Sarko le socialo !
En décidant de ne plus considérer que la compétence et en introduisant des critères sociaux à l’entrée en classes préparatoires, N. Sarkozy se révèle plus socialiste que les socialistes... Pour le plus grand malheur de notre pays...

Qui aurait pu penser en écoutant les discours de N. Sarkozy pendant la campagne présidentielle de 2007, qu’il serait plus socialiste que S. Royal et même que les socialistes de la première ère Mitterrand en 1981 ? Pourtant, force est de constater que les éléments pour penser cela s’accumulent.
Nous n’analyserons ici qu’une décision du chef de l’Etat mais auparavant nous citerons, pêle-mêle, les faits suivants : presque parité entre ministres de gauche et de droite dans le gouvernement Sarkozy, retour au sein de l’alliance Atlantique dans le commandement intégré de l’OTAN dans la droite ligne de la décision de F. Mitterrand, soutien inconditionnel des banques lors de la crise dans le prolongement de ce qu’ont fait les socialistes lorsqu’ils étaient au pouvoir en faveur des banques (libre circulation des capitaux,...), etc..
Mais revenons au sujet qui nous intéresse, à savoir la très récente décision de M. Sarkozy de retenir, comme critère de compétence pour entrer en classe préparatoire, le fait d’être boursier. Rappelons à ceux qui l’auraient oublié, que F. Mitterrand, dans ses 110 propositions, avant son accession à la présidence de la république, voulait supprimer lesdites classes préparatoires ainsi que les grandes écoles. Certains se sentiront rassurés de voir que ce n’a pas été le cas mais, pourtant, je vais prendre ici le contre-pied d’une telle opinion et montrer rapidement qu’en réalité, l’opération s’est faite sournoisement mais efficacement.
En effet, depuis 1981, le nombre d’écoles d’ingénieurs à plus que doublé et le nombre d’élèves dans les promotions des écoles existant alors à plus que doublé lui aussi. Dans le même temps, le métier d’ingénieur ne devenant plus attrayant, il y a plus de places aux concours que de candidats ou peu s’en faut, ce qui était loin d’être le cas en 1981 ! Aussi, si les grandes écoles ont représenté, à une époque, une élite de la nation, ce n’est plus le cas et de loin, tant par la qualité de leur recrutement que par leur niveau d’exigence. Je ne donnerai ici aucune preuve concrète et renvoie le lecteur à d’autres articles que j’ai pu publier sur le sujet et notamment 2 ouvrages, « logique de défense : 30 idées en 200 pages » (mai 2008) et « Ainsi marchait l’humanité » (à paraître janvier 2009).
Ainsi, N. Sarkozy détruit, comme les socialistes qui l’ont précédé, l’élitisme qui était né du pacte gaullo-communiste de l’après-guerre. Voilà donc une pierre de plus apportée au sujet mais c’est loin d’être tout. L’élite qui a été formée sous le pacte gaullo-communiste avait pu prendre forme car elle satisfaisait, à l’époque, deux conceptions de la société qui trouvaient un intérêt commun. La droite réactionnaire voulait davantage de profits et avait donc besoin d’une élite de premier rang mondial, ce qui, au passage, permettait à la France de garder le statut de grande puissance qui était cher au Général. Les communistes, eux, souhaitaient une méritocratie dans laquelle le méritant, quelle que fut son origine, pouvait prétendre aux plus hautes fonctions dans la nation, et ce fut effectivement le cas, beaucoup de nos hommes de premier plan étant issus des classes populaires.
Aujourd’hui, remplacer la méritocratie par un critère social, quel qu’il soit, y compris celui de boursier, revient à détruire le rêve communiste de la revanche méritocratique des classes. Et c’est bien dommage ! En effet, le « parachuté » social qui devra plus sa place à un système inique qu’à son propre mérite, quelle audience pourra-t-il avoir auprès de ses soi-disant pairs ? Comment se construiront les stratégies pour aller vers ces parcours gratifiants (fraude du fisc, familles volontairement monoparentales, domiciliation partielle à l’étranger,...) ? Et, pendant ce temps, que va faire le peuple qui sera victime de ce qui s’appelle, aux USA, la « reverse discrimination » ? Nous n’en avons pas fini, loin s’en faut.
Clairement, avec un critère social autre que la seule compétence de l’élève, on va diminuer encore une fois, le niveau. Or, notre pays est engagé dans une compétition économique impitoyable. Diminuer, de fait, le niveau, va affaiblir irrémédiablement notre pays dans cette compétition et cela va créer, sans nul doute, une cohorte supplémentaire de boursiers que M. Sarkozy, s’il est toujours au pouvoir, voudra bien caser quelque part...
Il veut ouvrir par ailleurs la fonction publique à la diversité... Ainsi, la fonction publique déjà aujourd’hui bien décriée et souvent, fort heureusement, à tort, va se trouver frappée de plein fouet par une baisse de compétence intrinsèque, de facto ! Si aujourd’hui on peut déjà craindre quant à notre avenir, clairement, la réforme Sarko laisse envisager le pire !
Evoquons rapidement l’épisode où, M. Sarkozy, fraîchement élu, a fait lever sa femme à 4 heures du matin pour aller voir à Rungis, « la France qui se lève tôt ». M. Sarkozy qui s’est fait, pour l’occasion, le chantre de cette catégorie socioprofessionnelle, vient de la trahir en annonçant sa mesure. En effet, parmi la gent des élèves, ceux qui font les classes préparatoires ne sont-ils pas ceux qui se lèvent plus tôt que les autres, se couchent plus tard que les autres, entre les deux ont travaillé au lieu de succomber à la Game Boy ou autre débilité de notre temps ? Or, les socialistes, en leur temps, ont eu cette même démarche avec l’ENA quand ils ont ouvert le parcours de complaisance pour les syndicalistes à l’époque, seule condition requise pour être admis dans les rangs de la future élite. Or, non seulement c’est a posteriori un échec puisqu’aucun « syndicaliste-énarque » n’a réellement fait partie de l’élite mais cette voie a fini par être supprimée tellement elle baissait le niveau de l’école et détériorait son image.
La vision de M. Sarkozy laisse pantois quant à l’idéologie qu’elle sous-tend et nous allons aller, là, bien plus loin. En effet, monsieur Sarkozy explique que l’on doit ouvrir les portes des endroits où l’on fabrique l’élite aux défavorisés, sans regard réel sur leur compétence. Cela sous-entend que seule la formation dispensée permet de faire ensuite partie de l’élite indépendamment de la qualité de l’élève. Ainsi, pour faire l’Ecole Normale Supérieure, il suffirait d’être boursier, de faire la demande ad hoc, de suivre les cours et hop, vous voilà propulsé ministre ou commissaire à quelque « machin » d’état... Où sont passés les Lafforgue, Lions et autres médaillés Fields français qui ont porté leur art plus haut que tous leurs concurrents du monde entier ?
Pis. L’élite ne peut sortir que de l’école ; avec Sarko, si vous n’avez pas fait les grandes écoles, vous ne pouvez pas faire partie de l’élite... Mais alors, comment Pierre Bérégovoy est-il devenu premier ministre ? Comment, chaque jour, des autodidactes font-ils pour monter leur entreprise ? Comment Patrick Simpson-Jones est-il devenu une vedette, puis un chef d’entreprise et de surcroît inventeur ? Etc.. La vision de M. Sarkozy semble être celle d’une société figée dans laquelle, pour réussir, il suffit de suivre un certain cours pendant 3 ans de sa vie entre, disons, 20 et 23 ans. Si cela n’est pas du déterminisme social qu’est-ce que c’est ? Et le déterminisme social n’est-il pas une forme de socialisme ?
Le lecteur remarquera au passage que l’université française, dans la vision de M. Sarkozy, n’est pas un lieu d’excellence et qu’elle ne forme pas l’élite. Merci pour les profs de fac ! Mais notre président qui voyage quand même pas mal de par le monde, serait bien inspiré de comprendre que le seul pays au monde qui a un système du type grandes écoles et classes prépas est la France. Tous les autres pays n’ont que des universités et depuis belle lurette, les plus brillants de notre système éducatif ne vont plus réellement dans les grandes écoles d’ingénieurs françaises mais bien dans les universités américaines et, plus récemment, même dans les universités chinoises, car, là-bas, le critère n’est pas la bourse mais la performance... Pourquoi donc ce dédain pour l’université française qui est la seule à réellement pouvoir rivaliser avec ses concurrentes internationales et qui, au passage, est la seule à pouvoir délivrer le diplôme de doctorat plus connu sous le nom de PhD dans les universités anglo-saxonnes ?
Revenons sur la diversité. Tout d’abord, attardons-nous sur les consonances des noms des élèves aujourd’hui en majorité dans les classes préparatoires et les grandes écoles. Par expérience de maintenant 18 ans, les noms sont d’origines italienne, espagnole, portugaise, polonaise... Bref ! Une diversité liée à l’immigration d’il y a plusieurs décennies. C’est donc bien que l’intégration a eu lieu au moins pour certaines populations. Or monsieur Sarkozy, en voulant forcer une certaine diversité, sans la préciser, ne va obtenir au final, qu’une diversité de niveau et il aura par la même occasion discriminé négativement les descendants d’immigrés italiens, espagnols, portugais, polonais... Qui, avec leurs ascendants ont davantage donné au pays que les nouveaux arrivants par le truchement d’un temps de résidence supérieur sur notre territoire. On trouve là l’ingrédient socialiste suprême, celui de la volonté d’égaliser ce qui ne peut l’être au détriment des méritants.
Mais, dans l’action de monsieur Sarkozy, il y a la cerise sur le gâteau, celle qui fait sa spécificité pour les media de gauche aujourd’hui alors que, pourtant, elle bien une spécificité historique du socialisme : il s’agit du rapport à l’argent. En effet, les media parlent souvent des amis de monsieur Sarkozy : Bolloré, Lagardère et j’en passe. Son action, selon certains, viserait à les favoriser. Or quels commentaires avons-nous entendus à l’occasion du discours de notre président sur sa vision de discrimination positive ? Nous avons entendu un discours peu connu du grand public mais qui a été concocté dans les années 2003-2005. Le système éducatif ne ferait que de la reproduction sociale et, comble de l’horreur, les classes sociales défavorisées, qui paieraient le système éducatif au prix fort, n’en profiteraient pas, à l’inverse des classes moyennes qui, elles, seraient les grandes bénéficiaires de ce système. Cette rengaine fait partie des préférées des grands banquiers de notre pays et savez-vous le remède qu’ils proposent ? La fin de la gratuité des études supérieures (dans un premier temps, les autres viendront ensuite, bien sûr...).
Commençons par démonter l’argument. Les classes sociales défavorisées ne paient pas l’impôt sur le revenu et ont des salaires exemptés de charges sociales. Elles ne paient donc que la TVA. Comme elles consomment moins car elles ont des revenus inférieurs elles paient donc moins d’impôts. En conséquence, l’argument avancé ne tient pas. Réfléchissons néanmoins à savoir qui serait le grand gagnant d’un tel système. En fait, il y en aurait 2.
Commençons par le plus trivial, c’est la finance qui va pouvoir trouver une nouvelle zone d’extension en marchandisant l’éducation. Mais au final, le grand gagnant restera la classe dirigeante et riche. En effet, dans un système méritocratique, la gent possédante ne peut se prémunir d’une progéniture faiblement dotée en intelligence et la reproduction sociale risque alors d’être un échec. En minant le système de l’intérieur, comme l’on fait les socialistes en 1981 et après et comme veut le faire Sarkozy en ce moment, on donne d’autant plus de chance à des progénitures peu performantes. Si, en plus, on discrédite le système de façon à faire en sorte que le diplôme ne soit plus un gage de qualité, ce dernier sera alors remplacé par le carnet d’adresse et là, croyez-moi, les moyens et les pauvres n’auront aucune chance, c’est, hélas, ce qui se passe déjà en grande partie.
Le but de la classe riche est donc de se débarrasser de la classe moyenne qui est la seule à même de réellement la défier pour des raisons bien trop longues à expliquer ici. Ainsi, monsieur Sarkozy, que d’aucuns ont cru de droite, est-il un socialiste patenté. Nous l’avons vu sur mains exemples mais le dernier est plus significatif que les autres car, sachons-le, le grand capital a, de tous temps, soutenu le socialisme, pas le communisme mais le socialisme, celui qui est mou et cherche le consensus en trahissant les classes populaires. Nous en avons un bel exemple en France avec l’action socialiste depuis 1981 qui n’a eu de cesse que de favoriser et concentrer le grand capital.
Monsieur Sarkozy est dans cette lignée malheureusement et il vient de franchir un pas qu’aucun avant lui n’avait osé faire en mettant en place des critères sociaux pour l’obtention de postes en lieu et place de la compétence. Cela est insupportable et puisque notre pays, semble-t-il, est à ce point aveuglé par les leurres et les chimères d’une idéologie délétère, il ne restera plus, si cela continue, qu’à aller émigrer dans d’autres pays où, grâce au ciel, on évitera de nous discriminer, ni positivement ni négativement et où nous ferons l’effort de nous intégrer en honnêtes travailleurs et où nos descendants, peut-être, auront la compétence d’accéder aux plus hautes marches du podium et ne renieront pas leurs origines populaires.
16 réactions à cet article
Ajouter une réaction
Pour réagir, identifiez-vous avec votre login / mot de passe, en haut à droite de cette page
Si vous n'avez pas de login / mot de passe, vous devez vous inscrire ici.
FAIRE UN DON