Syndrome
« La haine, comme l’amour, se nourrit des plus petites choses, tout lui va »
Honoré de Balzac, Le Contrat de mariage
Le week-end dernier a donc été marqué par une polémique en tout point consternante initiée par Vincent Peillon suite à la venue de Ségolène Royal aux rencontres du courant « L’Espoir à Gauche » organisées à Dijon (Côte d’Or) et dont le thème était l’éducation.
Vincent Peillon, qui avait habitué ses amis à plus de subtilités, s’est répandu dans les médias (et continue à s’y répandre) en diverses amabilités sur Ségolène Royal qu’il a accusée de « venir abîmer un événement politique majeur. »
On le voit, la charge est sévère mais n’en demeure pas moins injuste et infondée.
Car si Vincent Peillon était aussi attaché qu’il le prétend à privilégier le fond des débats sur l’éducation et la réussite de cet « événement politique majeur », qu’avait-il donc besoin de s’en prendre ainsi à Ségolène Royal ?
En bon stratège politique, il aurait pu tout aussi bien considérer que la présence de la candidate socialiste aux dernières présidentielles pouvait favoriser la visibilité de ces rencontres.
Il aurait pu, de façon encore plus prosaïque, n’y accorder aucune espèce d’importance.
Mais il n’en a été rien été, et Vincent Peillon, par ses attaques outrancières contre Royal, a pris lui-même le risque de torpiller ces rencontres et de jeter encore davantage le trouble à gauche.
Ce faisant, il est particulièrement aisé de démontrer l’inanité des critiques de l’ex-lieutenant de Royal en raisonnant par l’exact contraire de ce qui s’est produit ce week-end.
Que n’aurait pas dit Peillon par exemple si Royal ne s’était pas rendue à Dijon ? Il aurait certainement eu beau jeu de dénoncer l’absence de la Dame du Poitou, de fustiger son arrogance et, dans un même élan, de souligner son désintérêt pour celles et ceux qui l’ont soutenue en 2007.
Nul doute alors que son indignation eût été aussi vive et que l’ensemble de la presse n’aurait pas manqué de la relayer.
Mais Ségolène Royal est venue… Et les critiques inélégantes de Peillon ont fusé. Sans surprise, celles-ci ont immédiatement déclenché les commentaires des faux culs habituels, plus prompts à taper sur Royal qu’à critiquer efficacement l’action de Nicolas Sarkozy à la tête du pays ou à analyser lucidement la situation actuelle du PS.
On le voit donc : que Ségolène Royal fasse quelque chose ou qu’elle s’en abstienne, ses actions et ses propos sont systématiquement scrutés à la loupe et évalués dans un climat de fascination obsessionnelle qui, décidément, semble être le point commun de tous ses (anciens et nouveaux) contempteurs, à gauche comme à droite.
Qu’on le veuille ou pas, Royal imprime donc le tempo, comme cela a été maintes fois observé. Elle sait habilement tirer profit de la vindicte irrationnelle dont elle fait l’objet, en se contentant de rappeler des choses au fond extrêmement simples, à savoir :
- qu’elle n’a besoin d’aucune invitation ou autorisation pour participer à des rencontres ouvertes à toute la gauche et à tous les progressistes, socialistes ou non ;
- qu’elle n’entend pas répondre à des attaques déplacées visant sa personne et non les propositions qu’elle défend ;
- et qu’elle refuse de se livrer à une surenchère dans les critiques, que ce soit à l’encontre de Peillon ou de n’importe quel autre socialiste.
Est-il besoin d’épiloguer outre mesure sur l’attitude de Peillon ? Ne serait-ce pas d’ailleurs donner trop d’ampleur à ce qui n’est, en définitive, qu’une vilaine mesquinerie dictée par une ambition mal contenue ?
Peillon, sans s’en rendre compte, vient d’élever la trahison politique au rang de la caricature, sans toutefois atteindre les sommets vertigineux auxquels est parvenu Eric Besson en rejoignant Nicolas Sarkozy en pleine campagne présidentielle. La violence verbale dont il fait preuve aujourd’hui à l’encontre de Royal ressemble même étrangement à du dépit amoureux.
Rappelons enfin ce que Vincent Peillon écrivait lui-même en janvier de cette année dans un communiqué (nous soulignons).
« Au Congrès de Reims, une puissante force de proposition et de rénovation s’est mise en mouvement. Notre motion, « l’Espoir à gauche, fiers d’être socialistes », est arrivée en tête lors du vote sur l’orientation politique, puis notre équipe, autour de Ségolène Royal, a rassemblé la moitié des suffrages militants. Ensemble, nous avons incarné un espoir de changement, un souffle nouveau qui n’a aucune raison de retomber une fois le congrès passé. Les très nombreux militants socialistes, les femmes et les hommes de gauche, qui nous ont fait confiance ne nous le pardonneraient pas. Ils attendent désormais de nous que nous maintenions et renforcions la volonté d’une transformation en profondeur du socialisme français, de sa doctrine, de son projet, de ses pratiques. Nous avons donc le devoir d’inscrire notre action dans la durée. Renforcer les liens qui nous unissent, mutualiser nos pratiques, approfondir nos réflexions : telles sont les tâches auxquelles nous allons désormais nous consacrer. Le site « L’espoir à gauche » est celui de toutes celles et de tous ceux qui veulent, avec nous, mener à bien ce travail. Vincent PEILLON »
Onze mois plus tard, que reste-t-il des bonnes intentions de Vincent Peillon ?
Pas grand-chose apparemment.
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