigés par des hommes
Ses propositions pour y remédier sont :
- Systématiser le recensement statistique des inégalités, ceci pour mettre en évidence tous les indicateurs nécessaires afin de suivre d’éventuels progrès. Il s’agit de poursuivre les travaux déjà entrepris par Reine Prat en 2006 et Laurence Equilbey en 2011. Un observatoire des inégalités devrait être ainsi créé.
- Recenser c’est bien, mais il faut aussi communiquer et sensibiliser les élus et les responsables d’administration sur cette question. La place des femmes doit être une des principales données des politiques culturelles
Il y a donc un sacré travail à faire pour promouvoir l’égalité hommes/femmes Et le fait que ce soit une femme qui dirige la rue de Valois devrait favoriser une politique d e nomination plus paritaire. On peut aussi souhaiter que la ministre en charge des droits des femmes sache accompagner la rue de Valois dans ce changement qui lui ne coûtera pas un euro.
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