Sarkozy à la pêche aux voix
Dure fin de semaine pour le chef de l’Etat à la veille d’un week-end qui ne s’annonce pas de tout repos. Il a fait feu de tout bois pour écoper le navire amiral en pleine tempête…et pas qu’en Poitou-Charente.
Vite un petit tour samedi au salon de l’Agriculture, le dernier jour mais avec, dans la poche, l’annonce d’une rallonge de 800 millions d’Euros pour les prêts bonifiés accordés par les banques aux agriculteurs en difficulté et 50 millions de plus pour les plus endettés.
C’est que la colère gronde chez nos agriculteurs dont les revenus se sont effondrés de 20% en 2008 et de 30% en 2009 ! Et 2010 n’annonce rien de bon. Et puis les prêts, ça fera encore plus d’endettement et c’est de ça que crèvent nombre de paysans.
Mais qui les a soumis à la loi de la grande distribution qui fixe les prix agricoles et de la spéculation sur les produits alimentaires de base que ne peuvent plus acheter ceux qui en ont le plus besoin ?
Qui a organisé la mise en concurrence, déloyale, au plan international, les déréglementations…qui conduisent à l’abandon de terres agricoles, à la vitesse d’un département tous les dix ans en France, ruinant ceux qui cultivent alors qu’on fait venir -à grands frais de transport mais à fortes marges bénéficiaires pour la grande distribution- des fruits et légumes, des produits laitiers, de la viande qu’on est en capacité de produire, de manière à assurer notre indépendance alimentaire tout en exportant vers l’Europe et le monde.
Quel est ce système capable d’une telle aberration ?
La veille, Sarkozy rencontrait les banquiers pour qu’ils accordent plus facilement les autorisations de crédits à court terme aux PME/TPE. Il leur a demandé, aux banquiers, de « rester exemplaires et de faire preuve de modérations dans la distribution des bonus à leurs collaborateurs. » Les banquiers, nous dit-on, sont sortis souriants de la réunion en promettant 96 millions d’euros pour 2010, ce qui ne fait jamais que 3% de plus qu’en 2009.
Un jour avant, Sarkozy était à Marignane, siège d’Eurocopter, près de Marseille. Il n’oublie pas l’industrie, il ne manquerait plus que ça ! Elle représentait 22% du PIB en 1999, aujourd’hui 16%. Elle a perdu 500 000 emplois dans la même période. Le Chef de l’Etat va en faire sa priorité absolue : il était temps !
Il a promis des primes à la relocalisation, des prêts à taux bonifiés pour les investissements…encore des fonds publics attribués sans contrôle véritable. Il a aussi annoncé qu’il allait revoir la question du financement de la protection sociale par les entreprises. En somme une politique pour les industriels plus que pour l’industrie.
Mais quel est ce système qui met en opposition constante les salariés et les actionnaires, au seul bénéfice des derniers ? Et qui fait aussi l’impasse sur les causes profondes de la crise, en demandant à ses victimes de consentir aux sacrifices (la rigueur) et aux « réformes » (RGPP) pour voler au secours de ceux qui en bénéficient tout en mettant le monde au bord de la faillite. On voit jusqu’où ça peut aller en Islande et en Grèce…La France n’est pas immunisée.
Ce sont les résultats de cette politique que les Français vont avoir à apprécier ou plutôt à sanctionner, dimanche prochain. Ce que redoutent fortement l’UMP et Sarkozy chef de parti engagé comme jamais en première ligne d’une campagne qui, de ce fait, n’en sera que plus encore nationale.
Dimanche soir, ce seront les rapports de force politiques à l’échelle du pays qui vont être observés à la loupe, d’abord pour mesurer l’ampleur du rejet de la politique du pouvoir et, principalement à gauche, parce que ces rapports de force seront déterminants pour les majorités régionales qui se dessinent.
Seront-elles de simples majorités d’opposition, accompagnant le libéralisme ou des majorités de résistance affirmée, au service des attentes sociales, prolongeant les luttes et leur ouvrant une perspective politique ?
Ce qui est en jeu, c’est l’avertissement qui peut être donné au premier tour d’une volonté de rupture avec les logiques libérales qui sacrifient l’homme à l’économie, le productivisme à l’environnement, la solidarité et le partage à la soif de profits et de privilèges de quelques-uns.
Tant il est vrai que la croissance n’a de sens que si elle contribue à réduire les inégalités.
René Fredon
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