Sarkozy, les veaux et la vache à lait fiscale
Les travailleurs l’auront échappé belle ! Dans un entretien accordé au Monde le 23 janvier 2007 le candidat de la hausse du pouvoir d’achat et de la France qui veut travailler plus pour gagner plus, Nicolas Sarkozy, détaille son programme économique et social et donne davantage de détails sur ses propositions concernant les cotisations sociales et la fiscalité. Il déclare :
« On peut donner (aux Français) des prestations meilleures en dépensant moins. Si on réduit de 4 points nos prélèvements obligatoires, on rend 68 milliards d’euros aux Français : 2.000 euros rendus par foyer et par an, y compris les retraités, et 4.900 euros par foyer si on s’en tient à la France qui travaille » (http://www.ump42.info/archives-edito.htm pour plus de détails)
Les économistes de l’UMP auront tôt fait de dénonçer cette mesure, en donnant par la même l’occasion à leur chef de nous révéler sa stratégie de conquête du pouvoir. Retour sur une mesure déjà tombée dans l’oubli.
L’aubaine.
Quelle aubaine,
pensais-je sous le choc et quelle véritable main tendue vers
L’atterrissage.
Ah que voilà un
candidat qui récompense
Le doute est de rigueur car cet argent proviendra des baisses d’impôts et de charges proposées par le candidat. Les mesures phares sont : le bouclier fiscal à 50%, la réduction de l’ISF, l’exonération plus large des droits de successions, les heures supplémentaires non taxées, entre autres. Du coup, la part du gâteau de chacun dépendra directement des revenus et du patrimoine. La plupart de ces réductions n’étant effectives qu’au delà d’un seuil de richesses que très peu de personnes en France ne dépasse, ce sont ceux qui possèdent et gagnent déjà le plus qui engrangeront l’essentiel des bénéfices. Les autres se partageront quelques cacahuètes.
Pour illustrer
ce propos, Le Canard enchaîné a étudié que le bouclier fiscal ferait gagner environ
€ 800,000 à Johnny Hallyday (8M€ de revenus en 2006), s’il revenait en France.
Un des français les plus riches de France récupérerait ainsi à lui seul autant
que 400 foyers fiscaux, réduisant d’autant les gains pour
Quelques chiffres pour comprendre.
§ En France,
les 10 % les plus fortunés disposent de
46 % de l’ensemble de la richesse du pays et les 50 % les moins fortunés, en possèdent
moins de 10 %.
(http://www.inegalites.fr/spip.php?article38&var_recherche=succession%20&id_mot=30)
§ En 2005, 394 518 personnes (0.6% de la population) étaient redevables de l’ISF dont 1183 avec un patrimoine supérieur à 15M€. D’une manière générale, se sont aussi les personnes qui ont les plus forts revenus et du coup les plus gratifiés par les mesures fiscales phares de Sarkozy.
§ Seuls 10% des ménages gagnent plus de € 4,129 par mois et ils reçoivent en tout 24.8% de la masse totale des revenus, ceci après impôts et prestations sociales. La moitié des ménages reçoit moins de €2,058 par mois. (Observatoire des inégalités, http://www.inegalites.fr/)
§ 75% des ménages ont un patrimoine moyen inférieur à €177,000 (Source : enquête Patrimoine des ménages 2004, Insee.). Lors de la succession, leurs héritiers directs ne paieront aucun ou très peu de droits de succession. Pour commencer à payer des droits vraiment significatifs, il faut hériter de plus de € 520, 000 de capital, c’est-à-dire être parmi les 10 ou 15% les plus riches de France.
§ Pour finir, notons que
La répartition du pactole suivra la même logique inégalitaire de répartition des revenus et du patrimoine, ce qu’omet opportunément de préciser Sarkozy. Je vous laisse déduire par vous-même vos chances de faire parti des heureux bénéficiaires.
L’addition SVP.
Si le budget de l’Etat et des organismes sociaux (Sécu, UNEDIC...) est amputé de € 68 milliards il faudra expliquer aux Français où et selon quelles modalités se feront les économies ! Que nenni ! Pas d’explications, circulez il n’y a rien à voir. Le peuple est prié de croire le candidat sur parole quand il déclare : « On peut donner des prestations meilleures en dépensant moins » ou encore « ...en dopant la croissance, on peut arriver à tout financer. »
Mais soyons réalistes. Une telle saignée dans les comptes publics laisse présager des coupes dans les budgets sociaux, ce qui retombera sur ceux justement qui n’auront que peu bénéficié des baisses de prélèvements, c’est-à-dire la majorité des français. Les néolibéraux ne manqueront pas d’affirmer péremptoirement que les conséquences évidentes de cette politique seront une hausse de la consommation, de l’investissement et de l’emploi, ce qui en définitive bénéficiera à toute la société. Mais est-ce vrai ? En tout cas il est indispensable que Sarkozy nous explique son plan en détail et quelles en seront les retombées pour discuter sérieusement du bien fondé ou non de sa politique. S’il ne le fait pas (on attend toujours), ce n’est que de la démagogie destinée à tromper l’électeur, espérant que ce dernier ne fasse pas l’effort intellectuel de réfléchir par lui même aux tenants et aboutissants de cette mesure. Pour Sarkozy, l’essentiel aura été que les français entendent « 2.000 euros rendus par foyer et par an » et imprime cette phrase dans un coin encore disponible de leur cerveau (entre deux bouteilles de Coca Cola), pour espèrent-ils, s’en souvenir au moment de mettre le bulletin dans l’urne.
Le soulagement ! La rupture c’est du
bidon.
Finalement cet article aura juste été l’occasion d’une masturbation de méninges car je découvre que Pierre Méhaignerie, président de la commission des Finances et numéro 3 de l’UMP, a déclaré en février dans les couloirs de l’Assemblée nationale devant des journalistes : « On peut espérer gagner un point d’ici à la fin de la législature, dit Méhaignerie, pas plus. » (http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-823448,36-868237@51-823374,0.html)
Sarkozy, après
cet ignoble coup de poignard dans le dos de la part d’un « ami »
chargé d’avaliser ses mesures, aurait répliqué : « Méhaignerie aurait dû
se taire. Ce centriste mou parle trop !
C’est vrai que ça va être difficile, et même quasi impossible, de faire,
mais il ne fallait pas le dire. C’est toujours comme ça, une campagne : on
promet pour être élu, et après on déçoit. Mais, en dopant la croissance, on
peut arriver à tout financer. » (Canard Enchaîné du 21/02/2007)
En fin de compte, la nouvelle c’est que le cynisme politicien aura accouché d’une nouvelle maxime méprisante, mais réaliste, à l’égard des électeurs. Après le célèbre « Les français sont des veaux » attribué à De Gaulle, suivi par l’expression popularisée par Pasqua et Chirac, le Sarkozy Nouveau, héritier du parti gaulliste, contribue juste à affiner la pensée politicarde de ses maîtres à penser qui ont érigé la démagogie la plus inique en tant que principe de base pour la conquête du pouvoir. Tout rentre dans l’ordre. « les promesses n’engagent que ceux qui y croient »Point de rupture à l’horizon dans la manière de faire de la politique.
Je trouve juste hallucinant que ces propos n’aient pas été plus diffusés ni que les journalistes institutionnels n’osent pas questionner Sarkozy sur les détails de son programme fiscal, qui au dire des pontes de son propre parti est irréalisable, même dans ses grandes lignes. Les propos similaires de Besson à l’égard de Royal et sa démission du PS ont fait couler beaucoup plus d’encre. La profession aurait-elle peur d’essuyer la vindicte Sarkozienne (voir http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=21133.) ? Mais au fait, pourquoi un journaliste irait-il encourir l’ire suprême d’un homme puissant et vindicatif en le titillant sur ses propos inconséquents ou ses malversations financières à Neuilly (supposées) ? En effet, d’après Chirac, ex grand mentor de Sarkozy, il parait que les « veaux » se fichent complètement de ces histoires de corruption politique et ne s’intéressent pas aux détails des promesses. Voilà au moins une leçon de politique que Sarkozy aura bien retenue !
Comme quoi la
rupture, elle ne rassemble que les
VEAUX qui le valent bien !
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