Sarkozy tente de désamorcer la colère des Lorrains
Le président de la République a reçu hier une délégation d’élus lorrains pour évoquer la restructuration militaire. La Lorraine est la région la plus touchée par cette réforme, avec une perte sèche estimée à 25 000 habitants. Le manque à gagner pour cette région déjà sinistrée est estimé à 200 millions d’euros. Or l’Elysée n’a prévu qu’une enveloppe totale de compensation de 320 millions d’euros... Pour tout le territoire national. Les promesses ont succédé à la saignée hier, et lorsque le maire de Metz a demandé au président de vraiment les tenir, il s’est fait rabrouer. "Je ne suis pas un menteur", aurait lancé Sarkozy. Ambiance.
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Sarkozy ne reviendra pas sur la fermeture des sites lorrains
Le chef de l’Etat avait fait mine de prendre au sérieux le sentiment d’abandon des Lorrains, en préparant un discours de 25 minutes à l’adresse de la délégation mosellane et du président de la région Lorraine. Mais la délégation - qui tenait avant tout au maintien de la base aérienne 128 de Metz-Frescaty, fleuron du renseignement militaire français, et des autres régiments pour lesquels des investissements énormes ont été faits ces dernières années -, n’a pas obtenu satisfaction, seulement un petit florilège de promesses de compensations :
- transfert de 1 500 postes de fonctionnaires de l’Insee ou de l’office des statistiques à Metz et en Moselle ;
- une session de rattrapage pour l’université Nancy-Metz recalée du plan campus malgré le sérieux du dossier ;
- la négociation avec Angela Merkel pour obtenir le rapatriement de deux régiments français ou allemands stationnés en Allemagne ;
- la confirmation de l’implantation du centre de formation militaires à Dieuze pour 400 militaires et autant de stagiaires (moins qu’annoncé au départ) ;
- la finalisation de trois contrats de sites pour les villes de Bitche, Dieuze et Metz, qui seront abondés par des subventions de 10 M€, chacun.
Un cimetière de promesses non tenues
"La Lorraine est un cimetière de promesses non tenues", a osé lancer le maire PS de Metz, Dominique Gros, au président de la République. Il a tempéré le lendemain par un "Sarkozy nous a pris au sérieux".
Vraiment ?
Ces promesses masquent mal le fait que le président a refusé net toute concession, ne serait-ce que sur le maintien d’un seul régiment.
Et ces promesses, au-delà du fait qu’elles n’engagent que ceux qui y croient, semblent insuffisantes au regard des préjudices subis par la Lorraine. Si, à la sortie de l’Elysée, le président du Conseil général 57, Philippe Leroy (UMP), s’est dit "satisfait de la compréhension manifestée par Nicolas Sarkozy", le sénateur PS Jean-Marc Todeschini déplore, lui, "une réunion préparée pour dégonfler la baudruche et casser le match".
Une grande manifestation des Lorrains est en effet prévue samedi 6 septembre à Metz pour protester contre la restructuration des armées.
Il apparaît en outre peu probable qu’Angela Merkel accepte de céder sur les régiments stationnés en Allemagne. Pourquoi promettre ce qu’on ne pourra pas tenir ? Parce qu’il sera aisé d’accuser les Allemands de ce refus déjà écrit d’avance.
Accorder 10 M€ par ville quand pour la seule ville de Metz le préjudice est estimé à 160 M€ selon le CES de Lorraine ? Facile à tenir, mais la Lorraine ne demandait pas l’aumône.
Le transfert de fonctionnaires en Lorraine ? Une simple délocalisation qui aura sans doute du mal à passer pour des gens qui s’imaginent que la Lorraine est une région sibérique, avec des hauts fourneaux partout et des paysages dantesques. Alors qu’il s’agit d’une région chaleureuse, avec un magnifique parc naturel, des villes chargées d’Histoire et parsemées de parcs et de jardins verdoyants. Il sera facile d’accuser les fonctionnaires de rechigner à se rendre en Lorraine.
Le président de la République, de réforme en réforme, semble suivre la même stratégie. Annoncer le désastre, promettre une compensation, accorder une compensation moins grande que prévue. Et la parade du videur : "les caisses sont vides".
L’hôpital Legouest de Metz pourrait fermer, faute de militaires à soigner.
Les élus repartent bredouilles et la queue entre les jambes, mais contents. Ce n’est pas tous les jours qu’on est reçus par le président.
L’armée n’a pas vocation à faire de l’aménagement du territoire, nous a-t-on répété à l’envi. Sans doute l’Etat n’a-t-il pas vocation non plus à faire de la solidarité nationale, quand une région est plus touchée que les autres ?
On ne parlait de la Lorraine que pour les faits-divers sordides, la fermeture de Gandrange, la fermeture de Michelin à Toul, la fermeture de l’usine Altadis de Metz. Désormais, il faudra aussi compter sur les décisions arbitraires de l’Etat.
Paris donne, et Paris reprend.
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