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Stratèges en campagne

C’est à François Mitterand que l’on doit l’ « invention » du Front national dont il fait en 1980-1981 un des instruments de sa conquête du pouvoir, en divisant la Droite sur sa droite et en relançant l’union de la Gauche par une politique commune antifasciste. La présence du F.N. devient à ce moment une donnée centrale de la vie politique française et le reste aujourd’hui encore.
 
Pour les socialistes, l’affaire a toutefois été poussée trop loin et a débouché sur le syndrome du 21 avril 2002 : au soir du premier tour de l’élection présidentielle, Lionel Jospin se retrouve devancé par Jean-Marie Le Pen. Au second tour, Jacques Chirac se trouve réélu avec un score en principe réservé à des chefs d’État de république bananière ou d’État socialiste. Un véritable camouflet pour la démocratie française.
 
RAPPEL
La constitution initiale de la Vème République, ne comporte pas la désignation du président de la République au suffrage universel. Le texte originel de la constitution française du 4 octobre 1958 avait institué l'élection du président de la République française par un collège électoral composé d'environ 80 000 grands électeurs (parlementaires, conseillers généraux, élus municipaux). L’élection au suffrage universel a été introduite dans la constitution par le référendum du 28 octobre 1962. C’est trois ans plus tard, en décembre 1965, qu’a lieu la première élection présidentielle au suffrage universel. Mis en ballotage au premier tour, le général De Gaulle est élu au second tour.
 
Les stratégies électorales sont cette année encore dominées par la variable Front National. Elles doivent intégrer à la fois une stratégie du premier tour et une stratégie du second tour, en prévoyant au mieux le lien entre elles.
 
 
Stratégies du premier tour
 
Un même danger menace Sarkozy et Hollande : la constitution d’un front du refus. Les sondages sont éloquents sur un point, à savoir qu’une petite majorité de français est mécontente de la politique menée tant par la droite que par la gauche. Si le F.N. est par un côté l’expression de ce refus (ce qu’il exprime dans sa stigmatisation de l’UMPS), il constitue par ailleurs un bouclier contre ce front du refus, en prétendant montrer par lui que le refus est en soi antirépublicain. Tant Sarkozy que Hollande ont tout intérêt à l’existence du F.N. Ils sont bien en phase sur cette question, quitte à se débrouiller chacun de leur côté pour ne pas être devancé au soir du premier tour…
 
La stratégie Sarkozy se vérifie de plus en plus : il s’agit d’empiéter sur l’extrême-droite. Son discours de campagne en porte toutes les traces, contre l’immigration, anti-européen, contre l’oligarchie financière… Ses proches (Guéant en tête) le relaient à l’excès, reprenant même l’aspect scandaleux que Marine Le Pen n’a pas repris de son père. Cette stratégie de Sarkozy est entièrement tournée vers le premier tour, car elle lui est défavorable au second tour, qui se gagnera « au centre ». Avant d’entamer cette campagne, Sarkozy s’est donc assuré de l’absence du centre, qui aurait pu lui faire perdre d’un côté (au centre) au premier tour ce qu’il gagnait de l’autre (sur sa droite). De manière incompréhensible pour beaucoup de ses proches, Jean-Louis Borloo « n’y est pas allé ». Comprenne qui pourra !
 
La stratégie de Hollande a été exactement parallèle. Il lui a fallu avant tout s’assurer de l’absence des écologistes. Il a donc attiré EELV dans un traquenard, dans lequel ils se sont compromis benoitement. En leur achetant leur soutien au second tour contre le désistement socialiste en leur faveur dans un certain nombre de circonscriptions aux Législatives de juin, Hollande leur a vendu la proie pour l’ombre, les transformant ainsi en politiciens plus pourris que ceux qu’ils dénoncent, eux, les « purs ». Elle est belle, la nouvelle politique ! La manœuvre, considérée comme normale par l’opinion pour le Parti socialiste, a été radicale pour la dégoûter des verts dont le score ne voisinera pas les 10% mais le 1%. Hollande pouvait dès ce moment axer toute sa campagne sur le phénomène Mélenchon !
 
Car il y a deux combats dans la campagne. Un match Hollande-Sarkozy et un match Le Pen-Mélenchon. Ce sont deux combats très différents. Les voix ne se reportent pas de l’extrême-gauche à l’extrême-droite. Il est des électeurs qui ne voteront que pour l’un des principaux challengers, étant ou non susceptibles de passer de l’un à l’autre. Il en est qui ne voteront en tout cas ni pour l’un ni pour l’autre mais pourront exprimer leur refus soit par un vote Front national, soit par un vote Front de Gauche. Si Mélenchon gagne des voix, ce ne sera donc pas principalement au détriment de Hollande, mais surtout au détriment de Le Pen, et cela ne compromet donc en rien le résultat du premier tour.
 
Reste l’outsider Bayrou. Peut-il ratisser au-delà de ce qu’il est et incarner lui aussi le refus ? De cette question, et de cette seule question dépend sa capacité d’entrer en ligne pour le second tour. Ce n’est pas la direction qu’il a prise, en annonçant que cette fois il aurait à faire son choix publiquement au soir du premier tour. Sauf revirement spectaculaire de sa part dans les dernières semaines de campagne, Bayrou sortira donc sur la pointe des pieds. Définitivement, car si l’électeur semble bien vouloir lui donner une seconde chance, il ne lui en donnera pas de troisième.
 
 
Le second tour
 
La stratégie du premier tour doit aussi être une marche vers le second tour. Pour Hollande, c’est du gâteau, car un Front de gauche important lui permet à la fois de prendre, quant à lui-même et au Parti socialiste une position social-démocrate de « droite », tout en s’assurant de bons reports de la gauche et de la gauche de la gauche, en se pavanant un peu avec son ami Mélenchon entre les deux tours. Idéal ! Hollande est loin d’être un génie, c’est essentiellement un homme d’appareil, qui avance quand toutes les pièces de son jeu se disposent comme il l’a prévu. La victoire ne devrait pas lui échapper…
 
Pour Sarkozy, la marche est, semble-t-il, plus délicate. Après un premier tour très à droite, il lui faut corriger le tir et faire un second tour très au centre. Mais c’est dans ses possibilités, car il est très « réactif », ce qui veut dire aussi qu’il n’a pas beaucoup de continuité dans ses prises de position. Voilà des années qu’il se positionne non en dépit mais à la faveur de positions souvent contradictoires. Il ne ferait donc en cela que suivre sa ligne de conduite en variant une fois de plus. Toutefois, Sarkozy a une carte cachée qu’il finira par sortir. Il s’agit de la situation économique internationale. On a vu à quel point elle force Hollande à faire le grand écart et non pas à passer d’une image à l’autre dans le temps mais à devoir tenir en même temps deux images contradictoires : rassurante pour le monde financier, revendicative pour les électeurs. Or Sarkozy est en position de « favoriser » une brusque tension à la fin avril, auquel cas il déstabilisera complètement son adversaire, et la victoire lui semble acquise…
 
 
Originalité de la campagne
 
La caractéristique principale de la présente campagne électorale est que les deux principaux candidats suscitent l’aversion. Une aversion que je lierais à leur caractère commun d’être tous deux des hommes d’appareil. Pour Hollande, pas de doute, il a tout de l’apparatchik dans ses manières et sa carrière. Il n’incarne pas une pensée, mais un système. Sarkozy a la suffisance de l’homme d’appareil (jusqu’au mépris que les Français ne lui pardonnent pas) et la capacité d’affirmer un jour avec autant de « sincérité » le contraire de ce qu’il a défendu la veille…
 
Ce sera le plus détesté des deux qui sera battu. Je l’ai dit, la seule solution envisageable pour les renvoyer dos à dos (ni Le Pen, ni Mélenchon n’ayant aucune chance au second tour) serait le vote Bayrou, lequel est toujours donné gagnant par les sondages au second tour, tant contre Sarkozy que contre Hollande… Vous avouerez que cette situation a un aspect comique.
 
Lequel comique rejoint souvent la tragédie...
 
MALTAGLIATI

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9 réactions à cet article    


  • Pie 3,14 20 mars 2012 08:10

    Voilà un article très sérieux qui commence avec une faute sur un nom propre (deux r à Mitterrand) et surtout une affirmation fausse. En 81, le FN ne pèse rien, il a moins de 300 adhérents, Le Pen ne parvient pas à obtenir les 500 signatures et le parti fait 0.18% aux législatives de Juin 81...
    En somme, toute votre introduction n’a aucun sens.

    Le FN « nait » électoralement aux municipales de Dreux en 83 et aux européennes de 84.

    Un bon stratège se base sur des informations réelles.
    Quant à votre champion Bayrou ( 13%), il ne peut pas gouverner sans l’UMP dont il serait l’otage, bonjour l’indépendance...


    • maltagliati maltagliati 20 mars 2012 08:52

      Je vous remercie des précisions sur les années 80 dans lesquelles je ne me suis pas replongé, je l’avoue. Merci pour la « correction » (aux 2 sens !!!)
      Vous confirmez bien - ce qui est important - que la force électorale du FN s’est constituée sous la présidence de MitteRRand, mon imprécision ne touche pas au SENS mais à des détails, lesquels ont leur importance... !

      J’ai eu l’occasion de dire précédemment que Bayrou élu ne représenterait pas un risque pour le pays : il ne ferait sans aucun doute pas plus mal que Sarkozy ou Hollande. Son élection serait par contre un cran d’arrêt au népotisme de l’UMP et du PS qui ont conclu une entente aussi frauduleuse qu’un cartel sur la farine, l’énergie, ... peut le faire. C’est LA SEULE CHOSE qui m’intéresse en la question. Et je répète : pourquoi BAYROU, réponse : parce qu’il est le seul à pouvoir l’emporter au SECOND TOUR, le seul qui importe vraiment.

      Merci encore.
      Maltagliati


    • maltagliati maltagliati 20 mars 2012 17:05

      pôvre gôche !!! 
      non seulement vous devriez apprendre à lire, ursulin, car vos collègues ont bien perçu que pour moi la crise vient bien non de la société mais des Etats et de leur développement ABSOLU plutôt que de leurs « abus » (drôle de formule) - et c’est pour cela qu’ils me cherchent misère !
      mais alors le coup de la malhonnêteté et du « récite la leçon apprise », c’est, croyez-moi, vraiment vieux jeu, surtout quand on ânonne péniblement


    • maltagliati maltagliati 20 mars 2012 18:24

      Mon premier article pour Agoravox tentait de faire une synthèse de mon analyse ;
      Cela peut vous mettre sur la piste, peut-être
      Ne pas se tromper de cible
      En tout cas cela me semble aborder la question que vous relevez


    • chantecler chantecler 20 mars 2012 10:01

      Ca me fait toujours rire quand je trouve ce genre d’affirmation ...
      Vous dites donc que c’est François Mitterrand qui a inventé le FN ....
      Magnifique !
      Mais vous ne dites pas comment il a fait...
      Il a financé JMLP ? Lui a offert les prime times dans les médias ?
      Je crains qu’il n’ait simplement , pour des raisons démocratiques ,introduit de la proportionnelle aux législatives .
      Et donc qu’il ait pris le risque d’une meilleure représentation politique à l’assemblée .
      Voilà l’origine de cette rumeur de l’alliance des socialistes avec le diable .
      Avouez que ça n’encourage pas vraiment à toucher aux institutions , même si chacun est convaincu que notre démocratie est de plus en plus boiteuse , avec à sa tête un président monarque qui décide de tout .


      • Le péripate Le péripate 20 mars 2012 10:31

        C’est juste au deuxième tour le centre pourrait l’emporter. Mais pas au premier, l’électorat français étant bimodal, deux bosses, deux électeurs médians type, et il y a un premier tour.

        Par contre il y a moins de distance entre l’électeur médian de droite et celui du centre qu’entre l’électeur médian de gauche et le même. Ce qui implique que le replacement du candidat de droite au centre entre deux tours est plus aisé que pour son adversaire principal de gauche.

        Ce sont des donnés permanentes de l’électorat français qui permettent dans une certaine mesure de prévoir le résultat du deuxième tour, avec des effets de seuils qui changent brutalement tout.


        • SNOOP 20 mars 2012 10:31

          gauche / droite est aujourd’hui une conception dépassée. Nous voyons d’ailleurs le mélange des genres avec sarko au pouvoir qui invite les « socialistes » au gouvernement et un bayrou qui pourrait être ministre de l’un ou de l’autre parce que sur le fond ils sont pareils

          sarko, hollande, bayrou c’est le système, c’est le TCE, Lisbonne, le M.E.S...(comment mélenchon et le PC vont ils trahir pour hollande est LA question) 

          le clivage est entre les mondialistes (qui n’est en rien l’internationalisme) et les nationalistes. Nous avons ici deux représentants de ce courant : Marine et NDA 


          • maltagliati maltagliati 20 mars 2012 17:15

            comment mélenchon et le PC vont ils trahir pour hollande est LA question ????
            Vous plaisantez ou quoi ? Ils n’ont rien à « trahir », ils font leur boulot, comme d’habitude. C’est du tout cuit, prémaché etc. Le plus incroyable est qu’il y a encore des gogos ! Des dizaines de milliers de gogos... Déjà en 1981, cela me semblait inouï mais 30 ans plus tard... c’est vraiment incurable !
            C’est sûr que Bayrou, c’est le système. Si vous me lisez bien, je ne le ménage pas. N’empêche que 1) l’élire président poserait de sacrés problèmes à nos zélites. 2) tout autre choix mène à la case départ. Je ne dis rien d’autre qu’il y a peut-être éventuellement une mini-chance de les emmerder dans leur ronron et j’ajoute qu’à moins de revirement sec Bayrou est en train de saborder cette possibilité.


          • SNOOP 20 mars 2012 20:39

            bayrou, un problème ? smiley

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