Redécoupage, chômage, code du travail : Bruxelles ordonne, @FHollande exécute
Victor Hugo avait eu une incroyable prémonition. Nous sommes en 1849. Le 21 août très précisément. Il prend la parole pour ouvrir le congrès de la paix. Il préconise une Europe des peuples, une Europe qui s’affranchit des frontières, qui s’affranchit donc des différences qu’induit l’appartenance à une nation. Il finit son discours ainsi :
« Dans notre vieille Europe, l’Angleterre a fait le premier pas, et par son exemple séculaire a dit aux peuples : Vous êtes libres. La France a fait le second pas, et elle a dit aux peuples : Vous êtes souverains. Maintenant faisons le troisième pas, et tous ensemble, France, Angleterre, Belgique, Allemagne, Italie, Europe, Amérique, disons aux peuples : Vous êtes frères ! »
L’europe doit-être ce territoire d’échange, de coopération, de fraternité qui, en abolissant les frontières physiques comme psychiques, conduit à la paix grâce à une convergence internationaliste, une convergence vers le progrès. Lire ce texte dans son intégralité nous a fait comprendre pourquoi, A gauche pour de vrai, nous sommes europhiles jusqu’au bout des ongles. Ce projet d’une convergence internationale sociale, culturelle, et économique des peuples, dans un esprit de liberté, d’égalité et de fraternité préfigure cette fabuleuse utopie d’une paix qui devrait durer et durer encore. Cette Europe là, que l’on dénomme « sociale et politique » et que l’on théorise depuis l’amorce de la construction européenne des temps modernes n’a, en réalité, jamais été posée comme le socle fondateur de notre avenir commun d’Européen.
A la place, Ils nous construisent l’Europe de la concurrence, de la compétition, du moins disant économique et sociale, en se soustrayant totalement des décisions souveraines des peuples et de leurs représentants. Ils battent la monnaie en autonomie totale, agissant sans aucune tutelle politique, dans la plus anarchique dérive des marchés financiers. L’instrument de cet insurrection permanente porte le nom de BCE, une banque centrale qui n’a de compte à rendre qu’aux spéculateurs qu’elle sert, certainement pas aux peuples et à leurs représentants élus. Ni les USA, ni la Chine, ni le Japon ne tolèrent une telle anarchie, une telle chienlit, et interviennent sur leurs banques centrales respectives pour qu’elles servent les intérêts de leurs populations. Le problème n’est donc en aucune façon l’Euro, un outil qui devrait servir à resserrer la coopération entre les « frères européens » dont rêvait Victor Hugo, qui devrait servir à financer les harmonisations sociales par le haut. Le problème est cet Etat dans l’union, cet Etat totalement illégitime car non élu, que nous nommons à nouveau : la BCE.
La forfaiture ne s’arrête pas là. Nous ne nous appuierons dans ce trop court billet, car nous ne voulons pas vous épuiser, sur les toutes dernières recommandation de la commission envoyées à la France le 2 juin 2014, c’est à dire 24 heures seulement avant que François Hollande, président de la république française, ne dévoile « sa nouvelle vision » du territoire français et comme cela va de soi, après les élections du 25 mai. Ces recommandations ne visent qu’un seul objectif : la compétitivité, la concurrence, la déliquescence de nos liens sociaux. En un mot comme un seul, l’inverse d’une Europe sociale mais bien davantage une Europe de la guerre économique entre les peuples.
1er extrait. Attention c’est du lourd ! La commission incite la France
« à fixer un calendrier clair pour le processus de décentralisation en cours et à prendre des mesures préliminaires, d’ici à décembre 2014, en vue d’éliminer les doublons administratifs, de faciliter les fusions entre les collectivités locales et de préciser les responsabilités de chacun des échelons des collectivités locales ; fixer un plafond pour l’augmentation annuelle des recettes fiscales des collectivités locales tout en réduisant comme prévu les subventions octroyées par l’état ».
Ainsi vous comprenez pourquoi l’atelier de coloriage élyséen a été si soudain et pourquoi François Hollande a rendu sa copie d’une nouvelle carte des régions aux « polit bureau » de commissaires autoritaires le 3 juin, soit dès le lendemain de l’injonction de la commission.
Ce 2eme extrait envoie du très très lourd. Vous pensiez que le gouvernement de François Hollande avait été au bout du bout de la trahison en matière de retraite lorsqu’on se prétend socialiste ? Au bout du bout de l’appauvrissement de notre système de santé hospitalier et pharmaceutique ? En réalité nous ne sommes même pas au milieu de la route qui conduira ce gouvernement et la gauche dans son ensemble à la déroute. Voici donc l’ordre de la commission concernant notre système de retraite et notre système de santé qui consiste :
« à prendre des mesures pour, au-delà de la nécessité de réaliser des économies à court terme, contrer l’augmentation des dépenses publiques prévues dans le secteur des soins de santé à moyen et long termes, y compris dans le domaine pharmaceutique, et à prendre des mesures supplémentaires en temps utile et en fonction des nécessités pour ramener durablement le système des retraites à l’équilibre d’ici à 2020, en se concentrant tout particulièrement sur les régimes spéciaux existants ; »
Mais le polit bureau de la commission entend également intervenir, que disons-nous, ordonner l’accélération de la précarisation au travail, l’accélération des baisses de salaires, et en particulier les plus bas revenus à travers ce 3eme extrait. A l’ère de la compétitivité, l’homme est une ressource comme une autre. Il faut donc, quand on est un commissaire, négocier son prix, le rabaisser au plus bas, et pourquoi pas :
« à réduire encore, d’une manière neutre sur le plan budgétaire, les coûts salariaux, en particulier aux niveaux les plus bas de l’échelle des salaires, notamment par des réductions ciblées des cotisations sociales patronales »
Mais le chômeur est lui aussi dans le collimateur des commissaires. Ainsi incitent-ils :
« à prendre des mesures supplémentaires pour réformer le système d’allocations de chômage, en association avec les partenaires sociaux, pour garantir la viabilité du système tout en faisant en sorte que celui-ci encourage de manière adéquate le retour à l’emploi ; à étoffer l’offre de conseils et de formations pour les travailleurs âgés et à réévaluer les dispositions spécifiques pertinentes en matière d’allocations de chômage ; »
Là, il faut un décodeur. Garantir la viabilité du système tout en encourageant le retour à l’emploi signifie baisse du montant et baisse de la durée des indemnités. La thèse des commissaires est d’une simplicité presque sadique : enfoncer sous l’eau une personne qui se noie pour l’obliger à sortir la tête de l’eau par un réflexe de survie. D’évidence, ces commissaires n’ont jamais cherché de travail en période de crise économique systémique.
Enfin, finissons par le clou, l’apogée, l’apothéose, le feu d’artifice. Les commissaires souhaitent que le salarié français ne se repose plus le dimanche, qu’il soit en situation de concurrence permanente, sous pression constante. Bref, que le burn out devienne la nouvelle norme sociale des entreprises. On comprend mieux, dès lors, pourquoi il faut mettre fin au seuil sociaux, c’est à dire abolir toutes formes de représentations syndicales en entreprises. Au cas où les représentants s’inquiéteraient un peu trop de la prévention des Risque Psycho-sociaux, au cas où les CHSCT seraient débordés de travail…Ainsi faut-il :
« promouvoir la concurrence dans les services ; à prendre des mesures supplémentaires pour réduire les contraintes réglementaires auxquelles est soumis le fonctionnement du secteur du commerce de détail, notamment en simplifiant les autorisations d’ouverture de points de vente et en supprimant l’interdiction de la vente à perte ; »
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